La pilule
La pilule estroprogestative au-delà de 40 ans.
Elle a des bénéfices indiscutables sur le cycle en faisant la prévention de l’anémie ferriprive, en assurant la régularité des cycles et l’absence d’aménorrhée et en minimisant les possibles syndromes prémenstruels. Elle offre par ailleurs une protection démontrée contre certains cancers, de l’ovaire en particulier, et a sûrement d’autres avantages vis-à-vis de la prévention des kystes de l’ovaire fonctionnels, de la prévention de l’ostéoporose, des salpingites, de l’acné.
Cancer du sein et pilule
En août 2005 est paru un avis alarmant du CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) sur le risque cancéreux chez les utilisatrices de pilules estroprogestatives. Cet avis repose sur une actualisation de données connues ce qui a conduit à maintenir la pilule dans le groupe des agents cancérigènes [1].
En 2009,le risque de cancer est toujours discuté. La méta-analyse de référence [2], celle du « Lancet » 1996, porte sur 54 études (10 de cohortes et 44 cas-témoins) dans 25 pays et sur 53 297 femmes atteintes de cancers du sein, appariées à 100 239 femmes sans cancer. Le risque relatif en cours de prise est de 1,24 [1,15 – 1,33] ; ce risque diminue à l’arrêt de la pilule et se normalise dix ans après ; il est possible selon la méta-analyse de Kahlenborn [3], étude cas-contrôle associant contraception orale et cancer du sein préménopausique, que l’odd ratio soit discrètement augmenté à 1,19 [1,07 – 1,29], et nettement plus augmenté, avec un odd ratio à 1,44, chez les patientes ayant utilisé la contraception orale avant une grossesse, vers 1,5 dans le cas inverse ; enfin, dans cette série, l’odd ratio, si la prise de pilule est de plus de 4 ans avant une grossesse, atteint 1.52 [1,26 – 1,82].
De l’avis de l’OMS, ce n’est pas un argument pour arrêter la pilule à 40 ans, eu égard aux bénéfices de la pilule mais cela peut être un objet de réflexion, en particulier en cas d’antécédents familiaux. C’est l’occasion de redire la nécessité d’examiner les seins, même avant 30 ans, de savoir informer les femmes des données de la littérature et de prescrire des mammographies dès 40 ans dans ce groupe de femmes.
Le risque vasculaire est le frein essentiel
Le risque thromboembolique veineux augmente après 35 ans et lorsque l’IMC est supérieur à 35. Le risque artériel, d’infarctus du myocarde ou d’accident vasculaire cérébral, augmente avec l’âge mais reste rare, entre 0,4 et 1,6 cas pour 10 000 femmes de moins de 45 ans. Globalement, les pilules de 3e génération ont un meilleur bénéfice/risque sur ce point que les autres pilules.
En pratique
La pilule n’est plus une contre-indication chez les femmes n’ayant que leur âge comme facteur de risque et l’on peut sûrement la continuer après 35 ans chez une femme en bonne santé, dont le cholestérol est normal et qui ne fume pas ; il peut en théorie être préférable de favoriser un minidosage à 20 ou 15 µg ou une pilule à l’estradiol mais les patientes n’en sont pas forcément demandeuses et ne sont guère tentées par le changement d’un équilibre qui leur convient.
Parmi les micropilules, celles à 75 µg de désogestrel ont une efficacité comparable à la pilule classique avec un faible taux de grossesse extra-utérine et de kystes fonctionnels symptomatiques. Il y a toutefois un certain nombre d’abandons pour irrégularités ou saignements ; l’OMS n’émet aucune réserve à leur utilisation.
Les prégnanes et norprégnanes sont très utilisés avec préférentiellement un schéma 20 jours sur 28 plutôt que du 5e au 25e jour mais ils n’ont pas d’AMM dans cette indication. Ils s’avèrent néanmoins fort intéressants en cas de mastopathie douloureuse, d’endométriose ou de ménorragies de la quarantaine ou encore en cas de contre-indication métabolique ou vasculaire à la pilule ; il est logique de leur associer de petites doses d’estrogène naturel en cas de spottings ou de bouffées de chaleur si fréquentes dans cette tranche d’âge.
Implant
Avec l’implant progestatif, il n’y a pas beaucoup d’études au-delà de 40 ans. Son intérêt réside dans son efficacité contraceptive et l’effet bénéfique sur la dysménorrhée et le volume des règles. Il est montré que cet implant respecte la masse osseuse avec une estradiolémie supérieure à une phase folliculaire précoce. Il y a néanmoins un certain nombre de facteurs limitants comme l’acné, la mastodynie, les céphalées, la prise de poids, l’imprévisibilité des saignements et l’aménorrhée qui crée angoisse de grossesse et de cancer à cet âge.
SIUM
Le système intra-utérin (SIUM) au lévonorgestrel offre beaucoup d’avantages qui en font une contraception de premier choix à cet âge.
Au total
Au total, chez les femmes de plus de 35 ans, selon l’ANAES [4], il est naturel de réévaluer l’adéquation contraceptive mais le seuil n’est pas précis et il est sûrement possible de maintenir la méthode en cours si elle est bien tolérée, y compris la pilule eu égard à ses bénéfices. Néanmoins, l’ANAES recommande, par prudence de substituer un estroprogestatif.
1. Quéreux CC Soupçons sur la pilule… On se calme ! J Gynecol Obstet Biol Reprod 2 005 ;
34 : 731-732
2. Collaborative group of hormonal factors in Breast Cancer : collaborative reanalysis of
individual data on 53 297 women with breast cancer and 100 239 women without breast
cancer from 54 epidemiological studies. Lancet 1996, 347, 1713-27
3. Kahlenborn C, Modugno F, Potter DM, Severs WB.Oral contraceptive use as a risk factor for premenopausal breast cancer: a meta-analysis.Mayo Clin Proc. 2006 Oct;81(10):1290-3022-
4. Anaes - Afssaps – Inpes. Service des recommandations professionnelles de l’Anaes Stratégies de choix des méthodes contraceptives chez la femme Déc. 2004
Conflits d’intérêt : Pr Christian Quéreux : pas de conflit d’intérêt déclaré. Dr Odile Maurice : pas de conflit d’intérêt déclaré.
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