L'Élysée a promis mardi de relocaliser une cinquantaine de médicaments prioritaires, une mesure représentant au moins 200 millions d'euros d'investissements pour prévenir les pénuries et reconquérir une autonomie sanitaire à l'échelle nationale et européenne.
Combien de médicaments, quels investissements ?
Il s'agit dans un premier temps de rapatrier ou renforcer d'ici cinq ans la production de 25 médicaments « essentiels » dont des antibiotiques, des anti-cancéreux et des anesthésiques, pour la plupart des génériques. Dans un second temps, 25 autres médicaments, pour lesquels la dépendance de la France à l'égard des importations extra-européennes est avérée, devraient suivre.
Une liste de 450 molécules, dont les stocks devraient être contrôlés par l'ANSM, a d'ailleurs été publiée par le ministre de la santé, François Braun.
Pour soutenir ces projets, plus de 200 millions d'euros d'investissements sont prévus, a annoncé le chef de l'État ce mardi.
Une autre enveloppe d'un montant équivalent avait été annoncée en 2020, en pleine crise sanitaire, pour financer des infrastructures de production pharmaceutique et notamment permettre la relocalisation en France du principe actif du paracétamol.
Le laboratoire britannique GSK va investir 22 millions afin d'augmenter ses capacités de production d’amoxicilline en Mayenne. Cet antibiotique, largement prescrit aux enfants pour soigner les infections, est régulièrement en rupture de stock.
Dans quel contexte de pénuries ?
En 2022, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a reçu plus de 3 700 signalements de ruptures de stock et déclarations de risque de ruptures : une hausse de plus de 73 % en un an, et même huit fois plus qu'en 2014.
Le manque de paracétamol et d'amoxicilline a causé des sueurs froides cet hiver en pleine triple épidémie de grippe/bronchiolite/Covid-19. Mais le problème touche surtout des médicaments dits « à intérêt thérapeutique majeur », du système cardiovasculaire, du système nerveux (antiparkinsoniens, antiépileptiques) et les anti-infectieux. Les corticoïdes ne sont pas épargnés non plus.
La cause ? La production des matières premières des produits les plus anciens sur le marché, dont les génériques, a été délocalisée hors d'Europe pour des questions de rentabilité, sociales ou environnementales, en particulier en Chine et en Inde, des pays dont la France dépend à hauteur de 60 à 80 %.
Un seuil qui grimpe à 95 % pour les biomédicaments, (médicaments produits à partir du vivant, contrairement aux médicaments plus classiques, fabriqués chimiquement).
En termes de santé publique, les pénuries compliquent le cours des traitements, avec de possibles retards de prise en charge, des risques d'inefficacité ou des effets indésirables lors du remplacement du médicament manquant par un autre.
Quels autres leviers ?
Les mesures de relocalisation mettront du temps à faire effet alors qu'il faut, selon les acteurs du secteur, agir à court terme pour endiguer les pénuries et prévenir l'apparition de tensions d'approvisionnement.
Dans les discussions en cours depuis cet hiver sur le modèle du médicament, les industriels réclament la hausse des prix des médicaments tombés dans le domaine public, souvent plus bas que dans les pays voisins, qui plus est dans le contexte actuel d'inflation.
Les questions de bon usage du médicament tout au long de son cycle, la pertinence des soins et la sobriété des prescriptions dans l'Hexagone, champion européen de la consommation d'anxiolytiques et d'antibiotiques, sont aussi évoquées dans les réflexions pour lutter contre les pénuries.
France Assos Santé préconise une réévaluation des stocks obligatoires de médicaments prioritaires à quatre mois contre deux actuellement et « des stocks de produits semi-finis au niveau européen », tels que les flacons, tubes, seringues.
Le modèle de mise en place d'un réseau de pharmacies d'hôpitaux aux États-Unis qui refont des molécules, pour fabriquer des médicaments en pénurie est également évoqué.
Avec AFP.
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