La veille de l'annonce du plan hôpital par le Premier ministre et la ministre de la Santé, les Contrepoints de la santé organisaient un nouveau débat sur la sortie de crise de l'hôpital. Avec pour thématique principale : le malaise, les conditions de travail des soignants dues à la pénurie des moyens. En témoigne l'exemple édifiant donné par Sophie Crozier (Collectif Inter-urgences, La Pitié AP-HP) : « J'ai eu une infirmière habitant loin de Paris qui déposait ses enfants à 4H30 du matin chez une voisine pour les faire garder. Quand nos personnels sont épuisés, ils ne sont plus en capacité de tenir la main du patient. » Et d'enfoncer le clou: « Les réformes n'ont peut-être pas été faites dans le bon sens et je ne suis pas certaine qu'un hôpital public doit viser la rentabilité.»
Les gens bien et des outils dégradés
Un autre invité, le Pr Michel Tsimaratos, chef du service de pédiatrie à la Timone (AP-HM)*, est sur la même longueur d'ondes : « On nous dit : les outils sont dégradés et les hospitaliers sont des gens bien. Mais les gens bien avec des outils dégradés n'arrivent plus à maintenir le niveau de qualité. Heureusement il reste la solidarité et l'éthique personnelle des soignants qui continuent de venir travailler alors qu'ils sont en souffrance.» Michel Tsimaratos a notamment pointé la gestion désastreuse des ressources humaines à l'hôpital. François Crémieux, directeur général adjoint de l'AP-HP donnne un exemple concret de cette pénurie de soignants : « Il nous manque une centaine de manipulateurs radio. On est ouvert aux candidatures. » Il souligne aussi le manque d'infirmières de bloc opératoire. Et de tenter de rassurer : « Il est anormal qu'un hôpital comme l'AP HP ne puisse pas y faire face. » François Crémieux demande des moyens et aussi plus de souplesse pour réagir vite et pouvoir faire appel à du personnel. Car selon lui la dépense principale de l'hôpital (plus de 75 %) est celle des ressources humaines, soulignant qu'un à deux points de productivité a été réalisé sur le dos de l'hôpital chaque année depuis dix ans.
Mobilité des personnels
Sophie Crozier ne rejette pas forcément le problème de ressources humaines sur les directions des établissements : « Le but n'est pas de se monter les uns contre les autres. Ce qui a dégradé les conditions de travail, c'est la mobilité sur les horaires. Du fait du manque de personnel, on fait tourner tout ce petit monde en les faisant changer de plage horaire régulièrement. » Cette problématique spécifique à la région parisienne est reconnue sans ambages par le DG adjoint de l'AP-HP. François Crémieux demande la création d'un incitatif particulier à chaque endroit, visant notamment la région parisienne où les établissements de l'AP-HP se trouvent. Il a semble-t-il été entendu par le Gouvernement dans l'annonce du plan hôpital le lendemain, le 20 novembre.
* auteur du livre Repenser l'hôpital, rendez-vous manqués et raisons d'espérer, avec la collaboration de Bénédicte Devictor et Stéphanie Gentile, éditions Michalon.
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes