C’EST AU LOUVRE que Forain forme son œil, en reproduisant avec passion les chefs-d’œuvre de Goya et de Rembrandt. À la veille des années 1870, il vit une existence bohème et miséreuse, que viennent toutefois égayer de leur présence ses amis Verlaine, Rimbaud, Degas et surtout Huysmans. Très vite, Forain se familiarise avec les théories impressionnistes. Il expose aux côtés des plus grands noms de ce mouvement phare. Dans ses toiles se lisent autant les variations atmosphériques que les émotions. Dans le même temps, le peintre fait montre d’un regard mordant sur ses contemporains parisiens et devient un satiriste politique et social, qui croque – le plus volontiers à l’encre de Chine ou dans des lithographies très contrastées – avec verve et causticité tous les types (le bourgeois ventripotent et les mondains, la prostituée, l’homme d’affaire, la demi-mondaine) et les travers (l’hypocrisie, l’égoïsme, l’appât du gain, le vice du jeu…) de son époque. Ses dessins sont publiés dans « le Scapin » puis dans « le Figaro », « le Courrier de Paris », « le Gaulois », « The New York Herald »... Outre la caricature de mœurs, l’artiste porte également son intérêt sur les grandes heures de l’histoire de son temps, comme le scandale de Panama, l’affaire Dreyfus ou plus tard, la Première Guerre mondiale.
Mais si Forain parodia cette « Comédie humaine » avec insolence, cynisme et acuité (il publia d’ailleurs un recueil de ses meilleurs dessins, intitulé « la Comédie parisienne » en référence au roman de Balzac), il n’en continua pas moins à être un artiste complet, multipliant les audaces et les trouvailles : en témoignent ses scènes nocturnes, mystérieuses ou vaporeuses, l’économie de moyens dont il fit preuve dans ses portraits, ainsi que la belle mosaïque dont il réalisa les cartons pour le Café Riche, peuplée de formes simplifiées, de motifs stylisés et synthétisés, d’aplats de couleurs…
L’originalité de Forain est grande. Le peintre se nourrit d’une multitude d’influences, qu’il transcenda. Il fit preuve d’une grande liberté. Ses œuvres satiriques et carnavalesques rappellent Ensor ; ses caricatures et ses trognes, Goya et Daumier ; ses dessins de femmes, ceux de Toulouse-Lautrec.
De toutes ces références est née une œuvre personnelle et moderne, à la fois rêveuse et agitée, tendre et désespérée, légère et lumineuse.
Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, tél. 01.53.43.40.00. Tlj sauf lundi, de 10 à 12 heures et de 14 à 16 heures. Jusqu’au 5 juin. catalogue, éd. Paris Musées, 256 p., 39 euros.
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