« DANS LES GRANDS hôpitaux, la cardiologie est à elle seule à l’origine de la moitié des achats de dispositifs médicaux (DM). L’objectif de notre commission est de se prononcer sur l’intérêt clinique de ces DM et de déterminer s’il convient de les inclure dans le panier des biens et services remboursables. Notre évaluation vise aussi à apprécier l’amélioration du service attendu des nouveaux dispositifs », explique le Pr Jacques Machecourt, chef du service de cardiologie du CHU de Grenoble et membre de la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) de la Haute Autorité de santé (HAS).
La CNEDiMTS a pour mission d’éclairer les instances décisionnelles : le ministère de la santé, le comité économique des produits de santé (CEPS) pour les DM et l’assurance-maladie pour les actes. « L’utilisation des DM est en constante augmentation. La volonté d’amélioration de l’état de santé des patients et de raccourcissement des séjours hospitaliers en favorisant le retour à domicile associée au vieillissement de la population, ainsi que l’augmentation de la prévalence des pathologies chroniques, sont autant de facteurs favorisant la croissance du secteur du DM », souligne la CNEDMiTS dans son rapport 2011.
Les critères d’évaluation, retenus par la commission, reposent d’abord sur l’appréciation du service attendu. « Nous travaillons à partir de données factuelles, le plus souvent des études randomisées comparatives, pour évaluer si tel nouveau DM apporte un service attendu (SA) suffisant, justifiant son inscription au remboursement. Ensuite, on apprécie l’amélioration du service attendu (ASA) apportée par le dispositif par rapport à un produit, un acte ou une prestation comparable. C’est notamment ce niveau d’amélioration du service attendu qui va être pris en compte par le comité économique des produits de santé pour déterminer le prix du dispositif », souligne le Pr Machecourt, en précisant qu’il existe cinq niveaux d’ASA : le niveau I (amélioration majeure), niveau II (amélioration importante), niveau III (amélioration modérée), niveau IV (amélioration mineure), niveau V (absence d’amélioration).
Dans le domaine de la cardiologie interventionnelle, on peut distinguer deux grands types de dispositifs médicaux : le remplacement valvulaire aortique par voie transcutanée (TAVI) et les stents.
En 2011, la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé a clairement fait le choix d’encourager et d’accompagner l’innovation dans le domaine de l’implantation des valves aortiques. « C’est un secteur important que nous suivons depuis 2009. À l’époque, nous avons décidé d’inscrire les valves au remboursement à titre probatoire. En effet, nous ne disposions pas encore de grandes études randomisées, elles ont été publiées bien plus tard. Mais on avait déjà la conviction d’être face à des dispositifs médicaux qui constituaient un véritable saut technologique. On a donc instauré ce remboursement à titre probatoire pour une durée de deux ans, en demandant à la Société française de cardiologie (SFC) d’établir un registre exhaustif des patients implantés et d’aider à définir le nombre de centres habilités à mettre des valves transcutanées. Au départ, il y a eu seize centres puis rapidement trente-trois. Et tous les patients ont été intégrés dans le registre FRANCE 2 mis en place par la SFC et le Groupe athérome coronaire et cardiologie interventionnelle (GACI). Ce registre a donné lieu à des publications importantes, notamment dans le « New England Journal of Medicine ».
La CNEDMiTS a donc, au final, pu disposer des travaux de bonne qualité dont elle avait besoin pour se prononcer au terme de cette période probatoire. À côté des données du registre FRANCE 2, nous avons aussi travaillé sur les études randomisées américaines », explique le Pr Machecourt.
En 2011, la CNEDMiTS a donc procédé à une réévaluation du TAVI pour les patients atteints de rétrécissement aortique symptomatique sévère et l’a confirmé comme une alternative thérapeutique pour les patients ayant une contre-indication au remplacement valvulaire aortique chirurgicale du fait d’un trop haut risque chirurgical ou de conditions anatomiques défavorables. Pour la HAS, le taux de survie à un an a été jugé acceptable, même si les complications au TAVI existent. « La sélection des patients éligibles à cette technique doit être encadrée et réalisée par une équipe multidisciplinaire pour évaluer le risque opératoire et les comorbidités. De plus, cet acte ne doit pas être réalisé à titre compassionnel chez les patients ayant une espérance de vie inférieure à un an, ni chez les patients refusant la chirurgie alors qu’ils y sont éligibles », souligne le rapport 2011 de la CNEDMiTS qui précise que la réévaluation de l’implantation des valves aortiques par voie transcutanée est d’ores et déjà inscrite au programme de travail 2014 de la HAS.
Les stents actifs.
En ce qui concerne les stents actifs, la nouveauté est l’inscription au remboursement d’un stent de troisième génération Nobori/Bio-Matrix. « Nous avons estimé que le service attendu était suffisant et nous avons délivré une amélioration du service attendu de niveau V, ces stents faisant au moins jeu égal selon nous avec Cypher qui, en 2002, avait été considéré comme un véritable saut technologique. Aujourd’hui, on est dans la continuité des progrès », souligne le Pr Machecourt, en insistant sur le fait que les experts se prononcent au vu des données disponibles. « En cardiologie, nous avons de la chance. En général, nous avons des études randomisées très bien faites. Mais il arrive que le dossier de certains dispositifs médicaux, en particulier des stents, soit recalé. Cela ne veut pas dire que ces stents sont mauvais mais, parfois, nous ne disposons pas d’études randomisées évaluant des critères cliniques de sécurité ou d’efficacité suffisants pour nous prononcer », indique le Pr Machecourt.
D’après un entretien avec le Pr Jacques Machecourt, chef du service de cardiologie du CHU de Grenoble et membre de la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) de la Haute Autorité de santé (HAS).
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