La stratégie thérapeutique dans l’hypertension artérielle (HTA) s’est clarifiée ces dernières années aboutissant à la triple association, d’un bloqueur du système rénine angiotensine (SRA), d’un antagoniste calcique et d’un diurétique.
Malgré cela le clinicien est encore fréquemment confronté à l’HTA résistante dont la physiopathologie et la prise en charge sont mal codifiées. En particulier quel quatrième ou cinquième traitement ajouter ? Quelle est la place des techniques interventionnelles ? C’est dans ce contexte qu’a été présentée à l’ESC l’étude Pathway 2 en hotline par Brian Williams (Londres), étude académique financée non par l’industrie mais par la British Heart Fundation, ce qui est toujours un bon point concernant l’indépendance des résultats. Cette étude randomisée a comparé, chez des patients hypertendus résistants à la trithérapie conventionnelle, en aveugle et cross over, quatre molécules prises séquentiellement, l’ordre de ces séquences étant aléatoire et les durées de traitement de 3 mois : la spironolactone (25-50 mg), le bisoprolol (5-10 mg), la doxasozine (4-8 mg) et un placebo avec une titration forcée. Le critère de jugement était la baisse de pression artérielle systolique par automesure à l’issue de la période de traitement. L’effet de la spironolactone était comparé à celui du placebo (critère de jugement principal) ; il était ensuite comparé à la baisse de pression obtenue par les autres traitements poolés puis analysés séparément. Un autre objectif de ce travail était de déterminer si la rénine plasmatique, habituellement basse dans ces formes d’HTA car témoignant d’une volodépendance, était prédictive de la réponse aux traitements. Elle était mesurée avant le démarrage du traitement testé.
L’étude a randomisé 335 patients dont 314 ont participé à l’étude et 230 ont eu un suivi complet, ce qui n’est guère surprenant compte tenu de la lourdeur du protocole. Ces patients, d’âge moyen 61 ans, avaient des pressions de consultation sous trithérapie antihypertensive à 157/90 mmHg en moyenne et des automesures à 147/84 confirmant la résistance de leur HTA. La fonction rénale était normale et un peu plus de 10 % des patients étaient diabétiques. Les résultats sont sans ambiguïté. La spironolactone fait mieux que le placebo avec une baisse très significative de la pression systolique de plus de 12 mmHg (soit presque 9 mmHg de mieux que le placebo). Elle fait mieux que les autres traitements de 4 mmHg ce qui est statistiquement significatif. La spironolactone a permis de contrôler l’HTA dans près de 60 % des cas contre un peu plus de 40 % des cas pour les autres produits actifs.
En terme d’effet indésirable il ne semble pas y avoir de prix à payer pour ce résultat, avec la réserve que la durée de traitement a été courte, et donc sans évaluation possible de la fréquence de la gynécomastie. Il n’y a pas eu plus d’événements indésirables que dans le bras placebo. La kaliémie a augmenté de 10 % en moyenne ; les auteurs insistent sur la nécessité de monitorer ce paramètre. Fait intéressant, plus la rénine est basse – ce qui va avec une rétention hydrosodée plus importante – plus la réponse à la spironolactone est importante, ce qui n’est pas le cas pour les autres traitements. La rénine pourrait ainsi constituer un prédicteur de la réponse à cette classe. Les auteurs annoncent encore beaucoup d’autres indicateurs à venir pour essayer de prédire la réponse au traitement et ainsi rationaliser le choix des traitements de l’HTA résistante.
Commentaire du Pr Pierre Lantelme et des Drs Brahim Harbaoui et Pierre-Yves Courand
Inconstestablement le traitement de quatrième intention
Après des décennies de doute concernant la spironolactone (notamment de nos collègues anglais !) cet essai vient confirmer l’intérêt majeur de cette molécule dans l’HTA résistante. Il s’agit incontestablement du traitement à ajouter en 4e intention avec les contre-indications et la surveillance habituelle. Il y a donc là une confirmation éclatante de ce que préconisaient les hypertensiologues français depuis longtemps. Sans être la première étude démontrant l’efficacité tensionnelle de la spironolactone dans ce contexte, c’est incontestablement la plus aboutie. Finalement, un des intérêts de cette étude est aussi de faire évoluer la définition de l’HTA résistante vers le non contrôle tensionnel par une quadrithérapie incluant la spironolactone. Cet aspect a été mis en avant par le Pr Mancia qui commentait l’étude. Il est certain que pour les cliniciens ayant la pratique de l’HTA sévère cette recommandation était déjà dans les esprits, les vraies difficultés face à une HTA commençant après la spironolactone. Nous verrons comment évolueront les recommandations.
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