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Dossier

Allergies aux pollens

Non à la fatalité

Publié le 04/05/2015
Non à la fatalité

De janvier à septembre, différents pollens se succèdent en fonction des régions
PHANIE

Transportés par le vent, les pollens anémophiles petits, nombreux et très allergisants pénètrent loin dans l’arbre respiratoire. La pollution les fait éclater, libère leurs protéines et est cofacteur de gravité. Les 1ers à virevolter sont ceux de cyprès (janvier), frêne et bouleau (février-avril) puis ceux de graminées (printemps et été) puis des mauvaises herbes, armoise et ambroisie (fin d’été). Le site du RNSA www.pollens.fr donne chaque semaine le niveau d’exposition aux pollens dans diverses villes de France.

L’éviction est la clé

Le traitement symptomatique soulage de façon ponctuelle. Pour espérer soulager durablement, il faut un diagnostic précis. Lui seul permet de donner des conseils d’évictions adaptés. « Chaque allergique a un seuil de tolérance de l’allergène au-delà duquel les symptômes se déclenchent. Arriver à maîtriser l’environnement pour n’être exposé qu’à des seuils inférieurs à ceux de déclenchement améliore le confort des patients et peut permettre de diminuer ou arrêter le traitement symptomatique. Le problème est que parfois le patient croit identifier une allergie saisonnière aux pollens mais présente en réalité une allergie per-annuelle aux animaux, acariens ou aux moisissures. La rhinite lui semble banale en hiver, il ne s’en plaint que l’été et incrimine alors le pollen. Si l’allergie aux pollens est saisonnière, d’autres allergies peuvent aussi avoir un rythme saisonnier : gêne estivale pour les moisissures, amélioration en vacances dans l’allergie professionnelle, exacerbation à l’automne pour les allergiques aux acariens mais aussi dans la maison de campagne mal aérée l’été ! », rappelle le Dr Laurence Lepeltier.

L’allergologue a toute sa place dans le bilan diagnostic. L’interrogatoire précise les antécédents d’atopie et tente d’identifier l’allergène en s’appuyant sur les périodes de gêne, l’environnement, la chronologie des symptômes et les facteurs déclenchants. « Le bilan allergologique est intéressant pour motiver le patient pour une éviction efficace et si besoin la mise en place d’une désensibilisation si l’éviction est insuffisante. La réalisation des prick-tests pour voir, sans suivi ultérieur est stérile », note le Dr Lepeltier. Quantifier la gêne assure de suivre l’évolution : score PAREO pour la rhinite (prurit, anosmie, rhinorrhée, éternuement, obstruction), PLOR pour la conjonctivite (prurit, larmoiement, œdème conjonctival, rougeur), score GINA du contrôle de l’asthme.

Désensibiliser peut être nécessaire

La désensibilisation sublinguale (gouttes sous la langue le matin à jeun) élève le seuil de tolérance. Elle est utile si le patient reste gêné et doit poursuivre le traitement symptomatique malgré une bonne éviction. « Plus il est gêné, plus elle sera efficace, explique le Dr Lepeltier. En cas d’asthme, le VEMS doit cependant être supérieur à 70-80 %. »

Pour les pollens, le protocole de traitement est pré et co-saisonnier : 4 mois avant la saison du pollen jusqu’à la fin de sa saison. Pour les acariens, moisissures, animaux, la désensibilisation est continue. Le soulagement est progressif. Le traitement poursuivi 3 à 5 ans renforce la tolérance.

À part, le syndrome oral ou syndrome de Lessof (souvent bénin) est une conséquence alimentaire d’une sensibilisation respiratoire : par exemple à cause de la protéine BetV1 du pollen du bouleau également présente dans des fruits à noyaux crus : croquer dans une pomme déclenche une réaction locale (10 minutes) avant que BetV1 soit détruite par les enzymes salivaires.

Retenons avec le Dr Lepeltier que « face à l’allergie, il existe des solutions pour soulager les patients : poser le bon diagnostic permet de mener une politique d’éviction efficace. Si procéder à une désensibilisation s’avère nécessaire, 3 à 5 ans de traitement n’est rien face à l’histoire naturelle chronique de l’allergie. Il ne faut pas baisser les bras ».

D’après un entretien avec le Dr Laurence Lepeltier, allergologue, responsable RNSA pour la ville de Caen
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