Jusqu’ici, lorsqu’on suspectait un cancer de la prostate sur le dosage du PSA et/ou le toucher rectal, on pratiquait des biopsies de la prostate systématiques (une douzaine) sous contrôle échographique. Ces biopsies réalisées de façon non ciblée, exposaient à la fois au risque de méconnaître un cancer, mais aussi celui de détecter des cancers de très petite taille bien différenciés ne nécessitant pas pour la plupart de traitement. Il est bien établi maintenant qu’il n’y a pas un mais des cancers de la prostate, avec aussi bien des cancers volumineux peu différenciés qu’il est impératif de traiter, que des cancers bien différenciés peu évolutifs qui ne nécessitent qu’une surveillance active s’ils sont de petite taille. Or, ces petits foyers cancéreux sont très fréquents avec l’avancée en âge. Globalement, on en trouverait 30 % à 60 ans, 40 % à 70 ans. Ces chiffres considérables, même s’ils sont quelque peu surestimés, pourraient conduire à des surdiagnostics et à des surtraitements de cancers non menaçants.
La biopsie prostatique guidée
Ni l’échographie endorectale, ni le scanner, ne mettent en évidence les cancers de la prostate, en particulier au début, dans les premiers stades. Par contre, l’IRM s’est révélée particulièrement performante dans le diagnostic des cancers de la prostate. Elle était déjà omniprésente pour le bilan d’extension de la maladie, le choix de la stratégie thérapeutique et le suivi des patients. « L’IRM permet de mettre en évidence les tumeurs de la prostate, en particulier les formes peu différenciées et agressives qu’il est essentiel de ne pas méconnaître, explique le Pr Fournier. Mais elle montre moins bien les petits cancers bien différenciés qui évoluent lentement ». Des études ont comparé les images IRM des hommes qui devaient être opérés d’un cancer de la prostate aux pièces d’exérèse, ce qui n’a pu que confirmer la bonne corrélation entre l’IRM et les tumeurs de gravité 7 à 10 de Gleason. C’est à partir de ces données, qu’il a été choisi d’introduire désormais l’IRM très tôt, dès qu’il existe une suspicion de cancer.
Lorsqu’une tumeur est suspectée à l’IRM, on peut maintenant faire des biopsies ciblées, guidées par l’IRM. Soit de façon « classique », la biopsie sous échographie se basant sur les images IRM, soit en réalisant des biopsies ciblées par fusion d’images échographie/IRM qui améliore encore la précision. Des études ont comparé les biopsies faites « à l’aveugle » avec celles réalisées grâce à la fusion logicielle et les résultats sont sans appel : cette technique permet de repérer plus de tumeurs, donc de limiter les faux négatifs, et surtout de mettre en évidence les cancers plus agressifs (stade 7 à 10 de Gleason).
Actuellement, tous les centres ne sont pas équipés de logiciels de fusion d’imagerie, technique assez coûteuse et plus chronophage, et on attend que l’Assurance-maladie établisse une cotation particulière pour la biopsie ciblée par fusion d’image. Certains centres la pratiquent sous IRM, ce qui est exceptionnel car leur réalisation est très contraignante.
Interprétation en fonction du contexte
Idéalement, si l’IRM est normale, on peut être relativement rassuré et on pourrait se passer de biopsie. Toutefois, dans un petit nombre de cas, l’IRM peut être prise en défaut et on ne peut affirmer l'absence de cancer. Dans cette situation, si la clinique et la biologie sont évocatrices, on réalisera quand même des biopsies. Dans la majorité des cas, les tumeurs que l’IRM ne montre pas sont des Gleason 6 de petite taille bien différenciées, mais quelques exceptions incitent toutefois à la prudence. « Actuellement on ne peut pas systématiquement récuser la biopsie sur la seule normalité de l’IRM, conclut l’urologue. Aussi, lorsqu’un médecin généraliste demande une IRM et qu’elle est normale, on ne peut que lui recommander de demander l’avis d’un urologue, qui choisira la suite à donner en fonction de l’histoire du patient ».
On recherche actuellement des biomarqueurs sanguins ou urinaires qui permettraient de caractériser les tumeurs que l’IRM ne dépiste pas et de diminuer le nombre de biopsies avec plus de certitudes.
D’après un entretien avec le Pr Georges FOURNIER, urologue au CHU de Brest et président de l’AFU
Recommandations françaises du Comité de Cancérologie de l’AFU – Actualisation 2018–2020 : cancer de la prostate, Prog Urol, 2018, 12, 28, S79, suppl. 12S https://www.urofrance.org/base-bibliographique/recommandations-francais…
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