Lors de la dernière édition de l’ASCO au mois de juin, les anticorps conjugués, notamment le trastuzumab deruxtecan (TDX-D), avaient montré leur bénéfice dans le cancer du sein (CS) métastatique chez les patientes exprimant faiblement HER2 (HER2 low), population encore peu explorée. En ce début décembre au San Antonio Breast Cancer Symposium (SABCS), de nouvelles preuves d’efficacité apparaissent, pour plusieurs anticorps conjugués et dans différents types de populations…
Patientes HER2 positives : moins 36 % de risque de décès sous TDX-D
Disponible dans le cadre d’un accès précoce, le TDX-D (Enhertu) est un anticorps monoclonal anti-HER2, conjugué à un inhibiteur de la topoisomérase I. Il est déjà indiqué chez les patientes atteintes d’un CS HER2-positif (15 à 20 % des CS), non résécable ou métastatique, ayant reçu au préalable une ligne de traitement anti-HER2. Dans cette population, il a été comparé au trastuzumab emtansine (T-DM1), dans l’étude de phase III DESTINY-Breast 03 menée sur 524 patientes (1). L’analyse actualisée, présentée au SABCS, met en évidence une réduction de 36 % du risque de décès (HR = 0,64 ; p < 0,0037). Dans les deux bras, la survie globale (SG) n’était pas atteinte après un suivi médian de 28,4 mois pour TDX-D et 26,5 mois sous T-DM1. À 24 mois, la SG s’élève respectivement à 77,4 % versus 69,9 %. De plus, le bénéfice en termes de survie sans progression (SSP, critère principal) se confirme, avec une amélioration de 22 mois (28,8 vs 6,8 mois, HR = 0,33, p < 0,000001). Quant au taux de réponse objective (RO), il est lui aussi significativement augmenté sous TDX-D (78,5 % vs 35 %, p < 0,0001). « Ces résultats actualisés soutiennent l’utilisation en seconde ligne du TDX-D, par rapport au T-DM1, en démontrant une amélioration de la SG et de la SSP, chez des patientes atteintes d’un CS métastatique HER2 positif, prétraité par anti-HER2 », souligne le Pr Javier Cortès (Barcelone).
D’autre part, l’étude DESTINY-Breast02, qui comparait le TDX-D à la chimiothérapie (trastuzumab/capecitabine ou lapatinib/capecitabine), a également mis en évidence une amélioration de la SSP et de la SG chez des patientes HER2 positives, non résécables ou métastatiques, préalablement traitées par T-DM1. Ainsi, le risque de progression était réduit de 64 % (SSP : 17,8 versus 6,9 mois, HR = 0,36 ; p < 0,000001) et le risque de décès de 34 % (SG : 39,2 versus 26,5 mois HR = 0,66 ; p = 0,0021).
Tumeurs HER2 low ou négatives : un nouveau candidat prometteur
Si le TDX-D et le sacituzumab govitecan (anticorps anti-Trop-2 conjugué à un inhibiteur de la topoisomérase I) ont déjà démontré au congrès de l’ASCO leur bénéfice dans les CS exprimant faiblement HER2, un nouvel anticorps conjugué s’annonce également prometteur. Dans l’essai de phase I TROPION-PanTumor01 (2), le datopotamab deruxtecan (Dato-DXd, anticorps anti-Trop-2 couplé au deruxtecan) montre de premiers résultats encourageants, chez 41 patientes atteintes d’un CS métastatique (ou non opérable) hormonodépendant (RH+), HER2 low ou négatif (HER2-). Le taux de contrôle de la maladie atteint 85 % et la SSP 8,3 mois. Après un suivi de 13,7 mois, la durée médiane de réponse et la SG n’étaient toujours pas atteintes. Au total, 59 % des patientes étaient en vie à plus d’un an.
Dans la cohorte de CS triple négatifs (CSTN, hormonorésistant et HER2-) de TROPION-PanTumor01 (n = 44), un taux de RO de 32 % a été mis en évidence sous Dato-DXd (dont 13 réponses partielles et une complète). La SSP atteint 4,4 mois et la SG 13,5 mois (3). Dans le sous-groupe non prétraité par T-DM1, le taux de RO s’élève à 44 %, la SSP et la SG à 7,3 et 14,3 mois. Mais cet anticorps conjugué pourrait aussi se révéler intéressant en association au durvalumab. Selon les résultats actualisés de l’étude de phase Ib/II BEGONIA (n = 61), cette combinaison permet d’obtenir un taux de RO de 73,6 % chez des patientes non prétraitées, ayant un CSTN non résécable, localement avancé ou métastatique (4).
Enfin, suite à l’étude de phase III TROPiCS-02 présentée au congrès de l’ASCO, une analyse post-hoc de l’efficacité du sacituzumab govitecan (Trodelvy) a été réalisée en fonction de l’expression de Trop-2 (5). Elle confirme le bénéfice de l’anticorps conjugué par rapport à la chimiothérapie, en termes de SSP et de SG, dans les CS RH+/HER2- quel que soit le niveau d’expression de Trop-2. Néanmoins, en France, le sacituzumab govitecan n’est actuellement disponible que dans les CSTN, dans le cadre d’un accès précoce.
(1) Hurvitz S A et al. Lancet. 2022 Dec 6;S0140-6736(22)02420-5
(2) SABCS, abstract #PD13-08
(3) SABCS, abstract #P6-10-03
(4) SABCS, abstract #PD11-09
(5) SABCS, abstract #GS1-11
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