Il y a « urgence » à « imposer des choix politiques à l’opposé de ceux qui nous sont imposés », a martelé lundi devant la presse Françoise Nay, membre du collectif Notre santé en danger, co-animatrice d'un nouveau « Tour de France pour la santé ». Une cinquantaine d’associations*, syndicats, collectifs citoyens ou coordinations se mobilisaient ainsi pour défendre l’accès aux soins et le droit à la santé pour tous. Au cœur de leurs revendications, « l’obtention d’un budget de la Sécurité sociale pour sortir de la crise sanitaire et répondre aux besoins des populations », face à la menace d'un nouveau « tour de vis budgétaire ».
Ce Tour de France sera jalonné d'une trentaine d’étapes (Besançon, Concarneau, Carhaix, Ivry-sur-Seine, Les Lilas, Lille, Metz, Nantes, Rouen, Sarlat, Tours, Toulouse, etc.), tout au long du débat parlementaire sur le projet de loi de financement de la Sécu (PLFSS), soit jusqu’à mi-novembre. À chaque étape, seront distribués des cartons rouges symboliques – diffusés sur les réseaux sociaux – pour sanctionner le gouvernement, tel ministre, un directeur d’agence régionale santé (ARS) ou une initiative. Les doléances des acteurs locaux seront recueillis dans un cahier de revendications. Défense de la Sécu solidaire, maintien des petites maternités et des urgences, lutte contre les déserts médicaux et les fermetures de lits, accès aux médicaments, recrutement de personnel soignant, revalorisation des salaires : autant de sujets qui seront mis sur la table. Les types d’action devraient se décliner sous forme de rassemblements, casserolades, débats ou pique-nique militants.
Stop aux économies
« Nous ne réparerons pas la santé dans notre pays si le fil conducteur du gouvernement continue d’être celui de la baisse des dépenses publiques et des économies à réaliser sur la santé », plaide Françoise Nay, qui cite le projet de doublement des franchises médicales sur les médicaments et les consultations, le transfert aux mutuelles du remboursement de soins dentaires ou encore le contrôle renforcé des arrêts maladie.
Côté hôpital, la pérennisation de la revalorisation des sujétions (travail de nuit, week-end et jours fériés) est jugée « pas à la hauteur des attentes des professionnels et de la crise de recrutement à l’hôpital », commente la co-animatrice de ce « Tour de France ». « Combien de morts évitables sur un brancard des urgences devront nous comptabiliser pour que de réelles mesures soient prises ? », met-elle en garde.
« 30 années de disette budgétaire »
Le Dr Vincent Poindron, spécialiste en médecine interne aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), abonde en ce sens, soulignant que des patients attendent « plusieurs jours sur des brancards » aux urgences. Or, selon une étude récente du Dr Yonathan Freund, le risque de mourir aux urgences serait 46 % plus élevé pour les patients de plus de 75 ans qui passent une nuit sur un brancard. Pour le Dr Poindron, « 30 années de disette budgétaire et de sous-financement de l’hôpital l’ont amené au bord de l’effondrement ». Autre indice inquiétant : 163 services d’urgences ont fermé au moins une fois cet été, alerte une enquête de Samu-Urgences de France (SUdF).
Pour sortir de cette crise qui n’en finit plus, le praticien strasbourgeois réclame non seulement des « moyens pour les hôpitaux » mais aussi plus concrètement l'instauration de ratios soignants/patients dans les services pour « pouvoir soigner dans des conditions dignes et en toute sécurité, ce qui n’est pas le cas ».
Médecins du Monde mobilisé
Également présent pour ce lancement, le Dr Jean-François Corty, vice-président de Médecins du monde, souligne que les personnes précaires sont particulièrement touchées par « la crise du système de santé et l’augmentation des inégalités ».
Le généraliste observe à cet égard que tous les dispositifs de santé précarité sont « débordés ». Quant aux permanences d’accès aux soins de santé des hôpitaux (PASS), cellules de prise en charge médico-sociale, elles sont « saturées » si bien Médecins du monde a « de plus en plus de mal à transférer ses patients ». Le vice-président de MdM n'hésite pas à dénoncer un « détricotage des filets solidaires et sociaux en France ». Il appelle lui aussi à « sanctuariser la santé, le soin et la prévention, en sortant de logiques lucratives et de marché ».
* Parmi ces associations et collectifs : Convergence nationale des collectifs de défense et de développement des services publics, Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité, Notre Santé en Danger, Fédération des orthophonistes de France, FSU, Solidaires, Sud Santé Sociaux, Syndicat de la médecine générale (SMG), Syndicat des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG), Syndicat National des Infirmier(e)s, Union fédérale Médecins, ingénieurs, cadres et techniciens-CGT, Union syndicale de la psychiatrie, Act Up Sud-Ouest, Association des médecins urgentistes de France (Amuf), ATTAC, Collectif Inter-Hôpitaux, Collectif Inter-Urgences, Collectif des Médecins Généralistes pour l'Accès aux soins, Collectif national du droit des femmes, Médecins du Monde, Médicament bien commun, Printemps de la psychiatrie, Stop précarité, etc.
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