L'équipe du centre d'investigation clinique et de cardio-oncologie de l'hôpital Pitié Salpêtrière (AP-HP) coordonnée par le Pr Joe-Élie Salem a récemment publié deux études clés dans le développement d'outils prédictifs du risque de myocardite chez les patients traités par inhibiteurs de checkpoints (ou inhibiteurs de points de contrôle immunitaire).
La prise de ces traitements, efficaces pour activer les cellules immunitaires dirigées contre les cellules tumorales, peut être associée à une hyperactivité du système immunitaire contre les cellules musculaires cardiaques. Cette cardiotoxicité est observée chez moins de 1 % des patients, et les médecins manquent d'outils pour prévoir leur survenue et leur évolution.
Dans un premier article publié dans Circulation, les chercheurs parisiens ont étudié pendant un an la cinétique de plusieurs marqueurs cardiomusculaires - la troponine-T, la troponine-I et la créatine kinase (CK) - chez 60 patients souffrant de myocardites induites par inhibiteur de checkpoint dans deux unités de cardio-oncologie (hôpitaux de la Pitié Salpêtrière AP-HP et universitaire d'Heidelberg en Allemagne).
L'objectif était de prédire la survenue un événement cardiomyotoxique indésirable majeur (Mace), comme une insuffisance cardiaque, une arythmie ventriculaire, un bloc majeur de la conduction auriculo-ventriculaire ou d'une insuffisance des muscles respiratoires. Au total, 1 751 échantillons de troponine-T, 920 échantillons de troponine-I et 1 191 échantillons de CK ont été prélevés.
Les auteurs ont constaté, chez les quelque 40 % de patients ayant souffert d'un Mace dans les 72 heures suivant leur admission, les niveaux de troponine-T étaient systématiquement plus élevés. Cela n'était pas le cas pour les deux autres marqueurs (troponine-I augmentée chez environ 3/4 des patients). La troponine-T se révèle ainsi plus sensible que la troponine-I et les CK pour le diagnostic et la surveillance des patients atteints de myocardite après traitement par inhibiteurs de checkpoint. Selon leurs calculs, un taux de troponine-T plus de 32 fois supérieur à la norme permet de déterminer un sous-groupe de patient à très haut risque de Mace.
Le rôle des altérations du thymus
L'équipe de recherche a complété ses investigations en s'intéressant au rôle du thymus dans le développement des myocardites liées aux immunothérapies. Fin octobre, ils ont publié de nouvelles données dans la revue Nature Medicine démontrant le rôle prépondérant de cet organe dans la pathogénicité.
Depuis quelques années, les chercheurs ont en effet constaté que les jeunes patients atteints de thymome et traités par inhibiteurs de checkpoint, présentaient un important surrisque de myocardite fulminante, de myosite périphérique et de syndrome myasthéniforme requérant un support ventilatoire dans les jours suivant le début du traitement. Cette première observation a été confirmée par une revue de la littérature et surtout le registre international des myocardites ICI (pour inhibiteur de point de contrôle immunitaire).
Toutes ces données convergent vers la même conclusion : les myocardites liées aux inhibiteurs de checkpoint qui surviennent chez les patients traités pour une tumeur cancéreuse du thymus sont à la fois plus fréquentes, plus sévères et plus précoces que celles qui surviennent chez les patients traités pour d'autres cancers. Les auteurs attribuent ce lien statistique à une perturbation d'une des fonctions clés du thymus : la sélection des lymphocytes T autoréactifs. Les altérations thymiques étant identifiables par scanner thoracique et la production d'auto-anticorps contre l'acétylcholine, un bilan clinico-radio-biologique évaluant le thymus pourrait aider à prédire les myotoxicités ICI.
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