C’est une contrée encore sauvage. Une forêt tropicale où la population demeure rare. Les hauteurs de Santiago de Cuba ne sont pas le lieu privilégié du tourisme cubain, qui préfère les plages de Trinidad, plus au nord, de Baracoa, plus à l’est, ou de Varadero, près de La Havane. C’est pourtant ici, au cœur des parcs nationaux de Turquino et de Gran Piedra que des Français ont élu domicile au milieu du XIXe siècle, pour créer les premières plantations de café et faire de Cuba le premier producteur mondial à l'orée du XXe. Las, leur savoir-faire dans la culture et la torréfaction se sont perdus avec la guerre d’indépendance. Et les fincas (les fermes) sont tombées en désuétude, puis en ruine.
Ce patrimoine exceptionnel, conservé au milieu d’une forêt primaire peuplée d'oiseaux, est aujourd’hui classé sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. Les vestiges des plantations de café du XIXe et du début du XXe siècle dans l'est de Cuba sont considérés comme les témoignages uniques d'une forme d'exploitation agricole de la forêt vierge, dont les traces ont disparu ailleurs dans le monde.
De fait, la région étant peu peuplée, les routes du café avaient disparu… Jusqu’à ce que la fondation du torréfacteur niçois Malongo, pionnier du commerce équitable, soutienne, avec le concours de l’Union européenne et des autorités locales, un projet de restauration à vocation écotouristique sur lequel s’appuient désormais des guides équipés de 4x4.
Dans la Sierra Maestra, berceau de la révolution castriste et du café, la Fraternidad, jadis propriété de la famille du José-Maria de Heredia, membre de l’Académie française, propose un visage moderne de la présence agricole des Hexagonaux. Restaurée cette année, cette finca était notamment exemplaire par son système d’irrigation. En témoigne la présence d’un aqueduc, dont l’ouvrage d’art reste intact dans un paysage caraïbéen verdoyant. Il avait pour rôle d’acheminer l’eau jusqu’au moulin et servait actionner un système mécanique permettant le déparchage et le dépulpage du café.
Écotourisme
Aujourd’hui, l’État cubain veut planter davantage de café. « Il y a une vraie qualité de terroir, analyse l'agronome français Jean-Christophe Galland. Les terres sont fertiles et n’ont jamais été traitées chimiquement. Les caféiculteurs cubains font du bio depuis toujours ce qui rend cette production particulièrement intéressante. » Jean-Christophe Galland, qui travaille pour Malongo, aide les agriculteurs alors que le savoir-faire a tendance à se perdre.
Sur le plan logistique, reste à construire une route jusqu’à Santiago, car la circulation dans ces montagnes n'est possible qu'en 4x4. Dans une perspective économique et surtout agrotouristique, Los Caminos del Cafe (les chemins du café) sont déjà tracés pour les randonneurs et proposent, dans la forêt tropicale, des balades au milieu des manguiers, palmiers et urubus rois, d’étonnants vautours… à tête de dindon.
À Santiago de Cuba, où est enterré Fidel Castro, on garde le souvenir de la présence française dans un quartier baptisé Tivoli, où des maisons de maître, pour beaucoup décrépies, donnent un charme particulier à la ville. Tout près, à proximité immédiate de la cathédrale et de l’hôtel Casa Granda, se trouve la Casa Dranguet. Récemment rénovée, on peut y boire du (bon) café pour l’équivalent d’un euro, ou 1,50 euro si on souhaite « l’arranger » avec du rhum, un alcool de banane ou d’ananas.
« À terme, explique Jean-Pierre Blanc, le directeur général de Malongo, nous espérons pouvoir accompagner les Cubains dans la création, dans ces murs, d’une petite unité de torréfaction qui leur permettra de mieux valoriser leur production. C’est un enjeu de développement économique et de renaissance d’un savoir-faire agricole. » Dans une économie où l’État se mêle de tout, la chose n’est cependant pas facile à mettre en œuvre. Reste une région cubaine riche en patrimoine et en histoire, épargnée par le surtourisme et baignée d’une culture que les populations ont à cœur de partager.
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