Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur chargée de la Citoyenneté, a annoncé dans un communiqué en fin de semaine dernière, vouloir renforcer la mobilisation contre « les violences et l’emprise sectaire ». Une magistrate, Hanène Romdhane, a ainsi été nommée à la tête de la Miviludes (mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), qui était sans chef depuis octobre 2018. Un conseil d’orientation va également être installé auprès de la ministre, qui réunira entre autres, représentants des ministères, parlementaires, associations mais aussi des experts comme la philosophe Cynthia Fleury, le sociologue Gérald Bronner ou encore l’ancien député et président de la Miviludes Georges Fenech. Enfin une circulaire de mobilisation a été adressée aux préfets afin de le sensibiliser sur cette question des dérives sectaires et les procédures de signalement.
Cette annonce intervient au terme de plusieurs mois d’atermoiements, et après que la Miviludes, placée jusqu'alors sous la tutelle du Premier ministre, ait été officiellement rattachée au ministère de l’Intérieur, ce qui inquiétait notamment les acteurs du monde de la santé.
40 % des signalements dans la santé
Cette prise de position de la ministre survient alors qu’un état des lieux commandé en octobre dernier révélé aujourd’hui montre une augmentation des signalements des dérives sectaires. En effet, d’après le rapport, la Miviludes a enregistré ces cinq dernières années une hausse de 30 % des saisines (demandes d’avis, signalements et témoignages). Et comme c’est le cas depuis plusieurs années maintenant, la santé reste le premier secteur de signalement des dérives sectaires.
En 2020, sur 3 008 signalements reçus, 40 % concernaient les domaines santé/bien être. Le travail de la cellule d'assistance et d'intervention en matière de dérives sectaires (CAIMADES) depuis dix ans, montre que « la majorité des procédures traitées vise des thérapeutes ou des coaches proposant des soins divers ou des séances de développement personnel », note le rapport. Elle fait notamment état d’infractions notamment des « pratiques illégales de la médecine ou de la pharmacie pouvant mettre les victimes sérieusement en danger ».
Même constat du côté du renseignement territorial qui relate de nombreux signalements « mettant en exergue les effets déviants de certaines pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique (PNCAVT) et les agissements de certains « pseudo-thérapeutes ». « Sous forme d’associations ou de structures économiques auto-entrepreneuriales, de nouveaux praticiens, parfois issus de formations médicales, proposent tout un panel de protocoles allant du bien-être psychique au complément (voire au remplacement) des méthodes conventionnelles de soins pour des pathologies parfois lourdes », détaille le rapport. Il note par ailleurs que les départements ruraux sont particulièrement touchés en raison notamment de la désertification médicale.
La tendance du jeûne extrême et du crudivorisme
D’après la Miviludes, les pratiques de ces pseudo-thérapeutes s’appuient sur trois idées principales : l’approche médicale ne prend pas en compte l’humain dans son ensemble, la santé publique est sous l’influence de l’industrie pharmaceutique et toutes les solutions sont à trouver dans la nature ou en soi. Parmi les nouvelles tendances identifiées, la Miviludes cite notamment « les stages de jeûnes extrêmes », ayant déjà entraîné plusieurs décès à l’étranger. Ces 12 derniers mois la pratique a fait l’objet de 3 signalements en France et est « relayée par une demi-douzaine d’individus », précise le rapport. Il évoque aussi le crudivorisme, qui consiste à consommer les aliments crus, et promu par Thierry Casasnovas, qui a fait l’objet de 600 saisines dont 70 en 2020. Les théories de ce pseudo-thérapeute diffusées notamment sur des vidéos sur Youtube ont d’ailleurs gagné en popularité avec la crise sanitaire. Celle-ci a d’ailleurs engendré une augmentation des signalements. Entre mars et juin 2020, 80 signalements ont été en lien direct avec la crise sanitaire. Ils portaient principalement sur « des conseils pour se prémunir de l’infection et pseudos remèdes souvent en lien avec des théories complotistes ».
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