Alors que la proportion de personnes tatouées ne cesse de croître, il est logique de se demander si cette pratique fait courir des risques en termes de santé. On sait depuis longtemps que l’encre injectée dans la peau migre, et peut être retrouvée dans les ganglions lymphatiques. Or, les encres contiennent souvent des composés carcinogènes tels des amines aromatiques, des amines polycycliques et nombre de métaux. Et ces composés étrangers peuvent induire une réaction immunitaire. Cela a-t-il des conséquences ? Il semble bien que oui malheureusement. Une récente étude suédoise, en population, vient de mettre en évidence un surrisque de lymphome chez les personnes tatouées.
Partant du registre national suédois des lymphomes, les auteurs ont retenu les sujets de 20 à 60 ans ayant développé un lymphome entre 2007 et 2017. Au total, plus de 11 000 personnes -3 000 ayant un antécédent de lymphome et trois contrôles, appariés sur l’âge et le sexe, n’ayant pas développé de lymphome — ont été interrogées. In fine, l’étude porte sur les 1 398 patients ayant souffert de lymphome, plus 4 193 cas contrôles appariés ayant répondu au questionnaire portant sur leurs habitudes de vie et leur éventuel tatouage.
Les lymphomes les plus courants dans cette série sont des lymphomes diffus à grandes cellules B (28 %), suivis des lymphomes de Hodgkin (21 %), puis des lymphomes folliculaires (18 %). L’âge médian au diagnostic se situait entre 51 et 57 ans, excepté pour les Hodgkin, survenant à l’âge médian de 36 ans.
Un surrisque variable en fonction de l’ancienneté du tatouage
Chez ces sujets, les taux de personnes tatouées sont de 21 % chez les cas de lymphomes versus 18 % parmi les contrôles. Ces tatouages ont été pratiqués globalement au même âge chez les cas et les contrôles (âge médian 21 ans). Leur extension (dimensions) est comparable dans les deux groupes, ainsi que le profil de couleurs utilisées. Néanmoins, l’analyse multivariée met en évidence un surrisque de lymphome associé au tatouage.
Globalement, tous lymphomes confondus, le surrisque ajusté de lymphome associé au tatouage est de 21 % (RR = 1,21 [0,99-1,48]), sans atteindre la significativité. Et cette association tend à être plus importante pour les lymphomes à grandes cellules B (RR = 1,30 [0,99-1,71]) et les lymphomes folliculaires (RR = 1,29 [0,92-1,82]).
Le surrisque est significativement majoré chez les sujets tatoués il y a moins de deux ans : 81 % (RR = 1,81 [1,03-3,20]). Il décroît ensuite, dans la période entre 3 et 10 ans après le tatouage. Puis il remonte au-delà de 11 ans d’ancienneté du tatouage.
Pas de lien évident avec la quantité de surface tatouée ou le type d’encre
L’analyse ne met pas en évidence de surrisque lié à l’étendue de la surface corporelle tatouée. A contrario, le plus haut risque est retrouvé chez les sujets ayant un tatouage guère plus large que la paume d’une main.
L’influence des différents types de couleur semble similaire dans les deux groupes. Néanmoins les tatouages noirs ou seulement gris semblent associés à un surrisque plus important. Bref, le panorama est complexe.
« Cette étude est la première à arriver à mettre en évidence un surrisque de lymphome associé au tatouage. Selon ces données, quelle qu’en soit la taille, ces tatouages stimulent une inflammation de bas grade pouvant favoriser le cancer. Mais le tableau est complexe et d’autres études sont nécessaires pour préciser les conséquences à long terme du tatouage et examiner si l’on retrouve notamment une association avec d’autres types de cancers ou avec des maladies inflammatoires », concluent les auteurs.
C Nielsen et al. Tattoos as a risk factor for malignant lymphoma: a population-based case–control study. eClinicalMedicine. 2024;72: 102649
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