« Sous-estimation du risque », « pilotage défaillant de la crise »… La commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la gestion de l'épidémie de Covid-19, pilotée par Les Républicains (LR), charge l'exécutif. Après avoir mené plus de 50 auditions en six mois, dont celle de l'ex-Premier ministre Édouard Philippe et de plusieurs ministres de la Santé successifs (Roselyne Bachelot, Xavier Bertrand, Marisol Touraine, Agnès Buzyn, Olivier Véran) durant quelque 130 heures au total, la commission d'enquête de l’Assemblée a adopté mercredi matin un rapport pointant une série de manquements des pouvoirs publics en amont et pendant la crise sanitaire. Tous ses membres se sont prononcés pour l'adoption du document, à l’exception des députés LREM qui se sont abstenus. Le rapport doit être officiellement rendu public dans cinq jours, le temps de recueillir les observations des groupes politiques.
La France était « mal armée » face à la pandémie qui a éclaté en début d'année, affirme le chef de file des députés LR Damien Abad. La gestion de la crise a été « chaotique » et a révélé des « failles structurelles », a renchéri devant la presse Eric Ciotti, rapporteur LR de la commission d'enquête.
Un rapport partial et partiel, selon LREM
« Nous ne pouvions voter pour un rapport partial et partiel, et nous regrettons évidemment qu’il ne reflète absolument pas la qualité des auditions et des débats que nous avons menés », a expliqué de son côté le député LREM — et médecin généraliste — Julien Borowczyk, président de la commission, dans une déclaration transmise à l'AFP. Interrogé à l'issue du Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a affirmé ne pas en avoir encore pris connaissance. « Nous avons montré que nous étions à la fois dans la gestion et dans l’adaptation de la politique qui est menée face à un virus qui bouscule l'organisation des pays du monde entier », a-t-il fait valoir.
Pas un « tribunal »
La commission d'enquête « n'était ni un tribunal populaire, ni un tribunal judiciaire » et il n'y a « pas de mise en cause personnelle », affirme de son côté son rapporteur Eric Ciotti, qui souligne que la France est au « 4e rang des pays les plus touchés en Europe ». « Des pays ont mieux fait face que d'autres », martèle-t-il, chiffres à l'appui : la moyenne dans l'Union européenne a été de 532 décès pour 1 million d'habitants, et la moyenne en France a atteint 727 décès.
« Nous constatons un manque d'anticipation et une sous-estimation du risque épidémique, une baisse des stocks stratégiques », avec des « problèmes de fournisseurs » pas assez diversifiés, a listé Damien Abad, pilonnant la politique française qui remonte jusqu'aux quinquennats précédents. Il a également déploré le « manque d'interministériel, de déconcentration et de décentralisation », les « messages contradictoires sur les masques, des défaillances sur la politique des tests » durant la crise. Le député a de plus souligné que les maisons de retraite et les malades hors Covid avaient été les « grands oubliés » durant cette période.
Pace à ces constats, Eric Ciotti préconise notamment de « retrouver une forme de souveraineté sanitaire » et de créer un « ministère de l'Anticipation des crises ». Selon lui, la gestion même de la crise doit relever du ministère de l'Intérieur. Or, « le ministère de la Santé l'a préemptée », a-t-il regretté.
La commission d'enquête, devant laquelle les personnes auditionnées doivent prêter serment doit poursuivre ses travaux au format mission d'information, alors que la circulation du virus reste forte et que la stratégie vaccinale doit être précisée. De son côté, le Sénat à majorité de droite a aussi sa propre commission d'enquête sur la crise et doit examiner son rapport mardi.
(Avec AFP)
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