Le Syndicat national autonome des médecins de santé publique de l’Éducation nationale (Snamspen-Sgen– CFDT) ne digère pas la proposition de loi portée par la sénatrice centriste Françoise Gatel (UDI), adoptée par le Sénat mercredi 27 mars. Ce texte, qui ne comporte qu’un seul article, prévoit de confier, pour une durée expérimentale de cinq ans aux départements volontaires « la compétence de médecine scolaire et les obligations relatives au bilan de santé et à la promotion de la santé en milieu scolaire ». Les modalités de ce transfert de compétence et de crédits seraient conclues par une convention, avec une mise à disposition des services de l'État « à titre gratuit ». « Conformément au cadre organique renouvelé sur les expérimentations locales, celle-ci serait évaluée à mi-parcours ainsi que six mois avant son terme », précise la députée d’Ille-et-Vilaine.
« Historiquement, nous avons toujours été hostiles à la décentralisation de nos services. Ce que nous demandons, c’est une déconcentration. Avec une feuille de route nationale du ministère et une latitude de manœuvre pour les départements », recadre la Dr Patricia Colson, secrétaire générale du Snamspen. Son homologue du Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU-Unsa), la Dr Jocelyne Grousset se déclare, elle aussi, « inquiète » par ce vote des sénateurs vers la décentralisation de la médecine scolaire. « Nous ne faisons pas une priorité de rester dans le giron de l’Éducation nationale mais je crains que ce type d’expérimentation ne nuise à la politique globale de santé à l’école », anticipe la co-secrétaire du syndicat.
46 % des postes de médecins scolaires sont actuellement vacants
12 millions d’élèves, moins de 850 médecins scolaires
Reste que pour les sénateurs, il y a urgence à agir pour remédier à la pénurie de médecins de l’Éducation nationale et aux fortes disparités territoriales qui en découlent.
Selon les chiffres présentés par le Sénat, 46 % des postes de médecins scolaires sont vacants. Une situation qui n’est pas nouvelle mais qui empire. Un rapport conjoint de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) révélait en septembre dernier que la chute du nombre de médecins scolaires a atteint 35 % en dix ans. Fin 2022, leurs effectifs s’établissaient à 843 personnes physiques, « soit 818 équivalents temps plein ». Impossible, avec un contingent aussi maigre d’assurer efficacement le suivi médical de 12 millions d’élèves…
« Il y a nécessité de réformer profondément et de clarifier le dispositif », assume la sénatrice bretonne, précisant qu’il ne s’agit pas de proposer un transfert obligatoire « offrant l’occasion à l’État de se défausser sur les collectivités territoriales pour l’exercice de compétences qu’il peine aujourd’hui à exercer effectivement ».
Risque de démissions ?
La ministre de l'Éducation nationale, Nicole Belloubet, a volontiers reconnu les « difficultés importantes » rencontrées par le secteur mais elle a « pointé le risque de complexité dans la répartition des compétences en matière d'éducation » entre l'État et les collectivités locales et craint des démissions supplémentaires de médecins scolaires. Une crainte partagée par les syndicats de médecins scolaires, qui auront l’occasion d’en faire part directement à la conseillère sociale de la ministre de l’Éducation. Rendez-vous est pris au 2 avril.
Pour mémoire, dix-neuf départements ont déjà fait part de leur intérêt pour l’expérimentation votée par le Sénat, selon un décompte de l'Assemblée des départements de France. Le texte du Sénat est désormais transmis à l'Assemblée nationale. Reste à savoir si celui-ci sera inscrit à l'ordre du jour.
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