« La mise en œuvre du traitement par CAR-T cells représente toujours un défi logistique et organisationnel », résume la Dr Vekhoff. Elle nécessite :
- une structure adéquate associant les services d’hématologie, de réanimation, de neurologie, de radiologie, d’aphérèse, les laboratoires de thérapie cellulaire et de biologie ;
- des centres référents régionaux ;
- une production complexe, généralement internationale, impliquant des cheminements compliqués, comme des allers retours entre la France, les Pays Bas, les États-Unis (Californie) puis de nouveau les Pays Bas et enfin la France.
« Le cadre réglementaire est lui aussi assez lourd. Les centres experts doivent être qualifiés, non seulement, par les ARS mais aussi par les industriels fabricants de CAR-T Cells », ajoute la Dr Vekhoff. Enfin, on ne peut se dispenser d'une réflexion éthique sur l'égalité d'accès à cette thérapeutique innovante, avec 22 centres experts (dont quatre pédiatriques), auxquels les patients sont adressés.
Un bilan positif à un an
« Les patients injectés ont été moins nombreux, probablement à cause de la lenteur du démarrage mais aussi du Covid-19. Un registre est en place en France mais il est encore trop tôt pour l’analyser, explique la Dr Vekhoff. Les données américaines sur plus de 500 patients atteints de lymphome injectés (https://www.cibmtr.org), dont 200 de plus de 65 ans (âge médian 70 ans), montrent que les toxicités majeures (syndrome de relargage des cytokines et effets neurologiques) sont celles attendues et surtout qu'elles ne sont pas majorées par l'âge (1). Ce qui prône un élargissement du pool de patients susceptibles de bénéficier des CAR-T cells ».
De nouvelles CAR-T cells et indications en développement
Plusieurs indications sont en cours d'agrément avec de nouvelles CAR-T cells. « Il faut bien comprendre que chaque thérapeutique CAR-T cell résulte d'un important travail de mise au point et d’ajustement de type haute couture pour aboutir à telle ou telle indication », explique la Dr Vekhoff.
Les KTE-X19 devraient être agréées dans le lymphome du manteau triple réfractaire en rechute après chimiothérapie, anti-CD20 et inhibiteurs de Burton (Ibrutinib). Une étude de phase 1, menée sur 68 patients, a mis en évidence un taux de réponse exceptionnel de 93 %, dont 67 % de rémissions complètes, avec 83 % de survie globale à 12 mois alors que la médiane de survie est de 6 à 10 mois classiquement (2) .
Le Liso-cel devrait de son côté être agréé dans divers sous-groupes de lymphomes B de mauvais pronostic et en rechute réfractaire. L'essai de phase 1 TRANSCEND-NHL-001, mené sur près de 300 patients, montre en effet un taux de réponse globale de 73 %, une survie globale de 21 mois et des durées de réponses estimées à un an de 55 % en plateau (3).
Par ailleurs, dans les leucémies lymphoïdes chroniques en échec, une petite étude de phase 1 sur 23 patients a mis en évidence 89 % de réponses avec ce même Liso-Cel. Des résultats très préliminaires mais intéressants.
Dans les myélomes, plusieurs types de CAR-T cells anti-BMCA, un antigène plasmocytaire, sont en développement. Une phase 1 sur 29 patients a donné 100 % de réponse chez des sujets penta-réfractaires en rechute dont 66 % de réponses complètes. « C'est très encourageant même si à la différence du lymphome, comme d'habitude dans les myélomes, on n'a pas de plateau, donc pas de guérison », note la Dr Vekhoff. Dans les lymphomes T, rares, des CAR-T cells anti-CD5 sont aussi en développement. Enfin, dans les leucémies aiguës myéloblastiques des CAR-T cells anti-CD117 et anti-CD123 sont en cours d'étude (5). Affaire à suivre…
(1) Pasquini MC et al. ASH 2019, abstract 764
(2) Wang M et al. NEJM 2020; 382:1331-1342
(3) Abramson JS et al. Lancet 2020; 396: 839–52
(4) D’Agostino M, Raje N. Leukemia 2020; 34: 21–34
(5) Grain A et al. Bulletin du Cancer 2020; 107:234-243
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