Une urgence au même titre que l’AVC

AIT : un coup de semonce à prendre au sérieux

Publié le 04/11/2011
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Crédit photo : BSIP

L’ACCIDENT ISCHÉMIQUE transitoire (AIT) est une urgence au même titre que l’accident vasculaire cérébral (AVC), pour laquelle le patient ou sa famille est invité à appeler le 15 aussitôt (le régulateur jugeant du moyen de transport le plus adapté), même si l’on sait maintenant (Journal of Neurology, Neurosurgery and Psychiatry, septembre 2011) que l’AIT pourrait avoir un effet neuroprotecteur. « Via des cascades métaboliques, explique le Dr Yannick Béjot, il préconditionnerait à l’ischémie ; autrement dit, il permettrait au cerveau de développer des stratégies de défense vis-à-vis d’une nouvelle agression ischémique. » Le volume lésionnel en serait diminué, la survie et le handicap améliorés.

Identifier un premier accident.

Le diagnostic n’est pas si facile, ce qui explique la très large fourchette d’incidences, de 20 à 80 cas pour 100 000 habitants et par an selon les études, 4 fois moins que d’AVC. Les hommes sont relativement plus touchés (3 hommes pour 2 femmes), mais en nombre absolu - et l’espérance de vie de la femme étant ce qu’elle est -, les femmes paient un plus lourd tribut à la maladie.

L’AIT est défini comme un déficit neurologique durant typiquement moins d’une heure, avec une imagerie (au minimum le scanner qui, en visualisant le parenchyme, écarte l’hypothèse d’une hémorragie ; idéalement une IRM) qui ne retrouve pas de signes d’infarctus cérébral. Le déficit neurologique, quel qu’il soit (moteur, sensitif, vertiges, troubles de la parole ou visuels transitoires), est caractérisé par son début brutal (ce qui le différentie d’autres étiologies). Il disparaît habituellement en moins de dix minutes, quelques pourcentages entre dix minutes et une heure. Au-delà, l’imagerie cérébrale objective la trace d’une lésion et la régression de l’ischémie cérébrale.

AIT, AVC, même bilan.

Le bilan initial, réalisé toujours à l’hôpital, et la prise en charge pour une prévention secondaire sont les mêmes pour un accident transitoire ou constitué. En cas de déficit persistant, une IRM est pratiquée le plus rapidement possible, qui peut montrer de petites lésions ischémiques ; elle est suivie éventuellement d’une fibrinolyse (sans attendre une hypothétique récupération). « Il existe en fait un continuum, constate le Dr Béjot, entre l’AIT et l’infarctus cérébral, qui est finalement un AIT suffisamment long pour que l’ischémie se traduise par une nécrose. »

Il s’agit ensuite de comprendre pourquoi l’accident a eu lieu, grâce à l’imagerie des vaisseaux (angioIRM ou angioscanner et/ou écho-doppler), intracrâniens et cervicaux. Est-ce un thrombus ? Une sténose ? Serrée, qui obligerait à une intervention immédiate : les indications opératoires sont plus larges pour les hommes, possiblement sur des sténoses à 50-70 %, versus les femmes sur lesquelles on intervient à plus de 70 % ? Il convient de rechercher une arythmie cardiaque à l’ECG, facteur de risque de récidive. En sachant que, en l’absence de traitement, le risque de constituer un AVC définitif est de 5 à 10 % la première semaine.

En ville ou à l’hôpital ?

« Pour savoir si un AIT " mérite " d’être hospitalisé une fois le bilan lésionnel et étiologique pratiqué, indique-t-il, nous utilisons un score de risque qui évalue le risque de récidive, le score ABCD. » Celui-ci s’appuie sur l’âge (A), inférieur ou supérieur à 60 ans (0 ou 1), la pression artérielle (Blood pressure) à l’admission, en dessous ou au-dessus de 140/90 mmHg (0 ou 1), les caractéristiques cliniques (C), une hémiplégie ou une hémiparésie étant a priori plus inquiétante (cotée à 2) que des troubles de la parole (1), (les autres symptômes étant considérés comme n’impactant pas le score). Enfin, ajoutée à ces trois paramètres, la durée (D) de l’accident, moins de 10 minutes (0), entre 10 minutes et une heure (1) ou plus d’une heure (2), permet de calculer le score, un élément d’orientation précieux : s’il atteint 4, le patient doit être gardé.

Tous, indépendamment de leur score, reçoivent un traitement fonction de l’étiologie, antithrombotique (de l’aspirine dans la majorité des cas, et pour les FA un anticoagulant oral), prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires (pression artérielle, cholestérol, diabète, les cibles les plus basses étant les meilleures) par des antihypertenseurs, une statine, etc., ainsi qu’une reprise de l’activité physique, l’arrêt du tabac et de l’alcool.

Conflit d’intérêt : le Dr Yannick Béjot a reçu des honoraires pour animation de formations des Laboratoires Boehringer et Novartis.

 Dr BRIGITTE BLOND D’après un entretien avec le Dr Yannick Béjot, Service de neurologie au CHU de Dijon, Registre dijonnais des AVC.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9036