L’une des premières évolutions concerne le dépistage de la FA, avec la reconnaissance de la place croissante des objets connectés. L’intérêt du recours à certaines montres connectées a été souligné dans des études à large échelle, ce qui plaide en faveur de leur utilisation après l’âge de 65 ans, notamment chez les personnes ayant des facteurs de risque cardiovasculaire. « Il est conseillé de recueillir un enregistrement sur des périodes de deux semaines de dépistage et les tracés sont le plus souvent de bonne qualité, souligne le Pr Nicolas Lellouche. Il s’agit toutefois plutôt d’une alerte sur un trouble du rythme, car la corrélation avec une FA n’est que de 34% dans l’étude SmartWatch ».
Deux acronymes : 4S et ABC
La caractérisation de la FA se fonde sur l’algorithme 4S. Le premier S correspond à l’évaluation du risque de survenue d'un accident vasculaire cérébrale [AVC] (score de CHA2DS2-VASc) ; le deuxième S porte sur la sévérité des symptômes qui guide la stratégie antiarythmique ; le troisième S sur la gravité de la charge en FA (paroxystique, persistante, permanente, nombre d’épisodes et leur durée) ; et le quatrième sur la sévérité du substrat (comorbidités, facteurs de risque cardiovasculaires, cardiomyopathie atriale évaluée par imagerie). « L’infiltration de l’oreillette gauche par de la fibrose (l’atriomyopathie) est un nouveau paramètre qui peut être évalué en échographie et sans doute à l’avenir en IRM », précise le Pr Lellouche.
Les experts de l’ESC prônent une prise en charge globale de la FA, illustrée par le recours à l’acronyme ABC : A pour « Avoid stroke/anticoagulation » et donc la stratégie antithrombotique, B pour « Better symptom control », soit le traitement antiarythmique, et C pour « Cardiovascular risk factors and comorbidity optimization », qui consiste en l’identification et la correction des facteurs de risque associés. En effet, la FA n’est pas une maladie isolée mais vient se surajouter à d’autres facteurs aggravant le risque cardiovasculaire, notamment celui d’AVC (approche intégrée de la FA).
Se centrer sur le patient
La prise en charge doit être non seulement holistique, mais aussi centrée sur le patient. Ce dernier doit être un acteur à part entière des modifications de son hygiène de vie visant à corriger les facteurs de risque associés, mais aussi de la décision thérapeutique. Si l’on prend l’exemple de l’ablation, technique efficace mais grevée de complications, elle ne peut être indiquée qu’après discussion avec le patient de ses bénéfices et de ses risques. « L’étude CABANA, menée sur des patients tout-venant, a démontré ses bénéfices sur les symptômes, mais pas sur des critères majeurs. Cependant, la méthodologie de cette étude a été critiquée du fait d’un taux élevé de cross-over, rendant son interprétation difficile, rappelle le Pr Lellouche. Dans l’étude CASTLE-AF, un impact positif de l’ablation sur des critères cliniques lourds a été rapporté chez des patients ayant une insuffisance cardiaque associée à une FA ». Des études publiées depuis ces recommandations, comme EAST-AFNET, ont montré qu’un contrôle précoce du rythme (pharmacologique ou par ablation) permet de réduire le risque d’événements majeurs à cinq ans.
Une ablation est le plus souvent indiquée après échec d’un traitement antiarythmique de classe 1 ou 3 (recommandation de classe I), ce qui exclut les bêtabloquants. Au chapitre des antiarythmiques, le sotalol, moins efficace et exposant à plus d’effets secondaires que l’acétate de flécaïnide, a été déclassé en classe IIB.
Pas de nouveauté en matière de stratégie antithrombotique. Le score CHA2DS2-VASc reste au cœur de l’évaluation du risque. Le score HAS-BLED, qui avait disparu des recommandations ESC en 2016, refait son apparition pour stratifier le risque hémorragique. S’il est significatif à partir d’une valeur de 3, il ne contre-indique pas la mise sous anticoagulant, mais peut avoir une incidence sur la dose administrée. Quant à la place des anticoagulants oraux, elle est confortée comparativement aux antivitamines K.
Enfin, la fermeture de l’auricule gauche peut être indiquée en cas de contre-indication aux anticoagulants. Le niveau de preuve est plus faible (IIB), mais ce traitement de secours permet de proposer une solution dans certaines situations difficiles.
D’après un entretien avec le Pr Nicolas Lellouche (Créteil)
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?