C’est une star en Italie. Le Pr Sergio Alfieri, praticien qui a opéré le pape François à deux reprises depuis juin 2021, fait l’objet d’une enquête hors normes démarrée en février 2023, à la suite d’une plainte d’une de ses patientes qui a affirmé que, contrairement à ce qui était prévu, ce n’est pas le chirurgien qui l’a opérée comme prévu. Or, le jour de l’intervention, le nom du Pr Alfieri est bien inscrit au registre des présences de l’hôpital Gemelli, à Rome, où il réalise environ 1 000 interventions par an.
Une enquête est immédiatement ouverte par les carabiniers qui commencent par éplucher le fameux registre. Puis, ils comparent les heures d’entrée et de sortie du Pr Alfieri qui doit pointer avec son badge comme tous les soignants. Au final, les carabiniers détectent 29 anomalies sur le registre des présences. Dans leur rapport, ils écrivent par exemple que le nom du chirurgien est bien inscrit sur le registre le 25 août 2022. Ce jour-là pourtant, le Pr Alfieri se trouvait à 200 kilomètres au nord de Rome.
Le 10 octobre 2022, rebelote : le spécialiste est soi-disant en train d’opérer à l’hôpital Gemelli mais en réalité, le chirurgien du pape participe à un congrès médical dans un hôtel situé sur les hauteurs de Rome. Le 17 septembre 2022, il est dans le train pour Milan mais toujours selon le registre, il réalise quatre opérations en une seule matinée. Et Le 22 novembre, il monte dans un avion pour Milan alors qu’il se trouve officiellement au bloc opératoire de l’hôpital Gemelli.
Pour monter leur dossier, les enquêteurs récupèrent les billets de train et d’avion et ils analysent aussi les données téléphoniques qui permettent de comprendre où se trouvait réellement le Pr Alfieri. Enfin, ils comparent les photographies et les dates des congrès auxquels ce praticien a participé.
Six médecins de l’équipe du Pr Alfieri impliqués
Selon les conclusions de l’enquête préliminaire, six médecins de l’équipe du Pr Alfieri seraient impliqués dans cette affaire car ils auraient écrit le nom du chirurgien sur le registre. Tous ont été renvoyés devant les tribunaux pour faux en écriture publique. Selon la presse italienne, le chirurgien du pape serait également soupçonné de fraude à l’Assurance maladie qui lui a versé plusieurs milliers d’euros pour les opérations qu’il n’a jamais réalisées.
En attendant la décision du tribunal et une date d’audience, une question est déjà sur toutes les lèvres : que risque le « Prof », comme l’appellent affectueusement ses patients, en cas de condamnation ? Pour maître Rosaria Grasso, avocat du barreau de Rome, « il s’agit d’un délit odieux car l’auteur a utilisé son rôle pour tromper l’Assurance maladie et éventuellement les assurances privées mais aussi le patient ». En ce qui concerne les peines, poursuit le spécialiste, « la question est complexe car les magistrats vont devoir approfondir pour individualiser les responsabilités criminelles et pénales des inculpés ».
Selon La Stampa qui a révélé l'enquête, le Pr Alfieri doit à sa proximité et à la « confiance » du Saint-Père le fait d’avoir gravi rapidement les échelons. Plus qu’un simple chirurgien, le Pr Alfieri est membre du conseil d'administration de la Fondation Policlinico Gemelli, membre du Conseil pour la santé du Vatican (un organe de consultation) et directeur scientifique de l'hôpital Gemelli-Isola Tiberina.
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