Une dizaine de personnes ont été hospitalisées en Seine-Saint-Denis, ces dernières semaines, suite à une prise de cocaïne frelatée. La plupart sont pourtant des consommateurs chroniques, mais la particularité de la cocaïne utilisée tient à ce qu'elle était coupée avec de la scopolamine. Ce puissant traitement atropinique, utilisé le plus souvent en soins palliatifs, peut entraîner de graves complications en cas d’intoxication aiguë. Un effet atropinique expliquerait les symptômes présentés par cette dizaine de consommateurs : agitation, hallucinations, mydriase bilatérale réactive, hypertension artérielle, tachycardie, vomissements… Des tableaux cliniques complexes, mais dont l’intensité a conduit les médecins à tirer la sonnette d’alarme.
Pour le Dr Anne Batisse du Centre d’évaluation et d’information sur la pharmaco-dépendance d’île de France (CEIP), « cela montre l’importance de la notification par les professionnels ». De fait, l'alerte a permis de lancer les investigations : « Des analyses ont été réalisées, à partir de prélèvements sanguins, mais également sur des restes de poudre, permettant d’identifier la scopolamine ».
Cocaïne et scopolamine, un cocktail toxique
La cocaïne, consommée le plus souvent par voie nasale, est toujours associée à des produits de coupe. Parmi ceux-ci, on retrouve régulièrement le Levamisole, un antiparasitaire et l’Hydroxyzine, un anti histaminique. Cette fois-ci, la scopolamine a également été détectée. Le CEIP a analysé ces produits. « Les échantillons recèlent 23 % de cocaïne, un taux inférieur à celui qu’on détecte habituellement, plus proche de 50 %, rapporte le Dr Batisse. La scopolamine est, elle, présente en quantité importante pour un produit de coupe, à hauteur de 15 %. » Cette proportion élevée pourrait expliquer les intoxications survenues depuis début juillet. « C’est la première fois qu’on retrouve de la scopolamine, même si des atropiniques ont déjà été utilisés il y a quelques années », souligne la spécialiste.
Pour le Dr Laurent Karila, psychiatre-addictologue et porte-parole de SOS Addictions : « La scopolamine et la cocaïne sont des analogues chimiques, la scopolamine potentialise l’effet psychostimulant de la cocaïne, et peut aussi aggraver ses effets toxiques. »
Le rôle majeur des CEIP
Suite aux alertes émises par l’Agence régionale de santé Ile-de-France les 8 et 12 juillet dernier, le ministère de la Santé devrait à son tour communiquer sur le sujet. L’occasion peut-être de rappeler l’importance des CEIP pour le recueil de ces informations, qui d’après le Dr Batisse, ont permis d’identifier « des clusters chronologiques et géographiques ». Avec l’arrivée de nouveaux produits de coupe, mais également de nouveaux produits de synthèse aux effets inconnus, ces outils d’alerte se révèlent être indispensables pour la prévention des intoxications chez les usagers de drogues.
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