Marie Curie Six décembre 2001 : je pénètre, rue d’Ulm, dans le bureau du président de l’institut Curie, où je passerai douze années, les plus passionnantes, les plus fructueuses de ma vie… Je suis fasciné par le portrait de Marie Curie, photographiée par Henri Manuel. Le regard pénétrant, ses yeux sombres et tristes, semblent scruter le nouveau venu. Survient alors une sorte « d’engagement silencieux », me liant à cette femme qui, 150 ans après sa naissance, continue d’apparaître comme un personnage, unique dans l’histoire des sciences.
Avant de considérer comment je pourrai faire vivre le « modèle Curie » tel que Marie Curie l’a conçu, j’ai voulu mieux connaître ce personnage immortel. La biographie écrite par sa fille Eve « humanise » Marie Curie. On découvre ainsi les deuils qui ont assombri sa jeunesse, les délices du carnaval, les journées de gaieté à Zwola, et les moments de doute, lorsqu’à 22 ans, elle écrit à son frère : « j’ai perdu l’espoir de devenir jamais quelqu’un , toute mon ambition s’est reportée sur Bronia et sur toi ». « Humaniser Marie Curie », c’est découvrir son besoin d’aimer et d’être aimée. Au-delà de l’affection profonde qui la lie à sa famille, ce sont les quelques mots d’une tendresse bouleversante écrits quelques jours après la mort accidentelle de Pierre qui le révèlent. « Pierre, mon Pierre, tu es là comme un pauvre blessé qui se repose en dormant la tête enveloppée. Ta figure est douce et sereine, c’est encore toi, enfermé dans un rêve dont tu ne peux sortir » Je comprends mieux, désormais, le regard de Marie Curie, tel que Henri Manuel l’a fixé pour l’éternité !
Le modèle Curie et l’institut Curie
Le « modèle Curie » se définit par la continuité entre la recherche fondamentale et les soins. Ce modèle est fondé sur le rapprochement des chercheurs, des soignants et des patients. Tout commence en 1909. L’institut Pasteur, qui attribuera à l’opération une partie du legs Ifla-Osiiris (d’un montant de… 35 millions de franc-or) et l’université de Paris, décident de construire un « institut du radium ». Il ne sera achevé qu’en juillet 1914. Cette construction comporte deux bâtiments, séparés, selon la volonté de Marie Curie, par un jardin planté de platanes, de tilleuls et de rosiers. Est édifié également un pavillon pour la préparation des sources radioactives.
Le pavillon Curie est dédié aux recherches sur la radioactivité. Il est dirigé par Marie Curie. Dirigé par le Docteur Claudius Regaud, le pavillon Pasteur est consacré au traitement des cancers par les rayonnements. Les projets réalisés au cours des dernières années à l’Institut Curie s’inscrivent dans « le modèle Curie », qu’il s’agisse, pour la recherche fondamentale, du pôle de biologie du développement, ou du transfert, « de la recherche aux soins innovants »
La biologie du développement
Afin d’explorer les nouvelles voies d’approche thérapeutique du cancer, une idée simple et logique est à l’origine du projet: la connaissance du développement cellulaire normal doit favoriser la compréhension des anomalies pathologiques, en particulier la prolifération cellulaire et la cancérisation. Étudier l’action des gènes, leurs fonctions, à l’échelle de l’organisme, comble « un maillon manquant » et s’inscrit ainsi « dans le transfert de la recherche fondamentale vers l’hôpital ».
La recherche translationnelle
De même que Marie Curie et Claudius Regaud n’avaient qu’à traverser le jardin de Marie pour « transférer la recherche au soin des patients », le département de recherche translationnelle, créé en 2003, est le lieu où chercheurs et médecins conçoivent ensemble des projets de recherche, et développent et partagent des connaissances et une culture commune. Héritée de Marie Curie, cette volonté de l’institut Curie d’anticiper les évolutions scientifiques et structurelles dans le domaine du cancer, a été reconnue, en 2010, dans le cadre des Investissements d’avenir et des laboratoires d’excellence et, en juin 2011, par le premier label SIRIC (Site de Recherche Intégrée dans le Cancer).
Attribué par l’Institut national du cancer, qui retrouve l’inspiration de Marie Curie, le concept d’intégration est ainsi défini : « partage des questions et des objectifs de recherche entre les différentes disciplines, afin d’élaborer en commun des programmes synergiques, dont la finalité est une meilleure prise en charge des patients ». Le modèle Curie et l’exemple que donne l’institut Curie depuis sa création ont une place particulière dans la querelle récurrente, qui oppose, pour certains, la recherche « fondamentale » et la recherche « appliquée ». L’une apparaît comme inutile et coûteuse, tandis que l’on attend de l’autre une amélioration de la condition humaine. Très vite, Marie Curie l’affirme : « son » radium va servir à soigner les malades. De 1919 à 1935, 8319 malades reçoivent des soins à l’Institut du radium. Quel meilleur exemple peut-on donner de l’application « de la recherche fondamentale aux soins innovants ».
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