Le dossier médical partagé (DMP) s'apparente encore trop à un « coffre-fort fourre-tout », et doit donc être réorganisé pour être vraiment utile, plaide le député Modem Cyrille Isaac-Sibille dans un rapport adopté mardi par la commission des affaires sociales de l'Assemblée.
Il faut « passer d'un DMP conçu comme un coffre-fort fourre-tout et illisible où s'accumulent sans ordre des documents de santé à un DMP alimenté par un flux construit autour de la donnée structurée de santé, ordonné, lisible et donc utile », souligne le député du Rhône dans ce rapport.
Il plaide pour lancer « dès à présent » le « chantier de l'ordonnancement » de ce carnet de santé numérique.
Confié en 2016 à l'Assurance maladie, le DMP doit permettre à chacun d'accéder à ses données de santé, tout en facilitant le partage d'informations entre soignants pour éviter les actes médicaux inutiles.
À ce jour, 9,3 millions de DMP ont été ouverts, contre 1,9 million fin 2018, lorsque l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn avait relancé le dispositif. L'objectif est d'atteindre 40 millions de DMP ouverts d'ici à 2022.
Un dossier conçu par des informaticiens
« Le DMP, c'était une vraie bonne idée, mais l'erreur est qu'il a été conçu par des informaticiens, et on a oublié les citoyens, les patients et les personnels de santé, a expliqué à l'AFP Cyrille Isaac-Sibille. Depuis 2016, on est reparti sur des meilleures bases, mais il faut maintenant qu'il soit largement utilisé par les patients et les médecins. Or actuellement, c'est un peu une coquille vide. »
Depuis 2018, les patients peuvent ouvrir eux-mêmes leur dossier, qui contient au minimum « les historiques de soins ayant donné lieu à un remboursement », transférés automatiquement, se félicite le rapporteur, lui-même médecin.
Cependant il est « crucial que les informations qu'il contient soient mieux organisées », selon Cyrille Isaac-Sibille, qui s'étonne qu'on ne puisse pas actuellement faire une recherche dans le dossier par mot-clef.
Le rapporteur préconise une « campagne de communication grand public » pour faire connaître l'utilité de cet outil dont la finalité n'a « jamais été clairement explicitée » et qui a donc suscité de la méfiance.
Une rémunération pour intéresser les médecins
L'un des enjeux est de permettre aux médecins et aux scientifiques d'utiliser les DMP comme une base de données globale et anonymisée, afin de « repérer plus facilement des maladies émergentes ou des scandales liés à des médicaments ou des prothèses implantables », selon lui. Mais aussi que les praticiens utilisent de façon plus systématique cet outil. Selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees, ministère de la Santé) citée dans le rapport, le recours aux outils numériques comme le DMP reste confronté à des obstacles générationnels : « près de 80 % des médecins généralistes de moins de 50 ans, contre 48 % seulement des 60 ans ou plus, utilisent quotidiennement le DMP, le logiciel d’aide à la prescription et la messagerie sécurisée de santé. »
Pour encourager les médecins à se saisir du DMP, Cyrille Isaac-Sybille propose que soit intégrée dans le forfait patientèle médecin traitant une rémunération du praticien pour alimenter et suivre le DMP (aujourd'hui, seul le volet de synthèse médicale des patients est rémunéré dans la Rosp, NDLR). Il recommande également d'intégrer au DPC des professionnels de santé des « modules de formation aux outils et enjeux de l’informatique médicale et de l’e-santé » et d'instaurer un « label attestant de la numéricité des professionnels de santé ».
Ch.G. avec AFP
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