En l’espace de quelques semaines, les procédures judiciaires se sont accumulées contre le Dr Jean Thévenot, actuel président du conseil régional de l’Ordre des médecins d'Occitanie et ex-président pendant dix ans de l'Ordre départemental de Haute-Garonne (CDOM 31), accusé de harcèlement et violences morales.
Pressions, injonctions contradictoires, harcèlement via des centaines de mails… : il y a quelques jours d’abord, France 3 Occitanie révélait que deux de ses assistantes avaient saisi la justice pour des violences psychologiques volontaires. Leur avocate, Me Khadija Aoudia, affirme que « les propos et agissements violents et répétés de Mr Thévenot ont eu pour effet une dégradation manifeste des conditions de vie » de ses clientes. « Ce climat délétère et anxiogène, ajoute-t-elle, a eu incontestablement une conséquence directe et importante sur l’état de santé des deux salariées », qui déclarent être sous antidépresseurs et anxiolytiques. Une troisième ex-salariée envisagerait de se tourner vers les Prud’hommes.
Contacté par « Le Quotidien », le Dr Jean Thévenot nie catégoriquement ces faits. « Je n’ai rien à me reprocher. J’ai été président du CDOM 31 durant 10 ans (jusqu’en 2018) , j’avais 8 salariés à gérer, je n’ai jamais eu le moindre problème avec eux. J’ai toujours eu beaucoup de respect pour les gens avec lesquels je travaille. » Il se dit désormais lui-même victime de « harcèlement » de la part des deux assistantes : « J’ai eu droit à des plaintes déposées à l’Ordre départemental et à l’Ordre national. J’ai aussi reçu un courrier anonyme comportant des accusations. »
Acharnement judiciaire ?
Ce n’est pas tout. Deux médecins formulent, dans des registres différents, des accusations de harcèlement moral à l’encontre du Dr Thévenot.
C’est d’abord le cas du Dr Eugénie Izard, une pédopsychiatre condamnée il y a quelques mois, dans un premier temps, à trois mois d’interdiction d’exercer pour avoir dénoncé des faits supposés de maltraitance sur une enfant de la part de son père médecin. Une suspension finalement levée le 30 avril dernier, le Conseil d'État ayant donné raison à la pédopsychiatre. C’est précisément dans le cadre de cette affaire que le Dr Izard aurait subi « un acharnement » de la part de l’Ordre des médecins de Haute-Garonne (CDOM 31) et en particulier du Dr Jean Thévenot, qui était alors président de cette instance. « On lui a reproché des fautes hallucinantes qu’elle n’avait jamais commises, confie une source proche du dossier. Les arguments juridiques pour la condamner étaient dévoyés. » Le Dr Izard, qui est également présidente du REPPEA (Réseau de professionnels pour la protection de l'enfance et l'adolescence), a donc déposé plusieurs plaintes pour harcèlement moral (auprès de la chambre disciplinaire ordinale de première instance et auprès du procureur de la République). La dernière remonte au 7 mai 2021.
Dans une longue vidéo, la pédopsychiatre explique avoir été victime d’un véritable « acharnement judiciaire » pendant cinq années. Car malgré le retrait de la plainte du père médecin, le CDOM 31 avait continué de la poursuivre pour des faits « totalement fallacieux » qui « ne sont en réalité qu’un copier-coller des 17 récriminations mensongères de ce père », raconte-t-elle dans la vidéo. « J’ai tenté de porter plainte à plusieurs reprises contre le conseiller qui s’acharnait contre moi, qui me diffamait et me discréditait (…). Rien n’a été fait, et pire, les conseils de l’Ordre ont couvert les agissements de ce conseiller, son harcèlement par voie procédurale, les diffamations à mon encontre, le boycott du REPPEA, ses abus d’autorité, son non-respect de la confraternité, ses immixtions dans les affaires de famille sans raison professionnelles. » Des faits présumés de harcèlement qui auraient eu pour effet d’altérer la santé du Dr Izard, arrêtée pendant un mois et demi durant en 2016 (stress chronique post-traumatique), précise la plainte du 7 mai.
Convocation
Pneumologue à Cugnaux (31), le Dr Elisabeth Dès affirme elle aussi avoir été malmenée par le Dr Thévenot. Ce dernier n’aurait d’abord pas reconnu le harcèlement moral qu’elle affirme avoir subi au service des urgences du CHU de Toulouse à la fin des années 90. Avant de la « contraindre de vivre deux expertises psychiatriques en 2009 et 2011, ainsi qu’une convocation à l'Ordre national des médecins ». Pour le Dr Dès, « c’était un cocktail de harcèlement moral et d’abus de pouvoir. Il mettait en doute mes compétences professionnelles, ma capacité à continuer à exercer en raison de mon état psychologique ». Nouvelle pression relatée quand « La Dépêche » a publié un article lors de la sortie de son livre, « Le harcèlement moral est un mode de management ». « Il m’a convoqué à l’Ordre. Il a prétendu qu’il se faisait du souci pour moi. S’il y avait des articles qui sortaient, il fallait d’abord que je les lui envoie. Il ne voulait surtout pas que d’autres articles sortent dans la presse. »
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique