Haro sur le remboursement des « pseudothérapies » par les mutuelles : l’alerte du collectif No FakeMed

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Publié le 06/05/2025

Dans une tribune portée par le collectif « No FakeMed », des soignants alertent sur les risques liés au remboursement par les complémentaires santé de pratiques non conventionnelles, qualifiées de « pseudothérapies », dont l’homéopathie, l’ostéopathie, l’acupuncture, la chiropraxie ou la naturothérapie. Dans leur viseur : un contrat de l'Éducation nationale avec la MGEN et CNP assurance pour les fonctionnaires…

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Nouveau coup de sang du collectif « No Fakemed » contre les pratiques de soins non conventionnelles. Créée en 2018, cette association rassemblant des soignants engagés contre la désinformation en santé étrille, dans une tribune publiée dans l’Express, le remboursement par des complémentaires « de pseudothérapies », non éprouvées par la science. Pour les signataires – dont de nombreux médecins – ces thérapies non éprouvées doivent relever du choix individuel et leur prise en charge ne doit en aucun cas être encouragée ou promue par l’État.

C’est là que le bât blesse. En effet, la signature d’un contrat par l’Éducation nationale, plus gros employeur public du pays, avec le groupement MGEN-CNP Assurance, prévoyant précisément le remboursement de pratiques non conventionnelles incluant homéopathie, ostéopathie, acupuncture, naturopathie, chiropraxie ou sophrologie, a mis le feu aux poudres. À partir de 2026, les fonctionnaires concernés devront adhérer à ce contrat collectif de protection sociale complémentaire en santé – l’État employeur prenant en charge 50 % de la cotisation. Mais selon le Dr Pierre de Bremond d’Ars, généraliste à Malakoff et président du collectif No Fakemed, joint ce mardi par Le Quotidien, « il s’agit d’une aberration au moment où l'État prétend lutter contre la désinformation en santé ».

Retour de l’homéopathie par la petite porte

De telles pratiques comme l’écrit le ministère de la Santé lui-même sur son site, n’ont, le plus souvent, « pas fait l’objet d’études scientifiques ou cliniques montrant leurs modalités d’action, leurs effets, leur efficacité, ainsi que leur non-dangerosité ». Médecines « douces », « naturelles », « alternatives » : leur point commun est qu’elles ne sont « ni reconnues, sur le plan scientifique, par la médecine conventionnelle, ni enseignées au cours de la formation initiale des professionnels de santé », lit-on sur le site du ministère.

D’où l’incompréhension et la colère du collectif de soignants signataires de la tribune. « Après avoir déremboursé l’homéopathie, la prise en charge de cette pratique revient par la petite porte, en étant de facto remboursé par l'État », tonne le Dr Pierre de Bremond d’Ars. À l’heure où certaines thérapies éprouvées comme la psychologie, le sport sur ordonnance ou la diététique sont « rarement pris en charge », « ces pseudo-thérapies sont incluses dans les garanties obligatoires du contrat et non pas optionnelles. C’est totalement incompréhensible », ajoute le patron du collectif.

Outre le coût pour l’État employeur, cette prise en charge ainsi « labellisée » pour les fonctionnaires risque de renforcer auprès du grand public « le sentiment que ce sont des soins efficaces, alors qu’ils relèvent du choix individuel et non de la solidarité nationale », peut-on lire dans la tribune publiée dans l’Express. « Cela pourrait entraîner des dérives thérapeutiques voire des abandons de soins », ajoute le médecin à la tête du collectif No FakeMed.

Paraphée par plusieurs dizaines de médecins et personnalités scientifiques, cette tribune a notamment été signée par des président(e)s d’Ordres professionnels (kinés, sages-femmes), le Syndicat de jeunes généralistes (Reagjir) mais aussi la Pr Agnès Buzyn (ancienne ministre de la Santé), Dominique Costagliola (directrice de recherche émérite Inserm), la Pr Karine Lacombe (cheffe du service d'infectiologie de l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), le Dr Matthieu Calafiore (directeur du département de médecine générale de l’Université de Lille) ou encore le généraliste écrivain Christian Lehmann. Tous appellent à la rigueur des autorités quant aux prises en charge par la collectivité et par les mutuelles des « seules pratiques reposant sur les connaissances scientifiques ».

L'Unité pour l'ostéopathie (UPO) a dénoncé de son côté « une posture dogmatique » du collectif et une « méconnaissance des réalités de terrain ». « Prohiber le remboursement de l'ostéopathie par les complémentaires, c'est fragiliser la santé des Français, pénaliser leur pouvoir d'achat, et renier l'engagement solidaire de notre système de soins », écrit la fédération dans un communiqué. « J’entends cette défense, commente le Dr de Bremond d’Ars. Nous attendons encore des preuves scientifiques robustes d’efficacité et d’intérêt de l’ostéopathie pour les patients. »


Source : lequotidiendumedecin.fr