« Parce que c’est juste, parce que c’est du progrès, parce que ça favorise l’accès aux soins », le tiers payant sera bel et bien mis en place a assuré Marisol Touraine. À six jours de la manifestation des médecins contre son projet de loi, la ministre a précisé, ce lundi matin, la mise en œuvre de cette mesure emblématique de sa réforme. Filant la métaphore cosmique -en janvier dernier, elle n’imaginait pas qu’on ne puisse pas trouver un système simple de dispense d’avance de frais alors « qu’on arrive à envoyer Philae à 510 millions de kilomètres de la Terre » - Marisol Touraine a expliqué aujourd’hui que « le tiers payant sera étendu par étapes, c’est une fusée à trois étages ».
Le premier étage concerne les bénéficiaires de l’Aide à la complémentaire santé (ACS). Comme annoncé initialement, ils seront dispensés d’avance de frais dès le 1er juillet prochain. Un an plus tard, le tiers payant sera étendu à tous les patients couverts à 100 % par l’Assurance-maladie (ALD, femmes enceintes). Entre obligation et faculté, difficile à ce stade de déterminer la nature de la mesure, la ministre évoquant « un droit pour chaque patient pris en charge à 100 % » à partir du 31 décembre 2016. Le 3e étage concerne l’ensemble des patients à qui les médecins pourront proposer le dispositif de tiers payant à compter du 1er janvier 2017. En somme, « le tiers payant sera un droit pour l’ensemble des Français à la fin de l’année 2017 ». S’il ne s’agit, semble-t-il, pas véritablement d’une obligation, reste à savoir ce que risqueront les praticiens qui enfreindraient ce nouveau "droit" de leurs patients…
Un déploiement assorti de garanties. Marisol Touraine l’a répété, le tiers payant ne doit pas avoir d’ « impact sur les conditions d’exercice des professionnels », il ne doit faire peser « aucune charge supplémentaire (sur) les médecins ». En ce sens, elle a affirmé qu’ « un seul geste suffira » au médecin pour enclencher le processus. Une ambition raisonnable quant aux premier et deuxième étages mais qui interroge pour le troisième. À aucun moment, un flux unique de paiement n’a été évoqué. Tout juste l’Assurance maladie et les complémentaires santé ont été enjoints à proposer « un dispositif coordonné » que la ministre souhaite « rapide, fiable et simple », rappelant que « le médecin ne doit avoir qu’un seul geste à faire ». En attendant, une chose est sûre : l’Assurance maladie sera tenue de respecter « un délai maximum de 7 jours » pour le paiement des feuilles de soins électronique. Une garantie de paiement inscrite dans la loi assortie, en cas de non-respect, de pénalités de retard versées au praticien impacté. « Je demanderai aux organismes complémentaires d’apporter les mêmes garanties » a-t-elle ajouté.
Exit le "service territorial de santé au public"
Organisation des soins sur le territoire, évolution des compétences médicales, virage ambulatoire, Marisol Touraine n’a pas manqué d’aborder les autres sujets d’inquiétude de la profession. « Les parcours des patients seront organisés par les professionnels de santé, à leur initiative », a-t-elle garanti. Il n’est désormais plus question de « service territorial de santé au public » mais de « communautés professionnelles territoriales de santé ». S’agissant de l’évolution des pratiques, la ministre de la Santé souligne qu’il ne s’agit « pas d’opposer les professionnels les uns aux autres mais de progresser ensemble ». « Le champ de la délégation sera revu », a-t-elle ajouté. Si la vaccination pourra être pratiquée par les pharmaciens, il ne s’agira que d’une expérimentation. Le but étant, in fine, « d’améliorer la couverture vaccinale dans notre pays ».
Moderniser le système de santé implique, pour Marisol Touraine, « la proximité autour du médecin traitant ». À ses yeux, le virage ambulatoire « est le passage d’un système hospitalo-centré à un système qui fait du médecin traitant et des équipes coordonnées autour de lui le centre de gravité du système ». Dans une volonté de joindre le geste à la parole, un chapitre dédié aux soins primaires et au médecin traitant sera inscrit dans la loi, ainsi que le suggérait la mission Druais. Mais cette modernisation du système de santé ne remet pas en cause les principes de la médecine libérale. Alors qu’une proposition de loi tendant à encadrer l’installation des généralistes à l’issue de leurs études suscite l’émoi de la profession, Marisol Touraine s’est montrée intraitable sur le sujet. La médecine française « repose sur une liberté totale d’installation et sur le libre choix des professionnels de santé par les patients », a-t-elle rappelé.
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