Depuis le début du XXe siècle, l’éducation du peuple en matière sanitaire a fait de prodigieux progrès en France. Sous la poussée de cette force, le monde politique s’est vu, bon gré mal gré, conquis par les préoccupations sanitaires, largement justifiées, de l’opinion. En atteste un article paru dans « La Presse Médicale » datée du samedi 19 janvier 1907.
Paris comptait au dernier recensement 2 779 703 habitants enserrés à l’étroit dans une enceinte fortifiée qui va éclater de toutes parts. Ce centre bouillonnant de la vie d’un des plus vieux peuples d’Europe et, comme tel, plus directement menacé que les autres capitales, doit se défendre contre les innombrables ennemis qui menacent sa vie hygiénique. Par quels moyens a-t-il conservé le précieux patrimoine des vies humaines qui se confient à lui en si grand nombre ? Pour répondre, laissons parler les chiffres.
L’organisation de la défense sanitaire de la capitale, commencée il y a un quart de siècle, vers 1880, s’est, depuis 1887, poursuivie, sous la sage direction du Conseil Municipal et du Préfet de la Seine avec une méthode scientifique et une générosité tenace que rien ni personne n’ont pu détourner. Entraîné par la foi active de M. Chautemps, le Conseil Municipal entrait en campagne en décidant, en 1888, l’isolement effectif des malades contagieux dans des ambulances spéciales. La même année, il créait un service municipal de désinfection.
Prophylaxie urbaine
Cette triple manifestation de prophylaxie urbaine constituait la base même de la Défense de Paris, qui se perfectionna peu à peu.
Le service des ambulances de la ville de Paris, ambulances municipales et ambulances urbaines (ces dernières ne s’occupent que du transport des blessées ou victimes d’accidents) se répartit entre quatre stations : rue Caulaincourt, rue de Chaligny, hôpital Saint-Louis et rue Falguière. On peut juger du fonctionnement de ce service en comparant les transports : 18 200 en 1892 et 44 804 en 1905 (parmi lesquels 14 559 pour des malades contagieux).
La désinfection, tant à domicile que dans les étuves municipales de désinfection, a subi, proportionnellement, un accroissement plus grand. L’idée est entrée peu à peu dans l’esprit public et n’a pas peu contribué à enseigner au peuple à se préserver des maladies infectieuses.
Les quatre étuves municipales sises rue du Château-des-Rentiers, rue des Récollets, rue de Chaligny et rue Stendhal ont fourni en bloc, de mai 1889 à la fin de 1905, 662 110 désinfections, tant à domicile qu’à l’étuve municipale. Ce travail considérable a dû jouer un rôle important dans la diminution, officiellement constatée, de la mortalité parisienne par maladies transmissibles.
La préservation de la population saine contre les maladies contagieuses s’exerce encore, à Paris, à l’aide d’autres moyens appropriés à un but déterminé.
Contre la diphtérie, endémique dans maints quartiers, le Conseil Municipal a créé en 1895 un laboratoire de diagnostic bactériologique ouvert gratuitement au public et confié à M. Miquel. Le Préfet de la Seine en profita pour, en 1896, obliger tout enfant convalescent de diphtérie à se munir d’un certificat bactérioscopique notant la disparition du bacille de Löffer de la gorge incriminée. Par extension, le laboratoire municipal de bactériologie fut autorisé à répondre à toutes les demandes d’examen bactérioscopique. De 1895 à 1905 inclus, il pratiqua de la sorte 52 796 examens avec réponses par écrit, ce qui constitue un bel exemple des services rendus par l’Administration l’hygiène publique. Comme corollaire de cette création, le Conseil Municipal subventionna, dès 1896, l’Institut Pasteur pour la préparation et la distribution du sérum antidiphtérique pour les indigents de Paris.
La fièvre typhoïde se complaît à Paris, bien qu’elle ait, depuis trente ans, diminué d’une façon aussi constante que régulière. Elle représente aux yeux des Parisiens la « maladie type », l’ennemie inlassable, et sa propagation par l’eau de boisson est devenue, parmi nous, plus qu’une légende, un article de foi. En outre, le service d’une grande Cité en bonne eau potable est peut-être le plus urgent, le plus sacré des devoirs, au point que nombre d’hygiénistes les plus autorisés ont coutume de juger du degré de l’état hygiénique d’une ville à la quantité d’eau potable distribuée par tête d’habitant. L’adduction des eaux de source à Paris, leur protection contre les contaminations intercurrentes, les difficultés et surveillance médicale et hygiénique des services feraient l’objet du plus invraisemblable des romans politiques si « ceux qui savent » s’avisaient d’en publier les plus importantes péripéties. La ville de Paris a dépensé pour ses eaux de source, d’abord, puis pour ses eaux de Seine filtrées, tant d’efforts louables, tant d’argent aussi, qu’il faut bien lui en savoir gré. Malgré les quelques erreurs et les fautes inévitables au début, nous recevons cependant dans nos murs 680 000 mètres cubes environ d’eau par jour. L’apport pour 1905 fut le suivant : 80 758 000 mètres cubes d’eaux de source, 9 888 000 mètres cubes d’eaux filtrées et 158 274 000 d’eaux de rivière soit au total 248 417 000 mètres cubes.
La lutte sanitaire ne pouvait se confiner aux maladies ; elle se poursuivit, de même contre les habitations insalubres. Le dossier sanitaire de chaque immeuble habité fut dressé ; chaque maison eut sa fiche complète, sur laquelle on porta non seulement les desiderata de la construction, mais aussi l’état sanitaire des habitants ; de cette façon, cette imposante enquête permit de connaître individuellement les maisons, bonnes ou mauvaises, et de les suivre dans leur rôle morbigène. De là à obtenir des propriétaires les réformes jugées indispensables, il n’y avait qu’une question de mesure, d’opportunité et, au besoin, d’action légale. Ainsi, peu à peu, arrivera l’ère nouvelle : la régénération d’une ville immense, par la restauration sanitaire de ses habitants.
Par le court exposé qui précède, on peut juger des progrès déjà accomplis ; on peut prévoir ce qui reste encore à faire. Il n’en est pas moins acquis que le seul signe auquel on ait, dans l’état actuel de la science, le moyen de juger les résultats obtenus, la mortalité, s’abaisse à Paris, chaque année, dans des proportions très appréciables.
Les décès par les six maladies infectieuses transmissibles (fièvre typhoïde, variole, scarlatine, rougeole, coqueluche, diphtérie) étaient en :
1892 : 3 537
1895 : 2 003
1900 : 2 651
1903 : 1 476
1905 : 1 337
la population étant régulièrement en accroissement.
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