Santé publique France publie une photographie de la santé cardiovasculaire des Français, dans un grand dossier thématique réalisé à partir du Système national des données de santé (SNDS) et publié dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire. « Responsables de plus d’un million d’hospitalisations en 2022 et de 140 000 décès en 2021 », comme l’a rappelé la Dr Caroline Semaille, directrice de SPF, soit plus d’un décès sur cinq, les maladies cardio-neurovasculaires restent la deuxième cause de mortalité après les cancers en France.
Ce constat s’applique à toutes les maladies cardio-neurovasculaires, dont les accidents vasculaires cérébraux, l’insuffisance cardiaque et les cardiopathies ischémiques. Ces dernières sont la première cause de maladies cardiovasculaires (MCV) totalisant chaque année environ 30 000 décès et plus de 240 000 personnes hospitalisées. « Les cardiopathies ischémiques se distinguent particulièrement, touchant trois millions de personnes, soit près de 6 % de la population adulte française », souligne la directrice de SPF dans son éditorial. Quant à l’insuffisance cardiaque, « le nombre d’adultes hospitalisés (…) et la prévalence (…) n’ont jamais été aussi élevés », selon l’une des études fondée sur les chiffres de 2022.
Les accidents vasculaires cérébraux (AVC) ne sont pas suffisamment pris en charge en unité de soins intensifs neurovasculaires, avec seuls 46,8 % des patients concernés en bénéficiant, et « avec des variations importantes selon le département », rapporte l’un des neuf articles du dossier. Pourtant, la létalité à un an est élevée, « de 20,8 % des patients hospitalisés pour un AVC ischémique et 37,9 % de ceux hospitalisés pour un AVC hémorragique », lit-on dans l’étude. Pour les AVC ischémiques, seule une minorité de patients (7,2 %) a eu une thrombectomie mécanique.
Des facteurs de risque comportementaux
Alors que ces chiffres ne vont cesser d’augmenter avec l’avancée en âge de la population, « seulement un Français sur dix bénéficie d’une santé cardiovasculaire optimale selon une échelle américaine intégrant les comportements de santé (tabagisme, surpoids, activité physique, alimentation) et des facteurs de risque métaboliques (cholestérol, tension artérielle, glycémie) », ajoute-t-elle.
Près d’un quart des adultes fume encore quotidiennement, présente un niveau de sédentarité élevé, et trois hommes et plus d’une femme sur 10 ont une consommation d’alcool les exposant à des complications, détaille la médecin de santé publique de formation. Sans parler des trois quarts de la population qui n’atteignent pas la recommandation de manger cinq fruits et légumes par jour.
Des inégalités à prendre en compte
Outre les fortes disparités territoriales (offre de soins en particulier pour les unités neurovasculaires et de réhabilitation cardiaque mais aussi pour l’épidémiologie des facteurs de risque), Santé publique France met en exergue l’influence marquée des inégalités sociales et de genre pour les MCV. « Seuls 4 % des adultes ayant un niveau d’éducation inférieur au baccalauréat ont une santé cardiovasculaire optimale, contre 21 % pour ceux ayant un niveau d‘études supérieur », relève la directrice de l’agence.
Si la prévalence des facteurs métaboliques reste la plus élevée chez les hommes, les femmes présentent des facteurs de risque spécifiques qu’il faut savoir rechercher, estime dans un avant-propos le Pr Gérard Helft, de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) et président de la Fédération française de cardiologie. À savoir troubles hypertensifs de la grossesse, diabète gestationnel et syndrome des ovaires polykystiques
Mais au-delà de ces facteurs de risque féminins, il reste que les femmes sont « moins bien prises en charge que les hommes », déplore la Dr Semaille, alors que l’incidence du syndrome coronarien augmente depuis une quinzaine d’années chez les femmes de moins de 65 ans. « (Les femmes) sont moins souvent hospitalisées en soins intensifs et présentent plus de complications aiguës avec une mortalité précoce plus élevée », poursuit-elle. Un constat qui fait écho au récent rapport de l’Académie de médecine pointant une perception erronée de l’infarctus comme une maladie « principalement masculine », tant chez les patientes que dans les services d’urgence. La fondation Agir pour le cœur des femmes, fondée en 2020 par la Pr Claire Mounier-Véhier, milite pour la sensibilisation de tous et la formation des professionnels de santé.
La prévention pour vieillir en bonne santé
« La prévention doit être au cœur de nos actions pour vieillir en bonne santé », insiste la Dr Caroline Semaille pour qui « la marge de progression est immense ! ». « Ce fardeau n’est pas une fatalité », poursuit-elle alors que « trop de Français ignorent leur état de santé ». Si la prévalence de l’HTA est de 30 %, seulement près de la moitié des patients concernés se savent hypertendus.
Un appel partagé par le Pr Helft, qui plaide pour « un effort coordonné de grande ampleur », rappelant « la réalité tragique supplémentaire des arrêts cardiaques extra-hospitaliers, qui touchent chaque année près de 50 000 Français ». Les actions de prévention doivent ainsi se multiplier, la Fédération française de cardiologie donnant en exemple les Parcours du cœur déployés depuis cinquante ans, qui font la promotion de l’activité physique. Si elle a augmenté chez les hommes, près de la moitié des femmes n’atteignent pas les niveaux recommandés (150 minutes par semaine).
Si la Dr Semaille parie sur les rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie, le Pr Helft demande, au nom de la Fédération française de cardiologie, de prendre le problème à bras-le-corps avec une coordination par une délégation interministérielle.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024