Partisan acharné de la suppression de l’aide médicale d’État (AME), le patron des Républicains (LR) Éric Ciotti a remis le sujet sur le tapis lors d’une interview accordée mardi 30 janvier à « Télématin ». Avec un nouvel angle d’attaque : mieux financer le travail des agriculteurs français par les économies faites sur la prise en charge médicale des étrangers en situation irrégulière…
« Aucun agriculteur ne doit gagner moins de 1 500 euros, a-t-il lancé. Comment on finance ? […] L’AME qu’on voulait réformer coûte deux milliards d’euros. Il y a des sources d’économies. […] Mille cinq cents euros [pour chaque agriculteur], ça aurait un coût de deux milliards d’euros pour la collectivité. Est-ce qu’on ne peut pas donner deux milliards d’euros à nos agriculteurs et faire des économies là ou c’est improductif ? »
Ce raccourci surprenant a été fait quelques heures avant la déclaration de politique générale de Gabriel Attal à l’Assemblée. Mais devant la représentation nationale, le Premier ministre s’est contenté de son côté de confirmer que l’AME – conformément à l’engagement pris par Élisabeth Borne – serait bien « réform[ée] avant l’été par voie réglementaire », sur la base du rapport Evin – Stefanini. Ce document propose des conclusions très éloignées de celles d’Éric Ciotti puisqu’il défend un dispositif sanitaire utile, sans nier les adaptations nécessaires.
Sans surprise, la proposition radicale d’Éric Ciotti a reçu un accueil très frais de la part d’Arnaud Robinet, président de la Fédération hospitalière de France (FHF). « Franchement, la démagogie a atteint son paroxysme ! Digne du Gorafi ! Mieux vaut en rire… L’AME est un sujet de santé publique ! », a tweeté le maire Horizons de Reims.
Un « outil efficace » pour le Covars
La sortie d’Éric Ciotti intervient également alors que le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) alerte sur l’impact délétère d’une refonte de l’AME. Elle « est un outil efficace de protection et de santé publique », souligne le comité d’experts dans une note transmise au gouvernement et rendue publique le 30 janvier. Sa restriction totale ou partielle « augmenterait le risque de transmission de pathogènes à la population générale, à partir des patients contagieux avant leur prise en charge optimale, et aggraverait davantage les risques d’évolution vers des maladies graves et plus lourdes à prendre en charge ».
Autre argument sanitaire : la limitation (dans le panier de soins AME) de l'accès aux soins des maladies chroniques, comme le traitement par hémodialyse pour insuffisance rénale chronique, au profit de prises en charge sur condition d'urgence « risque de déporter vers l'hôpital, et en particulier vers les soins critiques et les réanimations, des patients qui auraient dû relever de structures extérieures plus légères ».
Le Covars ne valide pas davantage le contenu global de la loi immigration, en particulier les propositions visant à restreindre l’accès aux soins et le droit au séjour des étrangers malades selon la disponibilité de ces soins dans leurs pays d’origine. Des mesures qui, là encore, risquent d’« entraîne[r] un défaut de suivi médical (dépistage, diagnostic et traitement) impactant gravement non seulement la santé de ces personnes étrangères malades mais également la collectivité ».
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