Plus de treize ans après le scandale du Mediator, médicament antidiabétique utilisé comme coupe-faim et tenu pour responsable de centaines de décès, le groupe pharmaceutique Servier a été lourdement condamné mercredi 20 décembre par la cour d'appel de Paris, au grand soulagement des parties civiles.
Le laboratoire français a été reconnu coupable de tromperie aggravée, homicides et blessures involontaires, obtention frauduleuse d'autorisation administrative et escroquerie, pour avoir commercialisé le Mediator, à l'origine d'un des plus retentissants scandales de santé publique en France.
Plus de 9 millions d'euros d'amende
Le groupe devra notamment verser une amende totale de 9,173 millions d'euros et rembourser plus de 415 millions d'euros aux organismes de sécurité sociale et mutuelles.
« Quel soulagement ! C'est pour nous une très belle victoire, même si je ne peux m'empêcher de penser à la souffrance de chacune de ces victimes, qui reste la même aujourd'hui », a réagi Jean-Christophe Coubris, un des avocats des plus de 7 000 parties civiles.
Une « décision historique », selon l’Assurance-maladie
« Le Mediator était un produit très dangereux que les laboratoires Servier ont maintenu sur le marché en connaissance de cause, en multipliant les victimes auxquelles justice est à nouveau rendue », s'est félicité le directeur général de l'Assurance-maladie, Thomas Fatôme. « Par son arrêt, la cour confirme que Servier a agi par cupidité », a-t-il ajouté.
Le groupe Servier « a pris la décision de former un pourvoi en cassation », a annoncé dans un communiqué l'entreprise, tout en se disant « en mesure de faire face » financièrement à cette condamnation « décevante à bien des égards ».
En première instance, les laboratoires Servier et leur ancien numéro 2, Jean-Philippe Seta, ont été reconnus coupables de tromperie aggravée et d'homicides et blessures involontaires. Servier a écopé d'une amende de 2,7 millions d'euros, J.-P. Seta d'une peine de quatre ans de prison avec sursis et d'une amende de 90 600 euros.
Pas de confiscation des bénéfices liés au Mediator
Seule et maigre satisfaction pour la défense du laboratoire, la cour n'a pas suivi les réquisitions du parquet qui demandait la confiscation des bénéfices de Servier liés au Mediator, soit 182 millions d'euros, arguant que cette condamnation supplémentaire risquait « de mettre en péril le groupe ».
« Le groupe Servier prenait soin de taire les effets anorexigènes du Mediator pourtant parfaitement connus de lui », a mis en avant le président de la cour d'appel. Le laboratoire « n'a rien fait pour éclairer les autorités sanitaires lorsqu’est apparu le lien entre la consommation du Mediator » et de graves lésions cardiovasculaires chez des milliers de patients, a-t-il relevé.
Le Mediator, commercialisé en 1976 pour le traitement du diabète, mais largement détourné comme coupe-faim, a été prescrit à quelque cinq millions de personnes. Il a été retiré du marché en France en 2009, après qu'un lien avec des lésions cardiaques et de l'hypertension artérielle pulmonaire a été établi par la pneumologue et lanceuse d'alerte Irène Frachon.
Quelque 5 000 autres dossiers pour homicides ou blessures involontaires sont toujours à l'instruction au parquet de Paris, ouvrant la voie à un probable second procès Mediator dans les prochaines années.
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