Impôts : prélèvement à la source, le mode d'emploi

Publié le 16/07/2018
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Crédit photo : PHANIE

Le prélèvement à la source (PAS) répond à un principe simple : dans le système actuel, vous payez en 2018 l’impôt sur les revenus de 2017. Or, beaucoup de choses peuvent arriver entre 2017 et 2018 : un décès, le chômage, un départ en retraite, etc. et vous n’aurez peut-être plus en 2018 de quoi payer l’impôt sur le revenu de 2017 ! Avec le PAS, vous paierez en 2019 l’impôt sur les revenus de 2019. L’impôt s’ajustera au plus près à votre situation financière. Si, par exemple, vous cessez votre activité le 1er juillet 2019, vous n’aurez plus d’impôt à payer sur votre activité libérale. Et lorsque vous commencerez à toucher votre pension de retraite, l’impôt correspondant aura déjà été prélevé.

Selon les types de revenus, le PAS sera effectué de deux façons :

- Pour les salaires, les pensions et les revenus de remplacement (chômage et indemnités journalières), l’impôt sera retenu « à la source », c'est-à-dire que vous ne percevrez votre salaire ou votre pension qu’après prélèvement de l’impôt sur le revenu.

- Pour les revenus libéraux et les revenus fonciers, le Trésor public prélèvera chaque mois sur le compte bancaire que vous lui aurez indiqué un douzième de l’impôt correspondant à ce bénéfice libéral ou aux revenus fonciers.

Salaires et pensions : le taux de prélèvement

C’est l’administration fiscale qui indiquera à votre employeur ou à votre caisse de retraite le « taux de prélèvement » qu’ils devront appliquer à votre salaire ou à votre pension. Si vous avez déposé une déclaration papier, ce taux vous sera communiqué en même temps que votre avis d’imposition. Sinon, vous avez pu le récupérer en télétransmettant votre déclaration. Le taux applicable l’année N est calculé sur la base des revenus de l’année N – 2, jusqu’en août, puis sur les revenus de N – 1 de septembre à décembre.

Attention, ce taux ne s’applique pas à certains revenus qui n’entrent pas dans le champ du PAS : les revenus et les plus-values de valeurs mobilières ainsi que les plus-values immobilières.

Dans un premier temps, l’administration donne le taux applicable aux revenus du foyer fiscal. Mais elle offre ensuite une possibilité : c’est d’opter pour un taux « individualisé ». Chaque conjoint disposera alors d’un taux personnel qui s’appliquera à ses propres revenus. En pratique, le choix de ce taux personnalisé favorise le membre du foyer fiscal qui a le revenu le plus faible. Il est proposé par l’administration à la fin de la procédure de télétransmission. On peut le choisir tout de suite ou le faire ultérieurement.

Il faut surtout noter que les taux individualisés ne changent absolument pas le montant de l’impôt payé en fin de compte par le foyer fiscal. Qu’ils soient appliqués ou non, le résultat sera le même. C’est simplement la répartition de la charge fiscale entre les conjoints qui changera.

Autre choix que vous pouvez faire : opter pour un taux non personnalisé. Si vous ne souhaitez pas que votre employeur connaisse le taux de prélèvement de votre foyer fiscal, vous pouvez demander à l’administration de communiquer à cet employeur un taux neutre qui varie en fonction du revenu déclaré. Le taux neutre sera, par exemple, de 0 % pour une base mensuelle de prélèvement inférieure à 1 367 euros ou de 9 % si cette base est comprise entre 2 512 euros et 2 725 euros.

Toutefois, ce choix d’un taux neutre sera pénalisant puisque, si l’application de ce taux entraîne un prélèvement inférieur à ce qu’aurait donné l’application du taux calculé par l’administration, vous devrez verser spontanément au Trésor public la différence, au plus tard le dernier jour du mois suivant celui de la perception du revenu !

L’option pour ce taux neutre peut s’exercer à tout moment. Elle s’applique le troisième mois suivant celui de la demande. Et elle est tacitement reconduite tous les ans.

Le cas des réductions et crédits d’impôt

Si le principe du PAS est simple, son application s’avère compliquée en France compte tenu du système fiscal qui a multiplié depuis de nombreuses années « crédits » et « réductions » d’impôt. Il suffit, pour s’en persuader, de passer en revue les rubriques de la déclaration 2042 RICI ou de la déclaration 2042 C (longue de 8 pages…).

L’administration a trouvé une solution simple et rapide : les prélèvements effectués de janvier à août sur les salaires et les pensions, de même que les prélèvements sur les revenus libéraux et fonciers pour la même période ne tiendront pas compte de ces réductions et crédits d’impôts !

La bonne nouvelle, c’est que tous les crédits et réductions d’impôt sont maintenus. La mauvaise, c’est que vous servirez de banquier à l’État.

Exemple : votre revenu imposable est de 20 000 euros mais vous bénéficiez de 10 000 euros de réductions et crédits d’impôts. Vos prélèvements de janvier à août seront calculés sur la base de 20 000 euros ! Ce qui veut dire que vous ferez une avance de trésorerie de 8 000 euros au Trésor public puisque vous ne serez remboursé qu’à compter de septembre. On commence à comprendre pourquoi le PAS a été maintenu par le nouveau gouvernement…

Indépendamment des défiscalisations immobilières, le problème se pose pour la déduction des dons, des sommes versées pour l’emploi à domicile et les gardes d’enfants. Si l’on s’en tient au fonctionnement du PAS, les montants versés ne seront pas pris en compte pour le calcul des prélèvements. Le gouvernement a donc prévu de verser en début d’année un acompte de 30 % aux contribuables ayant bénéficié de ces crédits d’impôt l’année précédente.

Comment modifier le taux de prélèvement

L’administration vante la souplesse d’adaptation du prélèvement à la source. Mais est-ce bien exact ?

Selon l’administration, si votre situation change et entraîne une variation « significative » de l’impôt prévisible, vous pourrez demander en cours d’année une mise à jour du taux de prélèvement à la source. S’il s’agit d’un changement de votre situation familiale (naissance d’un enfant, mariage, décès, séparation, etc.), vous devrez le signaler à l’administration dans les soixante jours et vous pourrez alors demander la modification du taux. Mais il faudra que le montant global de votre revenu diminue au moins de 10 % (ou de 200 euros au moins). Bien entendu, si vous souhaitez augmenter vos prélèvements, aucune condition n’est exigée.

Le changement interviendra au plus tard un trimestre après le signalement à l’administration. Celle-ci communiquera le nouveau taux à l’employeur ou à la caisse de retraite.

Rappelons enfin que vous devrez continuer à souscrire vos déclarations fiscales habituelles (2042, 2044, 2042 C PRO, etc.) dans les mêmes délais que maintenant : le prélèvement à la source est un changement du mode de collecte de l’impôt et non de son calcul.

Jacques Gaston-Carrere jgastoncarrere@orange.fr

Source : Le Quotidien du médecin: 9673