Durant de nombreuses années, nous avons été informés des développements d’une affaire d’euthanasie dont le principal acteur était le Dr Bonnemaison. De nombreuses associations ont été créées pour soutenir cette personne ; le but étant de défendre le patient, et les dérives engendrées par l’acharnement thérapeutique. Dans cette cacophonie médiatique, nombreux sont les confrères qui ont également souhaité défendre M. Bonnemaison.
Cette affaire nous a montré que le pouvoir des médias a été plus important que la triste réalité des faits. Il ne faut pas oublier que ces événements ont été, pour la première fois, mis en pâture sur la place publique « grâce » aux différents intervenants paramédicaux de la structure où notre ancien confrère travaillait.
Ces personnes souhaitaient mettre au grand jour un malaise grandissant engendré par deux problèmes : une prise de décision d’un médecin sans aucune concertation avec l’équipe médicale et le choix de la sédation par ce praticien, le curare. Ces faits sont d’une importance capitale, car ils nous démontrent que M. Bonnemaison a agi seul, et en utilisant une thérapeutique pas nécessairement adaptée à la problématique des patients.
Abréger les souffrances des patients est une initiative qui peut, sur certains aspects, être tout à fait louable, mais cela doit s’effectuer avec un maximum de discernement et de professionnalisme. Or, dans le cas de M. Bonnemaison, il ne faut pas oublier que la prise en charge des patients n’était pas conforme à une pratique médicale de qualité.
C’est en ce sens que l’Ordre des médecins, tout comme la cour européenne de justice («Le Quotidien» du 12/04/2019) l’ont condamné. Un tel jugement est tout à fait en accord avec les principes de tout professionnel de santé.
Notre rôle consiste à améliorer la santé de nos patients. Bien entendu dans les cas où les données de la science ne nous permettent pas d’intervenir favorablement pour améliorer la santé de nos patients, il est tout à fait important de les aider à ne pas souffrir, cela en misant sur leur confort.
Cette idée permet de rejeter toute notion d’acharnement, et de mettre en avant la qualité de la prise en charge. Bien entendu, tenir ce rôle est parfois difficile et renvoie à de nombreux questionnements (ils sont tout à fait compréhensibles et honorent notre profession).
Cependant, il ne faut pas perdre de vue que nous intervenons en prenant compte d’un élément fondamental : nous n’avons pas de droit de vie ou de mort sur nos patients. Nous n’avons également pas le droit d’agir suivant nos propres convictions. Nous devons prendre en compte les souhaits des patients, des familles et des autres professionnels en charge de ce patient. Il est parfois difficile de faire une synthèse partiale de l’ensemble de ces éléments, mais c’est un garde-fou indispensable pour éviter des dérives engendrées par un pouvoir exercé seul qui peut conduire à des prises de décisions parfois erronées.
« Il est parfois moins admirable d’user de son pouvoir que de retenir d’en user ». H. de Montherlant.
Vous souhaitez vous aussi commenter l'actualité de votre profession dans le « Quotidien du Médecin » ? Adressez vos contributions à jean.paillard@lequotidiendumedecin.fr .
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes