À l’heure où la Société francophone de transplantation vient de lancer, dans une tribune au Parisien, un cri d’alarme sur la greffe d’organes, « priorité vitale en danger », une équipe complète composée de 11 médecins, deux infirmiers et un technicien d’études cliniques des services de néphrologie, d’endocrinologie et de génétique clinique du CHU de Rouen, se prépare à la 37e course du cœur, du 20 au 24 mars.
Ce défi de près de 800 km vise à sensibiliser le grand public au don d’organes et aux succès de la transplantation. Une prouesse sportive et solidaire qui consistera à relier Paris et Bourg Saint-Maurice - Les Arcs, en 4 jours et 4 nuits !
Greffons d’or
Le Dr Franck Le Roy, capitaine de l’équipe de néphrologie du CHU de Rouen, raconte au Quotidien les coulisses de cette aventure humaine et médicale, après six mois d’entraînement. « Nous appartenons presque tous au même service de néphrologie. C’est la particularité de notre équipe baptisée les Greffons d’or », confie le néphrologue. Un clin d’œil aux Gryffondors de l’école des sorciers d’Harry Potter. Et aussi à la magie de cet évènement – organisé depuis 1987 par l’association Trans-Forme – autour d'une équipe d’une quinzaine de sportifs greffés du cœur, foie, rein…
« Il y avait déjà eu, en 2021, à l’initiative du Pr Fabien Doguet, chirurgien cardiaque, une première participation du CHU de Rouen, rappelle le Dr Franck Le Roy. Pour ma part, ça fait 30 ans que je connais la course du cœur. J’ai toujours voulu la faire. J’avais déjà participé au prologue de 8 km. J’ai eu l’occasion de rencontrer Olivier Coustere, le président de Trans-forme, lui-même transplanté du rein. Il sollicitait chaque année le CHU de Rouen. Sans succès faute de budget. »
Coureurs chevronnés
Car la course du cœur, c’est aussi la recherche de sponsors. « À la différence des autres équipes de grosses entreprises nationales qui participent, nous devions trouver nous-mêmes des financements à hauteur de 32 000 euros », précise-t-il. Alors, lorsque le Pr Dominique Guerrot, chef du service de néphrologie, annonce, il y a deux ans, la contribution d’un laboratoire, le projet est aussitôt lancé. « On voulait vraiment faire participer un maximum de personnes de la néphro. Et si l’objectif premier est bien de sensibiliser au don d’organes et de communiquer dans l’agglomération, le but était aussi de souder le service autour de la course du cœur », explique encore le praticien et capitaine.
Sur les 14 professionnels que compte l’équipe sportive, tous, à une exception près, étaient déjà des coureurs chevronnés. Et la majorité d’entre eux sont des récidivistes ! Car hormis deux nouvelles recrues, ils ont participé à l’aventure l’année passée. « Ce qui a été extraordinaire, c’est que tous les autres membres du service, ceux qui ne participaient pas à la course, nous ont encouragés et suivis. Sans oublier nos patients et leurs familles ».
Ambassadeurs du don d’organes
En amont de l’édition 2024, qui démarre dans moins d’un mois, chacun des 14 « Greffons d’or » participe à des actions d’information et de sensibilisation dans les écoles, les lieux publics, auprès des médias et des réseaux sociaux. « La semaine passée par exemple, j’étais à la patinoire de Rouen où se déroulait un match de hockey pour faire une information sur le don d’organes et la transplantation puis dans un lycée et une collègue s’est rendue, au sein d’une école primaire et nous irons dans un club de tennis. Nous avons énormément communiqué sur cette problématique, ça tourne très très bien. D’autant que, faisant partie du même service, nous avons des facilités pour nous organiser… », se réjouit le praticien capitaine des runners de Rouen.
« On a réussi à créer une chaîne d’information très importante, au point qu’en 2023, nous avons remporté le 1er prix de la communication sur le don d’organes et les tissus grâce au jeu des clics. » Ni plus ni moins qu’une appli qui permet de supporter l’action d’une équipe, tout en diffusant des renseignements sur le don d’organes et la greffe. « Pour notre petite équipe, ce défi était improbable face à de grosses entreprises nationales qui comptent des milliers de collaborateurs en France. Nous avons collecté des clics de toute la Normandie ! L’avantage que nous avons, c’est que tous, nous maîtrisons bien le sujet », précise le spécialiste.
C'est dur physiquement du fait des nuits blanches ou très courtes, de la répétition des épreuves
Dr Franck Le Roy
L’expérience de la course précédente a révélé l’ampleur du défi sportif. « C'est dur physiquement du fait des nuits blanches ou très courtes, de la répétition des épreuves – jusqu'à trois par jour – , des courses en ligne en solo ou à trois, des relais à deux, des étapes de montagne en montée ou en descente… C’est très sollicitant pour l’organisme. Il y a une fatigue physique et nerveuse qui s’installe sur les quatre jours et nuits… », affirme le capitaine, pourtant aguerri par 30 ans de pratique. « On a presque tous fait beaucoup de compétition, mais pour sa dimension humaine, c’est l’épreuve que j’ai préférée de toute ma carrière sportive. Personnellement, je n'ai jamais autant ressenti d'émotion lors d’un évènement sportif », s’enthousiasme encore le Dr Franck Le Roy. Et de décrire une ambiance incroyable, des rencontres en plein milieu de la nuit avec les mairies et salles des fêtes des 200 villages traversés l’année précédente.
Super-héros
Sans compter l’accueil des enfants sensibilisés au don d’organes grâce au travail de l’Association Trans-Forme et à travers des spectacles adaptés et présentés en amont. « Nous étions à leurs yeux des super-héros partis à pied depuis Paris », se remémore encore le néphrologue. La fascination s’accroît encore lors de l’épreuve de course déguisée (photo) ! Rien d’étonnant si, pour l’occasion, les Greffons d’or ont revêtu capes et baguettes magiques de l’univers d’Harry Potter. Ainsi, à l’instar des 13 autres coureurs du service de néphrologie, le capitaine Franck Le Roy s’est métamorphosé en Frankus Dumbeldord, ou d’autres en Lulu Lovegood, Ellis Potter...
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