Ce n’est pas une nouveauté : la France manque de médecins depuis des années. Et aucune région, aucune ville, n’est épargnée. Toutefois, une étude réalisée par Emmanuel Vigneron, professeur des universités à Montpellier et spécialiste de l'approche territoriale de la santé, dont les résultats ont été publiés jeudi par l’Association des maires ruraux de France (AMRF) attire l’attention sur le fait que leurs communes sont celles qui souffrent le plus de la désertification médicale.
Le nombre de cantons dépourvus de médecins est passé de 91 en 2010 à 148 en 2017, soit une augmentation de 62 %. La densité médicale a d'ailleurs baissé de plus d'un tiers dans 30 % de l'ensemble des cantons pendant la même période. « Dans les prochaines années, on va vers une catastrophe sanitaire », alerte le vice-président de l’AMRF, Dominique Dhumeaux, auprès de l’AFP.
« Les départements ruraux sont moins desservis que les départements urbains notamment en ce qui concerne la présence de spécialistes, relève ainsi l’association. Quelle que soit la catégorie de médecin, la densité est systématiquement inférieure à la campagne par rapport aux territoires hyper urbains. » Selon l’étude, les départements ruraux et hyper ruraux comptaient en moyenne, en 2020, 0,87 et 0,88 médecins généralistes libéraux pour 1 000 habitants, contre 0,98 et 0,93 pour les urbains et hyper urbains.
Plus d'un médecin de campagne sur deux a plus de 55 ans
L’AMRF souligne également que le vieillissement des médecins est « plus marqué à la campagne », où plus de la moitié d’entre eux sont âgés de plus de 55 ans. « Et cela ne va pas en s’améliorant », désespère l’association d’édiles. Dans le détail, 55 % des médecins exerçant dans des zones hyper rurales ont plus de 55 ans, contre 50,3 % des praticiens dans celles hyper urbaines (voir le tableau ci-dessous).
En guise de double peine, ces villes sont également celles attirant le moins les jeunes médecins. « Il existe une tendance marquée à la concentration des jeunes médecins dans les départements urbains », observe l’AMRF qui s’appuie sur le doublement de la part des médecins de moins de 35 ans dans les « départements urbains ou composites » pour dresser ce constat.
« On peut bien sûr envisager que les médecins travaillent jusqu’à 70 ou même 80 ans. C’est après tout l’un des privilèges des professions libérales (…) Pour autant, ceci n’est évidemment pas souhaitable tant pour les médecins eux-mêmes que pour les patients des territoires desservis », note l’association.
Un manque de données
Si une partie des résultats de l'étude se base sur les chiffres issus du Répertoire partagé des professionnels de santé, l'AMRF explique que ceux-ci « ne sont pas simples à établir dès lors qu’on veut les suivre sur plusieurs décennies pour pouvoir mesurer le problème, et l’élu local ne peut jamais les obtenir des tutelles ». Une lacune qui « ne facilite pas la compréhension des choses ni le travail que chacun devrait pouvoir faire : services de l’État, élus, citoyens », selon l'association.
Cette enquête fait donc partie intégrante d’une étude au long cours entamée par l’AMRF dans le but « de fournir aux élus ruraux de nouveaux arguments et apporter au débat public de nouvelles données pour se forger une opinion éclairée sur la réalité du désastre sanitaire français ».
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