Grâce à l'article 51 de la loi de financement 2018 de la sécurité sociale, les projets de téléréadaptation cardiaque vont commencer à voir le jour en France. Ce type de solution est déjà testée avec succès en Australie et au Canada. « La première phase de réadaptation cardiaque, généralement hospitalière, qui intervient par exemple après une chirurgie cardiaque ou un évènement comme un infarctus du myocarde, n'est pas concernée. Mais la seconde phase qui se passait jusqu'ici en centre de réadaptation (en hospitalisation complète ou de jour) ainsi que la phase 3 (post-hospitalière, à domicile), devraient grandement bénéficier de la télémédecine appliquée à la réadaptation cardiaque », précise le Dr François Ledru, cardiologue au département médicochirurgical « cœur, artères, reins et transplantation » (Issy les Moulineaux). De quoi permettre aux patients d'être supervisés sur le plan médical tout en développant leurs capacités d'effort et leur force musculaire, si possible de façon pérenne.
Une logistique à mettre en œuvre
La téléréadaptation cardiaque ne pose pas de problèmes technologiques, mais d'organisation et de logistique. « En pratique, le patient viendrait au départ en hospitalisation de jour pour une évaluation et pour suivre une première séance afin de connaître le protocole de réadaptation, soit 30 à 45 minutes de gymnastique, de renforcement musculaire, suivies d'un travail en endurance sur tapis ou vélo. Au cours de cette première séance, on lui expliquerait l'usage des capteurs, qui enregistrent le rythme cardiaque et éventuellement la tension artérielle. Ils envoient les données à un centre de contrôle via un smartphone, de façon asynchrone, c'est-à-dire, sans forcément un professionnel de santé qui surveille ce qui se passe, l'analyse se faisant en différé. Pour aider le patient à se souvenir des exercices, on lui donnerait des tutoriels. Cette façon de procéder lui permettrait d'être indépendant, de gérer son temps comme il le veut, à un rythme prescrit (au minimum trois fois par semaine). Elle lui permettrait aussi de vérifier que sa fréquence cardiaque d'entraînement est bien conforme à celle prescrite par le cardiologue, afin de gagner de la capacité d'effort et de la résistance à la fatigue, sans atteindre des intensités trop dangereuses. Une réévaluation régulière lui permettrait d'augmenter l'effort au fur et à mesure de ses progrès », explique le Dr Ledru. La téléréadaptation pourrait également être réalisée en mode synchrone, moins souple en termes d'horaires (car nécessitant qu'un médecin surveille un ou plusieurs patients en temps réel dans un bureau de télémédecine), mais cela pourrait aider les patients anxieux à se sentir plus en sécurité.
Vers de nouveaux modes de suivi ?
La télémédecine offre encore des possibilités, comme permettre une réadaptation en extérieur (jogging, marche nordique, etc.), tout en bénéficiant d'un enregistrement de ses paramètres physiologiques et de son activité (pauses, durée, etc.). « Mais toutes ces formules demandent du temps à des professionnels de santé, qui n'est pas du temps de consultation classique et qui n'entre pas encore dans les forfaits de télésurveillance », note le Dr Ledru. D'où l'urgence de prouver que ces expériences de télémédecine ont de bons résultats : « moins d'hospitalisations, une plus grande adhésion du patient avec le développement de sa capacité d'effort, etc. Cela a été démontré dans d'autres pays, mais pas encore en France. Des études vont donc se mettre en place pour le vérifier ».
Cet élargissement de l'offre permettrait aussi de toucher des patients échappant jusqu’à présent à la réadaptation, en raison de contraintes trop importantes (éloignement du centre de réadaptation cardiaque, handicap empêchant une réadaptation classique, manque de temps, etc.). « C'est aussi le moyen de se donner plus de chance de pérenniser une activité physique, alors que si l'on n'accompagne pas les patients avec des sollicitations répétées, ils ont plus de risques de redevenir sédentaires. Enfin, la téléréadaptation cardiaque va nous permettre de glaner des données anonymes, de faire du Big Data, de suivre des populations, ce qui va être très informatif sur l'état de santé de la population. Elle va se développer et apporter des solutions de plus en plus légères pour un plus grand nombre de patients. On est à l'aube d'une nouvelle ère ! » conclut le Dr Ledru.
D’après un entretien avec le Dr François Ledru, département universitaire médicochirurgical « cœur, artères, reins et transplantation », site Corentin Celton (Issy les Moulineaux).
(1) http://capa-city.fr
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