Lymphome B

Quel bilan après une première année d'utilisation des CAR-T cells en France ?

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Publié le 17/12/2020

Depuis 2018, les CAR-T cells constituent une nouvelle option thérapeutique dans les lymphomes B agressifs en rechute. Des équipes de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), de l’Inserm et de l’Université de Paris ont fait un tout premier bilan de leur utilisation dans la vraie vie. Quels en sont les enseignements ?

Crédit photo : phanie

Les travaux réalisés par l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), l’Inserm et l’Université de Paris ont fait l'objet de trois publications dédiées à la survie et aux facteurs prédictifs de rechute, à la sécurité d'utilisation du G-CSF et aux effets secondaires neurotoxiques (1,2,3). Elles apportent des éléments de réponse précieux en pratique clinique…

67 % de survie à un an

L'analyse porte sur les 116 premiers patients traités (hors essais cliniques) pour lymphome B, entre juin 2018 et janvier 2020, dans cinq centres français du réseau LYSA (Lymphoma Study Association) par Tisa-cel (67 patients) ou Axi-cel (49 patients) et ayant eu au moins une réponse à un mois ou avant progression. Elle met en évidence une survie sans progression de 47 % à un an et une survie globale de 67 % à un an. Un résultat très démonstratif. Plusieurs facteurs associés aux rechutes précoces (dans le premier mois) ont par ailleurs été identifiés, au tout premier rang desquels le volume tumoral avant traitement et l'extension ganglionnaire (1).

Innocuité du G-CSF

Un second travail s'est penché sur l'impact éventuel de l'utilisation du G-CSG sur le traitement. Il tend à montrer que le recours au G-CSF n'empêche pas l'expansion des CAR-T cells, leur efficacité et réduit la durée d’hospitalisation (2).

Des toxicités neurologiques fréquentes et variées

Les neurologues de l’hôpital Saint Louis ont colligé les toxicités neurologiques observées chez 84 patients issus de plusieurs centres français (âge médian 59 ans (19-78 ans), 31 % de femmes). Cette analyse montre que ces complications surviennent en général vers J7, sont fréquentes (43 % des cas) et durent 6 jours (temps médian) [3]. Elles sont de grade 1-2 près de deux fois sur trois (64 %) et de grade 3-4 dans un tiers des cas. Les symptômes neurologiques sont dominés par les troubles cognitifs, sévères une fois sur trois (36 %) et une fois sur deux associés à des troubles du langage. Les seconds symptômes les plus fréquents sont les troubles moteurs non pyramidaux (mouvements anormaux) apparus chez 42 % des patients (11 % de troubles sévères), généralement discrets. À noter, une CRP élevée à J4 est un facteur prédictif de toxicité neurologique de grade 3-4.

Fort heureusement, la plupart de patients (87 %) ont récupéré dans les 2 mois. Quant à l'efficacité/utilité des corticoïdes et des antiépileptiques dans leur prise en charge, elle reste à prouver.

Pour sa part, le syndrome de relargage des cytokines a touché 80 % des patients. La moitié d'entre eux ont été traités par anti-IL6 (tocilizumab).

Selon les auteurs, « ce travail devrait permettre d’améliorer les échelles actuelles de graduation des effets secondaire. Ceci alors que, l’équipe poursuit l'étude des complications neurologiques à long terme avec une attention particulière à l’apparition éventuelle de séquelles cognitives » (4).

(1) Vercellino L et al. Predictive factors of early progression after CAR T-cell therapy in relapsed/refractory diffuse large B-cell lymphoma. Blood Adv 2020; 4: 5607–15
(2) Galli E et al. G-CSF does not worsen toxicities and efficacy of CAR-T cells in refractory/relapsed B-cell lymphoma. Bone Marrow Transplant 2020. https://doi.org/10.1038/s41409-020-01006-x
(3) Belin C et al. Description of neurotoxicity in a series of patients treated with CAR T-cell therapy. Sci Rep 2020;10, 18997. https://doi.org/10.1038/s41598-020-76055-9
(4) Communiqué de presse -HP:  Etude - L’hôpital Saint-Louis AP-HP publie les premiers résultats nationaux de l’immunothérapie cellulaire par CAR T-cells dans les lymphomes, 19 novembre 2020.

Pascale Solere

Source : lequotidiendumedecin.fr