Le Dr Claude Eugène vous propose de tester vos connaissances sur le carcinome hépatocellulaire (CHC). La définition, l’épidémiologie, l’étiologie, le dépistage et le diagnostic du CHC ont été envisagés dans un article précédent, le traitement est abordé maintenant. Parmi les assertions suivantes, une seule est fausse. La réponse est à la fin de l’article.
Classifications
1) Un « staging » précis du CHC doit précéder la discussion thérapeutique multidisciplinaire.
1.1) Les résultats du staging aident à établir le pronostic et le choix thérapeutique.
1.2) Plusieurs classifications ont été proposées. L’une des plus utilisées (dans sa forme originale ou après adaptation) est celle de l’équipe de Barcelone dite BCLC (Barcelona-Clinic Liver Cancer). Elle tient compte des items suivants :
- stade de la tumeur,
- bilan fonctionnel hépatique,
- état général du malade.
1.3) Le score de Child-Pugh est également utilisé (encadré 1).
Cinq stades
2) Finalement, on peut individualiser 5 stades pour lesquels les propositions thérapeutiques et le pronostic sont différents : stade très précoce, précoce, intermédiaire, avancé et terminal (1).
2.1) Stade très précoce.
2.1.1) Il s’agit de tumeurs de moins de 2 cm.
2.1.2) Le malade doit être au stade A de Child-Pugh. Il est asymptomatique. Il n’y a pas d’invasion vasculaire (veine porte).
2.1.3) La résection chirurgicale et la destruction par radiofréquence (éventuellement par voie percutanée) donnent des survies similaires à cinq ans. Le choix dépendra du siège de la tumeur, de l’existence d’une hypertension portale et de possibles comorbidités.
2.2) Stade précoce.
2.2.1) Il s’agit d’une tumeur unique ou au plus de 3 tumeurs mesurant au maximum 3 cm.
2.2.2) Le malade est au stade A ou B de Child-Pugh. Les alternatives thérapeutiques sont :
- résection,
- transplantation hépatique,
- destruction percutanée.
2.2.3) La survie à cinq ans peut atteindre 75 %.
2.3) Stade intermédiaire.
2.3.1) Il s’agit de patients qui sont au-delà des stades précédents (très précoce et précoce, cf. ci-dessus) mais qui ont une cirrhose compensée et qui sont porteurs d’un CHC asymptomatique et sans envahissement vasculaire.
2.3.2) Ces malades peuvent bénéficier une chimio-embolisation par voie artérielle. Celle-ci augmente la survie à deux ans d’environ 20 % par rapport à un traitement conservateur.
2.4) Stade avancé.
2.4.1) Il s’agit de malades ayant un CHC symptomatique, un envahissement vasculaire ou des lésions extra-hépatiques.
2.4.2) Chez ces malades, il a été récemment montré qu’une thérapie ciblée, administrée per os augmentait la survie par rapport au placebo. Il s’agit du sorafenib (Nexavar) qui est un inhibiteur de récepteurs aux facteurs de croissance vasculaires et aux facteurs de croissance hépatocytaire (3).
2.5) Stade terminal.
La survie à un an est inférieure à 10 %. Le traitement doit être symptomatique.
Résultats
3) Les résultats du traitement du CHCont progressé, en partie grâce au dépistage systématique qui permet de traiter des tumeurs moins évoluées.
3.1) Traitements à visée curative.
3.1.1) En Europe, un traitement à visée curative (transplantation, résection, ablation percutanée) est possible dans 25 % à 40 % des cas ( versus moins de 10 % en Afrique).
3.1.2) On ne dispose pas d’étude contrôlée de qualité comparant ces trois méthodes à visée curative.
3.2) Résection chirurgicale.
3.2.1) La mortalité opératoire est actuellement < 10 % voire < 3 % et la survie à cinq ans › 50 %.
3.2.2) Les récidives sur le foie restant sont très fréquentes (environ 70 % à cinq ans).
3.3) Transplantation hépatique.
3.3.1) Si l’on applique pour la sélection des cas les critères classiques (de Milan) : tumeur unique < 5 cm ou 2 à 3 tumeurs < 3 cm, la survie à 5 ans est d’environ 70 % et la récidive plus rare qu’après résection chirurgicale.
3.3.2) Cependant, une tendance à l’utilisation de critères plus larges (de San Francisco) se fait jour, avec comme corollaire le risque d’un taux de récidive plus élevé et d’une survie à cinq ans plus faible.
3.4) Traitements percutanés.
3.4.1) Les résultats des traitement percutanés sont fonction de la taille de la tumeur. On observe globalement des survies à 5 ans de 40 % à 50 %.
3.4.2) lLe traitement par voie percutanée est très efficace sur les tumeurs < 3 cm. Une destruction complète s’observe dans environ 60 % des cas.
3.4.3) Le traitement par radiofréquence est plus efficace que l’injection d’alcool, surtout pour les nodules › 2 cm. Il a ainsi été montré que le traitement par radiofréquence permettait d’obtenir une survie à trois ans supérieure à celle de l’injection d’alcool.
3.5) Chimio-embolisation.
3.5.1) Deux études contrôlées et une méta-analyse ont finalement montré que le traitement palliatif par chimio-embolisation (jusque là controversé) augmentait la survie. C’est actuellement la technique palliative la plus efficace. Les survies à un, deux et trois ans ont été montrées supérieures à 50 %, 30 % et 25 % (et supérieures au traitement de confort).
3.5.2) Cette technique peut aussi être utilisée comme traitement d’attente ou de down-staging avant transplantation ou chirurgie.
Réponse
L’assertion 3.4.2) est inexacte. En effet, le traitement par voie percutanée est très efficace sur les tumeurs < 3 cm et une destruction complète s’observe dans environ 90 % des cas et pas dans 60 % des cas.
Pour en savoir plus
1) H.B. El-Serag et al. Diagnosis and treatment of hepatocellular carcinoma. Gastroenterology 2008 ; 134 : 1752-1763.
2) J. Bruix, M. Sherman. Management of hepatocellular carcinoma. Hepatology 2005 ; 42 : 1208-1236.
3) J.M. Llovet et al. Sorafenib in advanced hepatocellular carcinoma. New Engl J Med 2008 ; 359 : 378-390.
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