Une équipe de chercheurs INSERM/CNRS dirigée par Marc Poirot et Sandrine Silvente-Poirot a découvert une nouvelle molécule issue d’une voie métabolique du cholestérol, la dendrogénine A (DDA), capable de reprogrammer les cellules cancéreuses vers un phénotype proche de la normale et de protéger les cellules normales des dysrégulations oncogéniques. Dans « Nature Communication », ils apportent la preuve expérimentale de propriétés anticancéreuses. Dans un an ou deux, elle sera testée au cours d’un premier essai clinique dans la leucémie myéloïde aiguë.
« Cette substance a été découverte par notre équipe, elle n’était pas connue jusqu’alors. Elle constitue une nouvelle classe de cellules naturelles qui apparaissent dans les tissus normaux mais pas dans les tissus tumoraux. Une cellule cancéreuse abandonne ses propriétés normales – sécrétoires par exemple, au profit d’une division anarchique. La dendrogénine A est capable d’induire une reprogrammation de ces cellules vers un état proche de la normale », explique Marc Poirot. « La DDA est présente dans de nombreux tissus humains, reprend le chercheur, elle a un rôle protecteur vis-à-vis des cellules normales en les protégeant des dysrégulations oncogéniques par une activation du système immunitaire. »
La DDA est issue de la rencontre de plusieurs voies métaboliques, celle de dérivés du cholestérol et de l’histamine, dont la transformation enzymatique aboutit dans l’organisme à la DDA (voir schéma). Par quelle enzyme ? « Son nom n’est pas encore dévoilé, nous avons d’autres publications en cours sur ce sujet », promet le chercheur. Grâce à des techniques de criblage et de synthèse chimique, les chercheurs ont pu produire en laboratoire cette molécule. Dans une situation de xénogreffe, c’est-à-dire de greffe de tumeur humaine à une souris, l’administration DDA entraîne une mobilisation du système immunitaire dans la tumeur à des concentrations très faibles, contrôle la prolifération tumorale et améliore la survie.
La DDA est-elle un marqueur de cancer ?
« Oui mais ce n’est pas si simple, explique Marc Poirot, et les autres molécules qui appartiennent à cette nouvelle classe baissent également en cas de cancer. On pense qu’il serait plus exact de doser un ratio entre, d’une part, la DDA et les molécules parentes, et d’autre part, un dérivé qui se situe en amont de la voie métabolique et qui apparaît comme promoteur de la différenciation tumorale. Mais nous n’avons pas encore publié sur ce dérivé. »
En fait, le marqueur ne serait pas uniquement le cholestérol, que l’on a principalement associé aux tumeurs hormonodépendantes, en particulier les tumeurs de la prostate, mais tout ce qui concerne sa transformation et les gènes impliqués dans cette transformation. « Notre objectif est d’établir un tableau complet de cette voie métabolique, notamment de déterminer tous les époxydes du cholestérol », explique Marc Poirot.
Perspectives thérapeutiques
« Nous avons accumulé beaucoup de preuves de concept sur la DDA, poursuit Marc Poirot. C’est une molécule stable qui peut être fabriquée industriellement ; elle est d’ailleurs en cours de développement industriel. Nous sommes à un ou deux ans des premiers vrais essais cliniques. La première application sera la leucémie myéloïde aiguë. »
Pourquoi la LMA, puisque ce n’est pas un cancer hormonodépendant ? Par analogie avec les essais menés avec la vitamine A dans la LMA, vitamine A ou acide transrétinoïque dont les propriétés se rapprochent de celles de la DDA.
D’après un entretien avec Marc Poirot (unité Inserm 1037, Centre de recherche en cancérologie de Toulouse (Inserm/CNRS Université Toulouse III-Paul Sabatier).
Dendrogenin A arises from cholesterol and histamne metabolism and shows cell differenciation and anti-tumour properties. P de Medina et coll. Nature Communications 2013.
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