Tout est dans ce terme : « soins premiers ».
Comme tous mes collègues praticiens hospitaliers, j’ai assisté impuissant à ce désastre annoncé quand dans les années 1970 la prise en charge de l’intégralité du tout-venant à l’accueil de l’établissement a été confiée à un personnel médical chargé de faire la redistribution des patients quels que soient leur degré d’urgence et la pathologie en cause. On a simplement oublié qu’en faisant ce choix on laissait la réputation du Service public dépendre de médecins - certes munis d’un nouveau diplôme de spécialité - mais tout de même à la base médecins généralistes.
Tous les paramètres invoqués dans l’article du confrère Matthieu Calafiore (n°9983) sont justes, mais ils ne rapportent pas la complète réalité de ce qui se passe sur place.
Pour avoir été missionné - il y a de nombreuses années (1992) par la SOFCOT* - à fournir un rapport sur l’état des lieux, je constate que le nœud du problème n’est toujours pas – non pas identifié – mais dévoilé.
Il résultait principalement de cette enquête nationale que la première mesure à effectuer se trouvait dans l’enceinte même de l’hôpital. Il fallait commencer par rétablir la consultation porte au moment où le trafic s’amplifie, soit entre 18 et 23 heures. Une consultation porte sans doute, mais à la condition qu’elle soit assurée à tour de rôle par tous les praticiens seniors de l’établissement (médecins et chirurgiens) afin que, d’une part les approximations diagnostiques soient corrigées, et que d’autre part l’engorgement subsidiaire des postes de radio et du laboratoire soit empêché grâce à un examen clinique approprié évitant ainsi des demandes immédiates d’examens complémentaires inappropriées, elles-mêmes cause de l’aggravation de l’engorgement de la cour des miracles.
J’ai connu cette consultation porte au cours de mon cursus de formation dans de nombreux hôpitaux de l’AP-HP. Je conviens que la demande en nombre n’était pas si pressante ni aussi sociale qu’aujourd’hui. Ce qui est certain, c’est qu’on ne voyait pas dans les consultations secondaires des retards au juste diagnostic et aux bonnes pratiques, ni ces examens complémentaires superflus. Cette appropriation de l’accès à l’hôpital de toute pathologie sans rendez-vous a naturellement eu les faveurs de l’administration pour son effet de regroupement, mais également des médecins et chirurgiens praticiens cliniciens puisqu’ils se voyaient déchargés de la contrainte d’une permanence hors du lieu de leur exercice habituel. Quant aux chefs de service urgentistes, ils pouvaient afficher lors de chaque CME** un volume exponentiel de fréquentation générateur de retombées matérielles et de postes budgétaires.
J’ai, à plusieurs reprises, alerté le ministère sur ce paramètre qui demande du courage politique, et en dernier lieu à l’actuel locataire de la maison, lui-même urgentiste : toujours pas de réponse !
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*SOFCOT : Société française de chirurgie orthopédique et traumatologique **CME : Commission médicale d’établissement
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