34 ans et déjà Premier ministre. L’ascension fulgurante de Gabriel Attal, jusqu’à Matignon, est censée redynamiser le second mandat d’Emmanuel Macron, en perte de vitesse face au Rassemblement national (RN) dans les sondages. Populaire dans l’opinion, déjà aguerri au sein d’un gouvernement où il a occupé plusieurs postes, le conseiller municipal de Vanves (Hauts-de-Seine) n’est pas un inconnu du secteur de la santé et s’est exprimé à plusieurs reprises sur les thématiques qui concernent directement les médecins.
Préposé aux discours de Touraine sous Hollande
À l’aube de sa carrière politique, il a passé l’intégralité du mandat de François Hollande (2012-2017) au sein du cabinet de la ministre de la Santé socialiste, Marisol Touraine, dont les médecins libéraux se souviennent avec amertume des réformes sur la loi de santé et le tiers payant généralisé.
Le Dr Claude Pigement, ancien responsable santé du PS et visiteur du soir de l’ancienne ministre, a connu Gabriel Attal alors âgé de 23 ans, tandis qu’il n’était qu’une « petite main ». Il dresse pour Le Quotidien le portrait d’un jeune homme ambitieux, à la fois talentueux et besogneux. « Il a intégré le cabinet de Marisol Touraine comme conseiller parlementaire, soit l’un des postes les plus bas de la hiérarchie. Corvéable à merci et doué, il s’est rendu indispensable en étant présent 24 heures sur 24 », raconte le gastro-entérologue.
Quand ce dernier a reçu la légion d’honneur en 2013, c’est Gabriel Attal qui a accompagné Marisol Touraine. Et quand Benjamin Griveaux a quitté le cabinet de la ministre de la Santé en 2014, c’est lui qui l’a remplacé, en devenant son conseiller politique. « Il a pris de l’ampleur, admet volontiers le Dr Pigement. Ce n’était pas un spécialiste de la santé mais il a vite appris. Nous avons beaucoup discuté et il s’est investi dans le tiers payant généralisé, sur une ligne de gauche à l’époque… », narre-t-il avec gourmandise.
Gabriel Attal dans l’ombre de Marisol Touraine, en 2014 (Villard/Sipa)
Lors de son discours de passation de pouvoir ce mardi, le néo-Premier ministre a d’ailleurs eu un premier mot pour les blouses blanches, dans le cadre du « renforcement des services publics et en premier lieu la santé et l’hôpital ». Innocent ? Pas sûr ! Pour le Dr Pigement, Gabriel Attal aura bel et bien une ambition sur la santé, car « il connaît bien le secteur puisqu’il a quand même passé cinq ans en première ligne à Ségur ».
Avant de le nommer à l’Éducation nationale, Élisabeth Borne lui avait d’ailleurs proposé au départ de prendre la tête de Ségur… sans succès. « Il pèsera sur les questions de santé, quand, au niveau national, ça chauffera. C’est le deuxième sujet d’intérêt des Français : il veillera donc à avoir de bons rapports avec les hospitaliers et les libéraux », veut croire le Dr Pigement.
Pas de levée de boucliers contre Attal
Justement, que disent les principaux intéressés de cette arrivée fracassante du trentenaire à Matignon ?
Chez MG France, la nomination de Gabriel Attal ne suscitait cet après-midi ni enthousiasme, ni rejet. « Je n’ai aucun commentaire à faire. Je ne connais pas le nouveau Premier ministre », lâche la Dr Agnès Giannotti, présidente du syndicat de généralistes. Lui rappelle-t-on qu’il avait pris la défense des soignants face aux antivax lors de la crise Covid ou plus récemment, qu’il n’avait pas hésité à désigner les professionnels de santé comme responsables d’une bonne part de la fraude sociale, la Dr Giannotti reste de marbre, en attendant d’y voir plus clair sur la feuille de route. A contrario, le bref passage de Gabriel Attal à Bercy a laissé des souvenirs amers à la CSMF. « Ce n’est pas le directeur de la Cnam qui a annoncé début juillet qu’on allait contrôler les généralistes “fraudeurs” avec les arrêts de travail, mais bien les Finances et les Comptes publics », se souvient le Dr Luc Duquesnel, chef de file de la branche généraliste.
Du côté des médecins hospitaliers, on espère une action résolue et des résultats (au-delà des groupes de travail). « Nous espérons que le nouveau Premier ministre fera bien de la santé une priorité, comme l’a exprimé le président de la République », déclare le Dr Jean-François Cibien, président d’Action praticiens hôpital (APH).
Pas de levée de boucliers non plus du côté de l'Union nationale des professions libérales (UNAPL). Première organisation représentative des libéraux en France avec 1,7 million de professionnels, l’organisation a exprimé « ses sincères félicitations à Gabriel Attal pour sa nomination au poste de Premier Ministre », ajoutant qu’elle « est prête à travailler avec lui et ses équipes (…) à la modernisation de notre pays confronté à de nombreux défis et périls ».
Qui pour la Santé ?
Maintenant que le Premier ministre est connu, quel profil pour piloter la Santé et la Sécu ? En cette période de vœux, le Dr Cibien souhaite un « nouveau ministère de tutelle du style “one health”, qui englobe une vision écologique, sanitaire et de prévention ». Et la nomination d’un médecin serait à ses yeux bienvenue…
Certains imaginent déjà un nouveau casting, alors qu’Agnès Firmin Le Bodo, ministre par intérim, est fragilisée. « Si on nous annonçait, dans les jours qui viennent, que Nicolas Revel (patron de l’AP-HP, NDLR) était le nouveau ministre de la Santé, ce serait une plutôt une bonne nouvelle pour les médecins libéraux », confie ce mardi le Dr Duquesnel.
Quid de profils plus « politiques » ? Plusieurs noms circulent à nouveau, à l’instar des parlementaires experts du secteur – mais aussi « chiffons rouges » pour les libéraux – comme la rhumatologue Stéphanie Rist (Renaissance) et le député (Horizons) Frédéric Valletoux.… La députée et cheffe d’entreprise Astrid Panosyan-Bouvet (Renaissance) est parfois citée. Chargée de suivre les questions relatives à la fin de vie pour la majorité, elle a participé à plusieurs initiatives transpartisanes. Utile, en ces temps troubles à l’Assemblée…
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