À quelques jours de la journée internationale contre le cancer, l’Institut Curie a souhaité communiquer sur ses travaux menés sur les cancers rares. Sarcome, mélanome uvéal, cancers hématologiques rares, ces tumeurs sont caractérisées par une incidence annuelle inférieure à 6 cas pour 100 000 personnes mais représentent tout de même 22 % de l'ensemble des cancers, soit environ 70 000 cas chaque année en France. « Même si ces cancers sont individuellement rares, ils sont globalement fréquents », nuance ainsi le Pr Alain Puisieux, directeur du centre de recherche.
« Ce sont des cancers difficiles à soigner, qui demandent de la spécialisation », précise le Pr Thierry Philip, président du directoire de l’Institut Curie, qui se réjouit néanmoins des progrès effectués ces dernières années, notamment au sein de l’Institut qui a la particularité de mêler l’aspect recherche à celui de la clinique. Ce centre de lutte contre le cancer, fondé en 1909 par Marie Curie, associe en effet un centre de recherche et un ensemble hospitalier qui prend en charge les cancers, notamment les plus rares.
Pour continuer dans cette lancée positive, « il faut justement miser sur la recherche, dit-il. Mais on sait à quel point elle se porte mal aujourd’hui en France. Mauvais salaire, problème d’attractivité… Il y a un enjeu fondamental à valoriser les métiers scientifiques et à donner des moyens à nos chercheurs. »
Des symptômes variés, rendant les diagnostics difficiles
En plus d’être rares, ces cancers présentent une grande diversité. Ainsi, il existe plus d’une centaine de sarcomes connus, plus de 70 types de lymphomes différents… « ce qui entraîne forcément des difficultés de diagnostic et un sentiment de solitude chez les patients qui sont dans l’inconnu », ajoute le Pr Thierry Philip.
Les sarcomes, par exemple, sont des cancers qui se développent à partir des tissus de soutien, présents partout dans le corps. Ils correspondent à moins de 2 % des cancers de l’adulte et environ 10 % chez l’enfant. « Ils ont une présentation clinique très variée et sont difficiles à détecter. Une masse qui se développe localement est souvent mal identifiée, on peut d’abord penser à un hématome », décrit la Dr Sarah Watson, oncologue médicale et chercheuse à l’institut Curie, ajoutant qu’il existe entre 30 et 40 % d’erreurs de diagnostic pour ces cancers. Elle insiste sur l’importance d’adresser, en cas de suspicion de sarcome, le patient dans un centre expert dédié du réseau Netsarc +. D’autant plus qu’une simple biopsie percutanée des tumeurs péritonéales permet de préciser le diagnostic dans 98 % des cas, selon une étude de l’Institut, publiée en novembre dernier. Et, un centre expert permet, lorsque cela est nécessaire, que les chirurgies soient réalisées par des chirurgiens expérimentés, améliorant ainsi le pronostic du patient.
De plus, près de 2 à 3% des cas de cancers (environ 7000 patients par an en France) sont d’origine inconnue, lorsque des métastases sont découvertes sans que le premier organe touché ne soit identifié. Depuis 2019, une méthode mise au point par l’équipe de la Dr Sarah Watson aide à identifier l’origine de certains d’entre eux. Il s’agit d’un modèle d’IA qui peut apparenter un profil ARN à certains tissus et/ou organes, cancéreux ou non.
De l’importance des réseaux
Le Pr Steven le Gouill, directeur de l’ensemble hospitalier de l’Institut Curie, affirme : « Un cancer rare n’est pas toujours méconnu. Mais c’est souvent un diagnostic qu’on ne comprend pas. Il arrive que des médecins se sentent en difficulté face à ces cas de cancers. À l’institut Curie, nous avons cette expertise ». Le Dr Manuel Rodrigues, oncologue médical et chercheur à l’Institut Curie, précise l’intérêt de se tourner vers un centre expert : « Les médecins voient un ou deux patients avec un cancer rare par carrière quand un oncologue spécialisé en voit plusieurs par jour, ce qui favorise les diagnostics. »
Le spécialiste insiste sur l’importance des réseaux nationaux et internationaux afin de bénéficier des dernières alternatives thérapeutiques. Pour optimiser la prise en charge des patients, des réseaux de référence pour cancers rares de l’adulte ont été mis en place. L’Institut Curie fait partie d’un certain nombre d’entre eux. En France, 17 réseaux ont été labellisés par l’Institut national du cancer (Inca). Il existe également quatre réseaux européens de référence. Le Pr Steven le Gouill ajoute : « Il s’agit également de mutualiser les patients, peu nombreux [ce qui freine les essais cliniques], et les échantillons. D’autre part, même si ces cancers semblent être une niche économique, ce n’est pas le cas ». En effet, les recherches menées dans le cadre des cancers rares bénéficient bien souvent aux autres branches de la médecine.
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