La réalité dépasse la fiction, et parfois elle en vient. Vivre éternellement, être pour toujours jeune et beau, mais aussi sculpter l'être aimé ou frôler le monstrueux, se retrouvent dans la littérature et les mythes. Pas étonnant que Narcisse, Faust ou Dorian Gray, Frankenstein ou Pygmalion aient leur place dans les peurs ou les demandes liées à cette intrusion particulière dans l'intime.
C'est d'abord une chirurgie « contre nature », rappelle Vladimir Mitz. Mais qu'importe, dira-t-on, si la starlette obtient la poitrine de Sophia Loren et si les sosies de Paul Préboist peuvent devenir l'Alain Delon de « Plein Soleil ».
De fait, l'histoire de cette activité est moins futile. Ce sont les « gueules cassées » de la première guerre mondiale qui illustrent une exigence. Ce que l'auteur exprime avec force : « Pendant la guerre de 14-18, les soldats réfugiés dans les tranchées avaient le visage à découvert. Les balles ennemies ou les explosions dévastaient cette zone exposée ; tous ne mouraient pas. »
Activité contre nature mais réparatrice, les réparations devant être en plus esthétiques. Il faut reconstituer cette main, mais quelques doigts mal remis et c'est la catastrophe et un procès possible.
C'est aussi un travail qui vise un être qui ne s'accepte pas. Il demande ceci en plus, cela en moins, fait une fixation sur une petite bosse sur le nez, se regarde dans la glace et y décèle une dissymétrie qu'il est le seul à voir, ou exige du chirurgien d’être la copie d'une idole.
La réflexion de l'ouvrage s'intensifie et vient sur le terrain à la fois du social et du philosophique. À qui appartient notre corps, se demande l'auteur, en sommes-nous vraiment possesseurs lorsque des organes peuvent être greffés, qu'un utérus peut être loué, et que ce corps peut être l'objet d'un commerce qui apparente certaines activités à celles des prostituées.
Un livre clair, toujours intéressant, qui permet de s'interroger sur ce qui marque la normalité, dans un domaine où, dès que les bornes sont franchies, ils pourraient n'y avoir plus de limites.
« La Transgression des frontières du corps », L'Harmattan, 156 p., 16,50 €.
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