C'est sûrement le plus vrai des livres de Martin Hirsch consacré à l'hôpital, le moins politique. Cette chronique décrit de l'intérieur de manière brute la gestion de la crise sanitaire la plus grave à laquelle a été confronté le premier groupe hospitalier d'Europe. Alors que ce texte a été rédigé à partir des billets quotidiens envoyés aux 100 000 agents de l'AP-HP, et augmenté de messages enregistrés chaque soir sur dictaphone, le lecteur suit ainsi l'arrivée jour après jour l'arrivée de la vague et les efforts surhumains accomplis par les équipes pour ne pas être emportées. Le risque de ce type d'ouvrage est de transformer l'auteur en super-héros, prenant toujours ou presque la bonne décision, épuisé mais toujours disponible, alertant le premier du risque de situation incontrôlable, soignant ses équipes formidables en améliorant le quotidien, bref toujours sur le front des médias grand public face à l’ennemi invisible. On imagine même le biopic avec Martin Hirsch dans le rôle principal et son équipe rapprochée présentée au début de l'ouvrage… Certes, des médecins de l'AP-HP sont égratignés suite à leur dérapage médiatique. Pour autant, les équipes formidables de l'hôpital public, après s'être déchirées les années précédentes ont donné pendant ces longs jours une belle image de cohésion comme toutes les vraies familles. Il faudra donc attendre un autre ouvrage pour connaître les ratages de l'institution. Lorsque par exemple Martin Hirsch dénonce le populisme scientifique, arme fatale contre la démocratie sanitaire, on ne peut que le suivre, à condition de balayer devant sa porte. Exemple, à la date du 27 avril, le directeur général salue l'annonce des premiers résultats obtenus avec le tocilizumab "après un essai contrôlé, randomisé, de bonne qualité", mais pas un mot sur la démission du comité Corimuno protestant contre cette publication prématurée trois jours plus tard (Cf. newsletter Décision & Stratégie Santé du 6 mai 2020). Quant aux exemples d'autodérision, arme favorite paraît-il de Martin Hirsch dans ses échanges avec Aurélien Rousseau, le directeur de l'ARS Ile-de-France, on aurait bien aimé en lire quelques morceaux choisis. Cela sera sans nul doute pour la prochaine fois.
L'énigme du nénuphar face au virus. Martin Hirsch, éd. Stock, 268 pp., 19 euros.
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