PENDANT LONGTEMPS le risque de thrombose veineuse n’a pas été directement lié au tabagisme. Une étude parue en janvier 2013 montre le contraire (1). En outre, on sait, depuis la parution de plusieurs études parues en 1995, que les contraceptifs oraux combinés augmentent le risque thromboembolique veineux. Toutes les pilules augmentent ce risque. Une des questions importantes est de connaître les effets de l’association tabac–pilule. « L’Agence nationale de sécurité du médicament (Asnm), dans son rapport de mars 2013, n’en parle absolument pas, déplore le Dr Ivan Berlin. Mais une grande étude parue en 2008 (2) nous fournit des éléments essentiels ». 2 989 patientes ayant eu un premier épisode de thrombose veineuse et 4 900 témoins ont été incluses. Le risque de thrombose était plus élevé chez les fumeuses et augmentait d’une façon dose-dépendante avec le nombre de cigarettes fumées par jour. Les femmes fumeuses régulières utilisant une contraception orale avaient un risque 8,8 fois supérieur à celui des femmes qui ne fumaient pas et qui n’utilisaient pas de contraceptifs oraux. Les auteurs concluaient au surrisque de thrombose chez les femmes fumeuses prenant la pilule. Ces conclusions émanent d’observations parfaitement documentées par diagnostic échographique sur une grande cohorte de femmes.
Tous les estroprogestatifs sont vraisemblablement impliqués dans le risque thromboembolique veineux. Mais il varie selon le progestatif utilisé et la dose d’éthinylestradiol. C’est ce que démontrent les auteurs d’une très récente analyse de 25 études (3).
Consensus.
« En ce qui concerne le risque artériel, poursuit le Dr Berlin, le tabac comme la pilule augmentent le risque coronaire et celui d’AVC. Plus on est âgé, plus le risque augmente. Il est bon de rappeler le consensus émis en 2012 par la Société française d’endocrinologie ». Celui-ci stipule que la contraception estroprogestative, quelque soit son mode d’administration (pilule, patches, anneau vaginal) devrait être est contre-indiquée chez les fumeuses de plus de 35 ans, spécialement celles qui fument plus de 15 cigarettes par jour. Avant l’âge de 35 ans et en fonction du nombre de cigarettes fumées par jour, la contraception estroprogestative peut être envisagée, en l’absence de facteurs de risque ou d’autres contre-indications. Ce consensus souligne également que la contraception d’urgence avec le lévonorgestrel ou l’acétate d’ulipristal n’est pas contre-indiquée chez les fumeuses. Le choix de la contraception est en fait une bonne opportunité pour discuter du sevrage tabagique.
Entretien avec le Dr Ivan Berlin, Service de pharmacologie, Groupe hospitalier Pitié - Salpêtrière (Paris)
(1) The Lancet. janvier 2013. 381(9861).
(2) Pomp et al. Smoking increases the risk of venous thrombosis and acts synergistically with oral contraceptive use. American Journal of Hematology, 83(2): 97-102.
(3) Stegeman B et al. Different combined oral contraceptives and the risk of venous thrombosis: systematic review and network meta-analysis. BMJ. 12 Septembre 2013.
(4)Gourdy P et al. Contraception hormonale chez la femme à risque vasculaire et métabolique : recommandations de la Société française d’endocrinologie. Annales d’endocrinologie. Novembre 2012. 73(5):469-87.
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