La mise en place du dépistage individuel du cancer du sein par mammographie en France s’est fondée sur les résultats de deux grandes études randomisées, publiées dans les années 1970-1980, études qui avaient montré que ce dépistage permettait de réduire de 30 % la mortalité par cancer du sein en population générale. Le dépistage organisé, testé dans quelques départements, fut ensuite généralisé en 2004, alors que 30 % des femmes recouraient déjà régulièrement à la mammographie à titre individuel. Mais dès le début des années 2000, deux auteurs danois, Peter Gotzsche et Ole Olsen, ont semé le trouble en publiant une méta-analyse qui réfutait la qualité des deux grands essais princeps et ne considérait comme méthodologiquement valides que des études négatives. Puis en 2008, une nouvelle polémique est née, portant cette fois sur le risque de surdiagnostic, estimé entre 22 et 31 % selon les auteurs.
Un bénéfice confirmé
Pour mettre un terme à ces polémiques, différents groupes de travail ont repris toutes les données et ont confirmé le bénéfice de la mammographie sur la mortalité par cancer du sein, de 25 % pour l’Euroscreen working group, de 20 % pour l’Independant breast screening review (IBSR) et de 21 % pour Stephen Duffy. En ajustant les données sur le biais d’avance au diagnostic, ils ont estimé le risque de surdiagnostic respectivement entre 1 et 10 %, entre 0 et 36 % et à moins de 10 %.
« Le bilan a donc été revu et corrigé à la baisse », indique le Dr Asselain. Concrètement, pour 1 000 femmes participant au dépistage, l’Euroscreen working group estime à 67 les cas de cancers dépistés, à 4 les surdiagnostics, de 7 à 9 les décès évités et à 200 les faux positifs, dont 30 entrainent une biopsie inutile. L’IBSR rapporte des chiffres comparables : 68 cas de cancer, 13 de surdiagnostics et 4 décès évités. Gotzsche en revanche estime à 0,5 le nombre de décès évités, à 5 les surdiagnostics et surtraitements et à 100 celui de faux positifs.
À ces données s’ajoute le constat d’une participation insuffisante au dépistage : à peine plus d’une femme sur deux participe au dépistage organisé, 10 % ont un suivi individuel, et donc plus d’une femme sur trois ne se fait pas dépister.
Vers un nouveau dépistage basé sur la détection de l'ADN circulant ...
Ceci a conduit la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Madame Marisol Touraine, à demander à l’Institut national du cancer (INCa) d’organiser une concertation citoyenne et scientifique nationale sur le dépistage du cancer du sein. Dans son rapport remis en septembre 2016, le Comité d’orientation a fait différentes recommandations et proposé deux scénarios pour faire évoluer la stratégie sur le dépistage du cancer du sein et permettre à terme, avec des outils technologiques validés, de mettre en place une stratégie de dépistage adaptée au niveau de risque :
- l'arrêt du programme de dépistage organisé au profit d’un suivi individualisé ;
ou
- l'arrêt du dépistage organisé actuel pour un nouveau dépistage organisé profondément modifié. C’est cette deuxième option qui a été choisie par la ministre.
À côté de l’amélioration des performances du diagnostic mammographique, plusieurs pistes sont explorées pour permettre un diagnostic plus précoce. L’une des voies très prometteuse est la détection de mutations d'origine tumorale dans l'ADN circulant, qui motive actuellement de nombreuses recherches.
Ce type d’approche pourrait permettre de dépister les cancers du sein plus précocement que ne le fait la mammographie, dont l’avance au diagnostic par rapport à la clinique est toutefois de 12 à 18 mois.
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