« Le patient présentait des signes d'hypoperfusion avec vasoconstriction cutanée intense, sueurs, froideurs des extrémités. Son état de conscience était altéré avec une symptomatologie initiale de douleur thoracique brutale », se souvient le Dr Vincent Liu-Bousquel, anesthésiste-réanimateur au CHU de Lille. Le 26 août dernier, alors qu'il était sur le vol d’Air France Séoul-Paris, le spécialiste a dû faire face à une urgence médicale. Plus d’un tiers du trajet s’est déjà écoulé lorsqu’il est sollicité : un passager d’une cinquantaine d’années est au plus mal. C’est le branle-bas de combat pour le personnel de cabine et le médecin.
L'urgence du bon diagnostic
Son diagnostic d’infarctus du myocarde est très vite conforté par des documents médicaux transmis par la femme du patient. Ce dernier avait subi une angioplastie coronarienne 45 jours avant le vol. Le médecin n'en est pas à son coup d’essai pour ce qui est des soins prodigués en plein ciel. C’est sa deuxième intervention aérienne de l'année. Quelques mois plus tôt, au cours d’un vol de la même compagnie, le jeune spécialiste de 34 ans était déjà intervenu pour la prise en charge d'un AVC.
Membre de la communauté des « docteurs à bord »
Depuis lors, Vincent Liu-Bousquel n’est plus un passager lambda. Après sa première expérience de sauvetage, le médecin voyageur a accepté d’intégrer le programme Community of doctors on board mis en place par la compagnie aérienne française. Une initiative qui permet au personnel de cabine d’identifier très rapidement, les professionnels de santé embarqués.
Des conditions perfectibles de prise en charge
Pour cette deuxième intervention, le Dr Liu-Bousquel souligne la diligence exemplaire des stewards et hôtesses de l'air. À ce moment-là, le contenu de la trousse médicale d’urgence est étalé à la hâte. Il convient d'agir vite avec les moyens à bord. Mais lorsque l'anesthésiste demande un pansement et qu'on lui tend du mercurochrome en retour, il réalise que – tétanisée ou pas suffisamment formée - l'assistance escomptée restera fort modeste. « Je ne trouvais pas le stéthoscope et difficilement le Natispray dont deux bouffées sublinguales ont permis une régression de la symptomatologie douloureuse. Et j'ai vite compris que la mise en place de la voie veineuse périphérique n'allait pas être simple ».
Le praticien sécurise aussitôt la voie veineuse périphérique volémique avec du scotch. Mais l'absence de robinet sur la voie de perfusion rend l'intervention acrobatique. Il faut systématiquement faire et défaire le pansement de fortune pour déconnecter le remplissage, injecter la thérapeutique et remettre le tout en place. « Je n'ai trouvé que de l'adrénaline comme vasopresseur inutilisable dans ce contexte sauf en cas de force majeure en raison de son caractère arythmogène » précise-t-il. Au final le patient sera sauvé.
Des axes possibles d'amélioration
Un retour d’expérience que l'anesthésiste-réanimateur aimerait faire valoir dans le but d'améliorer le dispositif en place. Ses propositions concerneraient entre autres « la mise à disposition sur les vols long-courriers de moyens diagnostiques (ECG portatifs) et des thérapeutiques d'exception (Altéplase) à utiliser uniquement sur quasi-certitude diagnostique et impossibilité d'alternative… Sans oublier la formation d'un responsable médical familier du lexique et matériel de base pour une aide efficace. Mais la simple mise en place de tubulure avec robinet serait déjà un grand pas… ». Gageons que le rendez-vous prévu la semaine du 18 septembre avec le Dr Vincent Feuillie, médecin – conseil d'Air France sera l'occasion de développer.
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