Le ministre du Budget à ses côtés, Olivier Véran ne bouda pas son plaisir lors de la présentation du PLFSS 2022 à Bercy. « C'est la première fois depuis des lustres que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale ne contient aucune mesure d'économies pour l'hôpital, a vanté le ministre de la Santé. La crise a rendu d'autant plus flagrant notre besoin de réinvestissement dans notre système de santé ».
Pouvait-il en être autrement ? Les derniers budgets d'un quinquennat sont rarement révolutionnaires. Celui-ci porte surtout les stigmates de la crise sanitaire. En 2022, l'objectif national de dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) augmentera – hors dépenses liées à la crise – de 3,8 % soit 8,4 milliards d'euros supplémentaires, contre en moyenne cinq milliards ajoutés au pot depuis le milieu des années 2000.
Les suites du Ségur hospitalier
Mais en réalité, ce surplus bénéficie essentiellement à l'hôpital via le Ségur dont les mesures programmées de revalorisation joueront à plein l'an prochain (évolutions salariales, réévaluation des grilles, intéressement collectif, aides-soignants, sages-femmes, primes managériales, PU-PH, primes d'encadrement, etc.). Le sous-ONDAM hospitalier atteint ainsi 4,1%, soit 3,7 milliards de crédits nouveaux. L'exercice sera aussi marqué par l’entrée en vigueur de plusieurs réformes du financement des établissements en particulier la psychiatrie, la dotation socle forfaitaire des activités de médecine et celui des hôpitaux de proximité.
Du côté de la ville, les dépenses s'affichent en hausse de 3,2 milliards (+3,3 %), permettant de financer les revalorisations de l'avenant 9, mais pas davantage. Pour la CSMF, il s'agit d'un « budget de transition, dont on a eu du mal à comprendre les tenants et les aboutissants », avance son président, le Dr Jean-Paul Ortiz. « Le ministère prétend que, si on ne tient pas compte des dépenses liées au Covid ni au Ségur, la ville comme l'hôpital ont un ONDAM de 2,7 % », ajoute-t-il. Ce qui correspond, peu ou prou, à l'augmentation naturelle des dépenses de santé…
Cela explique sans doute que les syndicats de libéraux soient prudents sur la lecture de ce budget. Le SML en revanche a mis les pieds dans le plat. « Si la modernisation des hôpitaux est nécessaire, cela ne doit pas se faire au détriment de la médecine de ville, écrit le syndicat qui réunit son congrès annuel à Nice, ce week-end. Le gouvernement a confisqué l’espoir d’une modernisation à court terme de la médecine de ville en imposant la poursuite de la convention médicale au-delà de son terme initial. »

Accès direct aux orthoptistes
Les syndicats avaient concentré leurs inquiétudes sur les menaces de déstructuration des métiers à la faveur de nouveaux transferts de compétence qui semblaient dans l'air du temps. « Nous sommes soulagés que notre demande d'un moratoire sur les délégations de tâches ait été entendue, confie le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. Nous restons vigilants car le diable peut se cacher dans les amendements ».
Déjà, les orthoptistes pourront être autorisés, sans prescription médicale préalable, à réaliser des bilans mais également à prescrire des lunettes et des lentilles « pour les corrections faibles ». Le texte conforte aussi la possibilité pour les kinés d’adapter, sauf indication contraire du médecin et dans le cadre d’un renouvellement, les prescriptions médicales initiales datant de moins d’un an. Pour le reste, le gouvernement mise sur la généralisation de certaines expérimentations « article 51 ». Il s'agit de la prise en charge par télésurveillance du diabète gestationnel, d'un dispositif de prévention de l'obésité infantile ou encore du dépistage du VIH en laboratoire de biologie médicale, sans ordonnance, mise en place à l'initiative des « villes sans sida ».
Le projet de loi sera présenté en conseil des ministres mercredi prochain, enrichi déjà d'une mesure supplémentaire : le remboursement sur prescription médicale des consultations de psychologues – à hauteur de 40 euros la première et 30 euros les suivantes.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique