« Une situation alarmante et inacceptable ! » : ce mardi 27 août, la totalité des syndicats de praticiens libéraux installés (CSMF, MG France, Avenir Spé-Le Bloc, SML, FMF, UFML-S) et juniors (Isni, Jeunes Médecins, Reagjir) mais aussi l’association Médecins pour demain, sonnent l’alarme contre l’augmentation des agressions envers les médecins « mettant en péril non seulement leur sécurité, mais aussi la qualité des soins prodigués aux patients ».
Il y a quelques jours déjà, les collectifs pour une médecine libre et indépendante (Comeli) dénonçaient l’inaction de l’État, après l’agression d’une généraliste marseillaise, et réclamaient un soutien « maximal » des autorités ordinales, en leur demandant de s’associer aux plaintes (ou en se constituant partie civile).
Les syndicats rappellent à l’unisson qu’en 2022, les violences envers les médecins ont bondi de 23 % par rapport à 2021 d’après l’observatoire annuel de l’Ordre. Avec 1 244 déclarations identifiées, les violences de tous types contre les confrères avaient atteint un pic historique, très au-dessus de la moyenne annuelle établie depuis 20 ans (841 incidents). « Face à cette situation, il est impératif que les autorités gouvernementales prennent des mesures urgentes pour les protéger, plaident-ils. Le renforcement de la sécurité dans les établissements de santé publics, privés et les cabinets libéraux, l'application de sanctions exemplaires contre les agresseurs, et la mise en place de campagnes de sensibilisation sont des actions nécessaires mais pas suffisantes pour garantir la sécurité des soignants ». Les syndicats voient dans cette « spirale de violences » le révélateur d’ « une crise profonde qui nécessite une réponse immédiate et déterminée ».
Les médecins ne peuvent payer le tribut du délabrement du système de santé tout en le subissant de plein fouet
Communiqué intersyndical
En cette rentrée, alors que la situation politique n’est toujours pas clarifiée, l’étau se resserre à nouveau sur l’exécutif, accusé de ne pas en faire assez pour sécuriser l’exercice médical en ville comme à l’hôpital, mais surtout de fragiliser le système de santé entraînant un surcroît de comportements violents. « Le manque de volonté d’investissement dans la santé entraîne une pénurie de soignants et par conséquent des délais de consultations allongés, une pénurie de médicaments, un manque de lits à l’hôpital, tout cela provoquant inexorablement une montée de l’agressivité », peut-on lire. « Les médecins ne peuvent payer le tribut du délabrement du système de santé tout en le subissant de plein fouet », tonnent les syndicats du secteur.
Il y a un an pourtant, pour enrayer ce phénomène des violences envers les médecins, le ministère de la Santé avait élaboré – avec la contribution de deux personnalités qualifiées – un vaste plan d’une quarantaine de mesures progressives pour la sécurité des professionnels de santé, alors présenté par Agnès Firmin Le Bodo. Affichant une volonté de tolérance zéro, ce plan s’articulait autour de trois axes : sensibiliser le public et former les soignants ; prévenir les violences et sécuriser l’exercice ; déclarer les agressions et accompagner les victimes. Force est de constater que les médecins veulent aujourd’hui aller plus vite et plus fort.
En Italie aussi, les agressions envers les soignants font débat
Il n’y a pas qu’en France que les violences envers les soignants reviennent sur le devant de la scène. En Italie, plusieurs faits divers estivaux ayant conduit au départ de soignants ont mis le feu aux poudres.
Dans la nuit du 17 août, à l’hôpital de Maruggio, dans le sud de la péninsule, la Dr Sonia F.*, médecin de garde, a subi une violente agression après avoir examiné un enfant. La situation a dégénéré : insultes de la part des parents, plaquage contre un mur, coups de pied, menaces de mort… La praticienne avait été transportée aux urgences avec une épaule luxée et des spasmes liés à une crise d’angoisse. Deux jours plus tard, cette PH décide de démissionner. « J’avais déjà été agressée verbalement mais je ne l’avais jamais été physiquement, cette brutalité est insupportable, je démissionne au nom de toutes les femmes médecins qui travaillent la nuit dans des conditions épouvantables et qui ne sont pas protégées », a-t-elle confié à la presse. Toujours dans le sud de l’Italie, une autre praticienne a décidé de jeter l’éponge après avoir été agressée par un patient aux urgences.
Face à l’augmentation des agressions à l’encontre de praticiens, les syndicats de soignants réclament la mise en place d’un programme de protection avec un volet ciblé sur les femmes médecins. Selon une enquête de l’observatoire national sur la sécurité des soignants, quelque 16 000 faits de violences ont été enregistrés en 2023 en Italie. Et 70 % des agressions concernent des femmes médecins. Un sondage réalisé par le syndicat des médecins et cadres de santé hospitaliers Anaoo-Assomed enfonce le clou en affirmant que 81 % des soignants interrogés ont déjà été agressés dans l’exercice de leur profession.
Comme en France, les syndicats parlent de « dérive dangereuse et inacceptable » en réclamant la mise en place de système de protection pour les blouses blanches. « Allons-nous être obligés de demander des ports d’arme pour nous défendre ? », interpelle le Dr Ludovico Abbaticchio, médecin à Bari et président du Syndicat national des médecins italiens (Smi).
* Non d’emprunt
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