L’HISTOIRE EST souvent farceuse, surtout en médecine. Dans les années 1960, les hématologues du célèbre hôpital pédiatrique Saint Jude à Memphis étaient les pionniers de l’irradiation cérébrale dans la leucémie lymphoblastique aiguë (LLA) de l’enfant ; l’équipe en place propose aujourd’hui de se passer totalement de cette option thérapeutique. Il faut rappeler qu’entre-temps, les médecins ayant pris la mesure des effets secondaires ne la proposaient plus qu’en prophylaxie en cas de risque élevé de rechute au niveau du système nerveux central (SNC). Le chercheur Ching-Hon Pui et ses collègues viennent ainsi de montrer que l’optimisation de la chimiothérapie fait aussi bien, voire mieux, tout en limitant le risque de cancers secondaires. De nouveaux facteurs prédictifs du risque de rechute du SNC ont été identifiés, ce qui a permis d’adapter au mieux les doses et les molécules nécessaires.
Rémission complète prolongée.
L’étude a inclus près de 500 enfants soignés pour LLA à l’hôpital Saint Jude et dans le centre Cook au Texas entre 2000 et 2007. L’intensité du traitement était adaptée sur la génétique moléculaire et sur la pharmacogénétique pour chaque enfant. Aucune irradiation cérébrale n’était administrée, même si le risque de rechute du SNC était élevé. Pour évaluer si l’adjonction d’une irradiation donnait de meilleurs résultats, les chercheurs ont comparé les 71 petits patients de l’étude qui auraient été candidats à une radiothérapie prophylactique à 56 cas contrôles historiques ayant été irradiés. Il est ainsi apparu que la durée de rémission complète était significativement plus élevée pour les 71 sujets de l’étude. Les onze enfants ayant eu une rechute du SNC sont restés entre 0,4 et 5,5 ans en rémission secondaire. À 5 ans, sur l’ensemble de la cohorte, la probabilité de rester sans rechute était de 85,6 % (IC 95 %, 79,9-91,3) et la survie globale de 93,5 % (IC 95 %, 89,8-97,2). Le risque cumulé à 5 ans d’avoir une rechute était de 3,9 % (IC 95 %, 1,9-5,9) et de 2,7 % (IC 95 %, 1,1-4,3) spécifiquement pour celle du SNC.
Niveau de maladie résiduelle.
L’intensité du traitement était décidée en premier lieu sur le niveau de maladie résiduelle après la phase de rémission-induction. S’il persistait ≥ 1 % de blastes sur le myélogramme, il était considéré que le risque de rechute du SNC était élevé. Entre 0,10 et 0,99 % de blastes, le risque était intermédiaire. En second lieu, le traitement était ajusté sur des caractéristiques pharmacogénétiques et pharmacodynamiques. Ainsi, la dose de méthotrexate était augmentée chez les individus ayant une LLA à cellules T et chez ceux porteurs de la translocation t (1 ; 19) (TCF3-PBX1). L’avidité pour le méthotrexate étant plus faible pour ces blastes, de plus fortes doses ont amélioré en effet le pronostic de ces patients. Quant à la mercaptopurine, très toxique, la dose était diminuée en cas de déficit congénital enzymatique et ajustée ensuite sur le dosage régulier des nucléotides à thioguanine. Les auteurs soulignent que dans l’étude près de 90 % des sujets à risque de rechute du SNC, c’est-à-dire ayant une maladie résiduelle minimale › ou = 1 %, une LLA à cellules T ou la translocation t (1 ; 19) (TCF3-PBX1), auraient reçu une irradiation inutilement. De plus, alors que la localisation est un phénomène compétitif, l’irradiation favorise les rechutes systémiques, qui sont difficiles à traiter. Mieux vaut avoir à traiter une rechute du SNC, qui répond très bien au traitement en l’absence d’irradiation antérieure.
N Engl J Med, 360, 26, 2 730-41 ; 25 juin 2009.
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