Le cancer de l’estomac ou de la jonction gastro-œsophagienne représente le cinquième cancer le plus diagnostiqué et la quatrième cause de décès par cancer dans le monde, une position qui stagne. Le pronostic en cas de diagnostic à un stade avancé (localement avancé ou déjà métastatique) reste relativement mauvais, avec une survie globale d’environ un an seulement.
Cependant, depuis quelques années, face à un cancer de l’estomac avancé non résécable, la prise en charge (auparavant limitée à la chimiothérapie) a été bouleversée par les inhibiteurs de checkpoints immunitaires.
Une voie ouverte par le nivolumab…
Ainsi pour mémoire, le nivolumab (anti-PD1), évalué en 2021 dans l’essai de phase 3 Checkmate-649 en première ligne, en association à une chimiothérapie par Xelox ou Folfox, versus chimiothérapie seule, chez 1 500 patients atteints de cancer gastrique ou de la jonction gastro-œsophagienne ou d’adénocarcinome œsophagien avancé ou métastatique non résécable, avait permis une amélioration significative de la survie globale et de la survie sans progression d’environ 70 %, soit environ deux mois (1). Ce bénéfice semblait plus important pour les patients présentant un certain niveau d’expression du ligand de PD1 (PDL1), caractérisé par un score CPS (score combiné positif) supérieur à 5 — avancé comme un biomarqueur potentiel de la réponse aux inhibiteurs de checkpoints. Au contraire, pour les autres, le bénéfice apparaissait moindre, voire quasi inexistant. Face à ces résultats, le nivolumab avait reçu une AMM Européenne pour les tumeurs avec un CPS ≥ 5, et la Haute autorité de Santé s’était prononcée en faveur d’un remboursement du médicament « en association à une chimiothérapie à base de fluoropyrimidine et de sels de platine, en première ligne de traitement, dans le traitement des patients adultes atteints d’un adénocarcinome gastrique, de la jonction œsogastrique ou de l’œsophage avancé ou métastatique, HER-2 négatif, dont les tumeurs expriment PDL1 avec un score positif combiné (Combined Positive Score : CPS) ≥ 5 ».
… l’apport du sintilimab
Fin 2023, un anti-PD1 avait émergé : le sintilimab, présentant théoriquement une meilleure affinité pour le PD1 que le nivolumab. Dans un essai de phase 3 conduit chez 650 patients atteints de cancer gastrique, ou de la jonction gastro-œsophagienne, avancé, ou métastatique, déjà exposés ou non à une première chimiothérapie ou une radiothérapie, ce médicament avait lui aussi été associée à une meilleure survie que la chimiothérapie seule. Cette fois, la survie globale était augmentée d’environ trois mois par rapport à la chimiothérapie seule, et même de 5,5 mois (18,4 vs 12,9 mois) chez les patients manifestant un CPS supérieur à 5 (2).
Une nouvelle voie ouverte ?
En février 2025, une équipe chinoise a publié ses résultats avec un inhibiteur de checkpoint immunitaire d’un autre type : un inhibiteur de PDL1, le sugemalimab (3).
Ce médicament, associé à la chimiothérapie Capox, a été comparé à cette chimiothérapie seule. 479 patients présentant tous un CPS supérieur à 5 ont été recrutés.
Résultat : selon les auteurs, l’essai « est le premier à démontrer un effet statistiquement significatif en termes de survie de l’addition d’un anti-PDL1 à la chimiothérapie standard pour l’adénocarcinome gastrique ou de la jonction gastro-œsophagienne (localement avancé ou métastatique). »
Dans le groupe interventionnel, la survie atteignait 15,6 mois, contre 12,6 mois dans le bras témoin : HR = 0,75. Et la survie sans progression atteignait 7,6 vs 6,1 mois : HR = 0,66. Le tout, pour un profil de sécurité similaire : un peu plus de 50 % d’effets indésirables de grade 3 dans les deux bras de l’essai.
Cependant, on peut s’interroger sur les conséquences de ces résultats sur la pratique clinique. Si selon cette étude, l’adjonction de l’anti-PDL1 à la chimiothérapie fait mieux que la chimiothérapie seule, cette association n’a pas été comparée à celle avec anti-PD1, déjà adoptée comme standard de traitement. De fait, au regard de la littérature disponible, l’adjonction de l’anti-PDL1 à la chimiothérapie ne semble pas associée à un gain de survie plus élevé que les anti-PD1 déjà testés.
(1) Yelena Y Janjigian, et al. First-line nivolumab plus chemotherapy versus chemotherapy alone for advanced gastric, gastro-oesophageal junction, and oesophageal adenocarcinoma (CheckMate-649) : a randomised, open-label, phase 3 trial. The Lancet. 2021(398)10294:27-40
(2) Jianming Xu et al. Sintilimab plus chemotherapy for unresecable gastric or gastroesophageal junction cancer, the ORIENT-16 randomized clinical trial. JAMA. 2023;330(21):2064-74
(3) Xiaotian Zhang et al. First-line sugemalimab plus chemotherapy for advanced gastric cancer, the Gemstone-303 randomized clinical trial. Jama. Published online first in February 24, 2025
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